Blablabla la soeur de Giana - délicieux prénom - se fait aspirer dans le monde des rêves blablabla elle part la secourir blablabla gros dragon. J'espère que vous avez apprécié ce résumé du scénario, j'en ai bavé pour bien condenser tout ça. Bon, si ça ne vous dérange pas, nous allons cesser les galéjades et passer directement à l'essentiel. Toujours platformer, toujours en représentation 2D (mais constitué de graphismes en 3D), le jeu de Black Forest Games débute assez doucement. Rien de bien compliqué pour apprivoiser Giana : sauter suffit pour esquiver les monstres, leur écrabouiller la gueule et atteindre quelques hauteurs où se cachent des diamants à collecter. Mais très vite, un premier obstacle. Et là, touche magique et TWIST. Voilà la jeune fille punk, les cheveux rouges et... l'environnement n'a plus le même aspect. La musique gentillette devient rock. Tout apparaît désormais verdoyant, guilleret, limite village des Schtroumphfs, alors que quelques secondes auparavant je croisais des diables dans un cimetière. Sens inverse. Ca fonctionne. En un clin d'oeil, on passe d'une réalité à une autre. Et d'une Giana - décidément quel prénom splendide - à une autre.

Twist à Saint-Tropez

En changeant de monde, la topographie reste à peu près identique. Mais cela peut engendrer la modification de la tenue des obstacles, matérialiser des diamants, plateformes, portes, pièges épineux, inverser le cours d'un mécanisme. Voire même provoquer d'autres répercussions : un ennemi abattu se mue en une sorte de trampoline de l'autre côté. En outre, on a accès à des pouvoirs différents. Giana version mignonne effectue une toupie lui permettant de gagner un peu de hauteur puis de planer tant que l'on maintient la touche (Peach style). La rockeuse, elle, a la capacité de se projeter, rapidement, dans toutes les directions, sous la forme d'une boule de feu capable de détruire briques, murs friables et antagonistes. Et de rebondir contre des parois rapprochées. Subtilité, si vous tuez un ennemi sous cette forme, vous pouvez réutiliser le pouvoir juste après et donc vous propulser encore plus loin. Autre subtilité, il est possible de simplement changer d'héroïne grâce à la touche assignée ou en usant d'une compétence. Le level design, qui profite autant de l'aspect horizontal que vertical, travaille parfaitement cette alternance, si bien qu'au début il n'est pas rare de s'emmêler les pinceaux entre les différents boutons. Maladresse dont il faut se débarrasser prestement si l'on souhaite finir les 3 mondes du jeu, découpés en 23 niveaux (ponctués par 3 boss très chauds du slip). Oui, 23 seulement. Mais attendez, pour les torcher en long, en large et en travers dans tous les modes de jeu (on trouve du Score Attack, du Time Attack, du Hardcore sans checkpoint et du Super Hardcore avec UNE SEULE VIE), vous avez un peu de temps.

Dirty Giana

A mesure que vous progressez, il n'est pas impossible que vous développiez un petit Gilles de la Tourette. A contre-courant de la tendance actuelle en matière de difficulté, celle-ci se montre corsée, les erreurs impardonnables. Une touchette et c'est la mort. Un mauvais calcul de saut ou de distance effective pour le dash de la Giana de cuir et de clous, et retour au checkpoint. Ca se joue souvent au pixel près et dans la hâte, comme lorsqu'on est poursuivi par un fantôme, tout en devant calculer le timing de piques sortant d'une plateforme... accessible uniquement en Giana blonde. Le level design, malin, alternant des phases vives et d'autres plus posées, est à s'arracher les cheveux tout en proférant les pires insultes à l'encontre de sa bécane ou de son pad. Peut-être même décourageant pour les moins acharnés. Heureusement, pas de compteur de vies, celles-ci sont infinies. Mais tout de même, quand à la fin d'un niveau on vous rappelle le nombre d'échecs, ça fout la rage. Autre chose intéressante, le devoir de montrer du skill pour avancer. Les niveaux des boss ne se débloquent que si vous avez bien nettoyé ceux qui le précèdent. Autrement dit, récolté un max de diamants. Et là, il va falloir surveiller les lieux avec attention. Parce que de la zone cachée, sur terre, en l'air ou dans l'eau, il y en a. Pas du genre accessible en un saut à l'arrache. Non, il va falloir switcher au bon moment, respecter les directions et le tempo à la lettre. La prise en mains, irréprochable, et votre propre dextérité, constitueront vos principales alliées. Et en parvenant à vos fins, vous aurez cette sensation de surpuissance.

Deutsche qualität

Bien conçu, très "challenging" comme dirait Julo lors de débats enregistrés, ce Giana Sisters se révèle simplement sublime pour les yeux et les oreilles. Sur le plan visuel, même si on note une certaine difficulté à se renouveler dans les thèmes (forêt, château, mines, etc.) ou les ennemis, impossible de ne pas trouver l'ensemble somptueux. Sous DirectX 11, tous les paramètres poussés à fond, je pense même pouvoir affirmer que c'est juste merveilleux à regarder. Les environnements sont fournis, vivants, détaillés, ne souffrent d'aucune faute de goût ou d'animation foireuse côté monstres. Les transitions entre les deux univers, qui s'exécutent via un morphing ingénieux, se révèlent instantanées et imperceptibles. Même constat sur le plan sonore, on passe d'un son gentillet - et qui nous ramène presque 25 ans en arrière grâce au réarrangement de certains vieux thèmes - aux mêmes mélodies boostées par des gros riffs de guitares sans aucun à-coup. Du grand art.

Ah, en matant les screens, ces décors enfantins et ce perso principal tout choupinet, vous vous attendiez à un jeu pour enfant de 4 ans ? Eh bien non. Black Forest Games s'est fendu d'un jeu de plate-forme à l'ancienne, bien balèze, dodu, intelligent et dont on ne voit pas le bout sans s'investir un minimum pour déjouer des pièges franchement vicieux. Et fichtrement beau, pour ne rien gâcher. Une vraie bonne surprise qui affranchit la licence de son passé de vilaine copieuse et qui, je l'espère, aura droit à l'accueil qu'elle mérite sur PC pour débarquer dans les meilleures conditions en téléchargement sur consoles de salon.