C'est un syndrome récurrent parmi les séries de tous horizons : Au fil des opus, l'intrigue tend à impliquer de plus en plus les principaux protagonistes, un penchant encore plus prononcé lorsqu'il s'agit de préquelles. Rappelons en effet que si Le Masque des Miracles se déroule dans le sillage de l'Appel du Spectre, ces deux épisodes se situent chronologiquement avant la première trilogie débutée sur DS. Après avoir découvert les raisons qui ont poussé Luke à devenir l'apprenti du Professeur, l'heure est donc venue de s'intéresser au mystérieux passé de notre cher Hershel Layton, et d'un drame qui a scellé son destin durant sa prime jeunesse. D'emblée, le ton paraît plus grave qu'à l'accoutumée, en contraste avec l'humeur festive de Dorémont. Encore que l'ambiance retombe brusquement dès leur arrivée dans les rues florissantes de la bien nommée cité des prodiges. Un pseudo "Maître du Masque" interrompt alors la parade du carnaval pour en prédire la destruction si les autochtones ne se soumettent pas à sa volonté. Ce spectacle laisse certains badauds de marbre semble-t-il, puisqu'ils se retrouvent transformés en statues de pierre !

Un peu d'animation...

L'aventure débute ainsi sur les chapeaux de roue, d'autant que nos héros prennent immédiatement en chasse ce fanfaron, une scène d'action qui tranche avec le rythme traditionnellement très posé de la saga. Pas de quoi décoiffer le flegmatique Professeur Layton, ce genre de passages mouvementés se comptant sur les doigts d'une main à l'échelle de l'épopée. Le Masque des Miracles se montre toutefois nettement moins statique que ses prédécesseurs, car en parallèle des incontournables séquences animées, les quelques cutscenes et les conversations sont désormais présentées en 3D polygonale. Grâce à ce nouveau moteur graphique, les personnages ont l'air plus vivant, un surcroît d'expressivité dont profitent les dialogues, toujours localisés avec un français de parfait gentleman. Et ce ravalement de façade se traduit également à travers les décors. A priori, on pourrait penser qu'ils sont encore affichés en 2D, au regard de leur finesse et de leur charme quasi intacts. Mais en les observant à la loupe, on s'aperçoit immédiatement qu'ils ont étés aussi modélisés en trois dimensions à partir des dessins, la perspective pivotant selon les déplacements du stylet.

Focus 3D

D'ailleurs, la loupe constitue dorénavant la principale alliée de nos enquêteurs. Cet ustensile sert à scruter les environnements, construits sur plusieurs plans à la manière des livres en relief cartonnés, histoire d'y trouver des pièces SOS, des objets dignes de commentaires, ou des personnes à interroger. La lentille change de couleur dès que l'on passe au dessus d'un élément interactif, voire d'une zone qui offre un point de vue rapproché. Un tel théâtre mobile s'avère évidemment du plus bel effet en 3D auto stéréoscopique, notamment quand Layton pointe fièrement son doigt vers l'écran, et ce en dépit d'un rendu parfois intrusif à son niveau maximal. Ce phénomène se révèle plus gênant lorsque l'on cogite sur un casse-tête, un exercice qui nécessite de fixer l'écran pendant de longues périodes. Cela dit, l'affichage en relief facilite sensiblement la visualisation de quelques énigmes, démontrant ainsi que cette technologie dispose de modestes vertus ludiques en sus de ses prétentions esthétiques. De même, les détecteurs de mouvement sont exploités par une poignée de puzzles, hélas encore trop rares pour parler de révolution.

Passéiste ?

Il subsiste que Level-5 a véritablement cherché à faire évoluer sa formule, en mettant également l'accent sur la narration. Une fois de plus, les lumières éblouissantes de cette ville parc d'attraction aux allures assumées de Las Vegas à l'Européenne cachent un scénario écrit d'une main de maître. Le Masque des Miracle s'appuie cependant sur une mise en scène plus élaborée, et il ne la doit pas qu'à ses avancées visuelles. En effet, le tempo de l'intrigue a été soigneusement travaillé pour laisser des plages de respiration, des moments propices au développement des personnages et en particulier de celui d'Hershel Layton, via le prisme de son adolescence. Et la partition musicale de Tomohito Nishiura, plus habité que jamais par Yasunori Mitsuda, renforce naturellement ces instants d'émotion. Revers de la médaille, les énigmes surviennent souvent en rafales. De réels efforts ont heureusement été (ré)entrepris pour que ces devinettes s'intègrent un peu mieux dans le cours de l'histoire, tout spécialement celles liées à l'archéologie, bien que leur teneur n'ait pas grand chose à voir avec le contexte la plupart du temps. Il en résulte un récit à la fois plus poignant, et captivant, sans qu'il ne s'interdise quelques digressions.

Faites vos jeux !

Les "épisodes", autrement dit le recueil des péripéties qui arrivent aux protagonistes secondaires en marge de la trame centrale, sont toujours de la partie. Idem pour la collectionnite d'objets glanés ici et là en guise de souvenirs. Et n'oublions pas les indéracinables mini-jeux, à commencer par un malicieux jeu de réflexion consacré aux sciences occultes du marketing de proximité. Il consiste à conduire le chaland à acheter compulsivement tous les articles en vente sur l'étal. La seconde activité récréative se résume à guider un robot sur un plateau jusqu'à la sortie, selon un principe finalement assez proche de la gestion du cheminement du train Mini Express dans l'Appel du Spectre. Enfin le Théâtre de Capucin comporte aussi des similitudes avec les Marionnettes du précédent opus, même si le dressage d'un lapin a indéniablement un côté plus attachant.

Espérons par conséquent que les énigmes téléchargeables qui seront publiées chaque jour pendant un an, après la sortie du Masque des Miracles, fassent preuve de plus d'inventivité. En tout cas, ce copieux programme permettra sans l'ombre d'un doute de patienter tranquillement jusqu'au prochain épisode...