La série n'avait sans doute guère d'espoir de perdurer à notre époque, avec son graphisme austère, sa quasi absence de scénario et son étrange univers peuplé de poissons bipèdes. Pourtant, ce jeu de plateforme était en avance sur son temps lors de sa naissance sur Super Famicom fin 1994, en raison d'un gameplay pas piqué des vers que l'on doit aux talents de programmation de son créateur, Kiyoshi Sakai. En effet, notre apprentie chef sushi a pour outil principal un fil de pêche associé à un hameçon, qui sert non seulement d'arme pour ferrer les ennemis, mais aussi et surtout de grappin. Son maniement repose sur un modèle physique déjà étonnamment abouti pour l'ère 16 bits, et devenu encore plus sophistiqué depuis le passage en 2,5D sur PlayStation. Voilà pourquoi il se révèle si délicat à apprivoiser, le temps de découvrir diverses techniques telles que les descentes (ou montées) en rappel, les mouvements de pendule, et par dessus tout de catapulte.

L'art de la pêche au lancer

Car l'élasticité de la ligne permet de l'étirer ou de la contracter, afin de se propulser en l'air. Une fois ces manoeuvres assimilées, on parvient à réaliser des acrobaties tout bonnement incroyables et néanmoins souvent nécessaires, à l'instar de sauts millimétrés. Et cette mécanique va de pair avec un level design très ingénieux, les niveaux prenant ainsi des allures de puzzles. Idem pour les boss, dotés de patterns facétieux qui les rendent de prime abord invincibles... jusqu'à ce que l'on détermine comment les cuisiner. La réussite dépend donc autant de la dextérité que de la réflexion, a fortiori pour dénicher les objets cachés et les portes dérobées, histoire de déverrouiller tenues, musiques et autres réjouissants bonus (mention spéciale aux dessins de Toshinobu Kondo). Or, un retour à la case départ vient sanctionner la moindre erreur, des échecs ostensiblement comptabilisés pour souligner cette méthode d'apprentissage à la dure, façon vieille école.

Poisson globe

Heureusement, cet opus 3DS introduit quelques touches de modernité, à commencer par la possibilité de stopper le temps pour ajuster son tir. Une nouvelle camarade de notre héroïne peut d'ailleurs utiliser ce talent tout en se déplaçant, tandis qu'une autre est capable de reprendre depuis les points de contrôle. Ces compétences s'avèrent très utiles dans l'optique de venir à bout du challenge de longue haleine que constitue la cinquantaine de stages, toutefois elles ne seront d'aucun secours pour se hisser au sommet des classements en ligne. Umihara Kawase a toujours offert la possibilité d'enregistrer les vidéos de ses performances - encore une illustration de son côté précurseur. Désormais on a également loisir de comparer ses chronos à ceux des autres joueurs de la planète, parmi lesquels figurent des fans particulièrement dévoués, voire carrément accros. Pas si surprenant, tant il est difficile de s'en éloigner quand on a mordu à l'appât !