Pas très loquace, l'Overlord que vous êtes s'exprime mieux avec ses mains (si possible tenant une hache) que par la voie des mots. Ca tombe bien : on vient de vous déterrer pour redorer le blason de votre royaume, bastion décrépi du Mal. Aussi étrange que cela puisse paraître, il ne vous suffira pourtant pas de mettre à sac villages et contrées sauvages environnantes pour imposer de nouveau votre suprématie. Car si votre tour est en ruines, c'est justement parce que les seigneurs des races perfides se sont unis pour réduire en cendres votre prédécesseur et piller ses richesses. D'emblée, votre mission prend corps : il vous appartient d'investir les terres ennemies pour affronter les seigneurs corrompus, de reprendre possession de vos biens, et surtout de vous faire respecter des masses en les malmenant ou en les incitant, de façon presque plus perverse, à vous aduler. Aidez les races trahies par leur propre suzerain, ou bien menez-les vers un destin funeste... Selon que vous massacriez ou que vous prêtiez main forte, différentes opportunités s'offriront à vous. En clair : plus vous êtes maléfique, plus votre pouvoir sera grand, mais moins les opprimés auront envie de vous confier de nouvelles quêtes... Mêmes les plus cruels leaders ont des dilemmes !

"Ca va sentir bon le halfelin grillé !"

Votre force ne réside pas tant dans vos larges épaules que dans l'armée de gobelins totalement dévoués qui servira sans faillir Votre Précieuse Ignominie... Et c'est là que réside toute l'essence de ce titre atypique : vous ne contrôlez pas seulement votre Overlord, mais aussi, et surtout, ses "larbins", trop heureux de servir de chair à canon en toutes circonstances. Quatre types de larbins pourront servir sous vos ordres pour peu que vous retrouviez leurs puits d'invocation respectifs, et que vous vous en empariez. Disponibles dès le début, les bruns sont des guerriers hors pairs, résistants aux coups et frappant fort, capables de s'équiper de toutes sortes d'armes et armures, de la citrouille au heaume romain, du gourdin à la hache en or massif. Les rouges, quant à eux, vous permettront d'étouffer les feux qui vous font obstacle, ou au contraire d'enflammer champs de blés, arbres et, plus pertinemment, ennemis. En bons lanceurs de sorts, leur fragilité fait d'eux des proies faciles, mais postés à distance, leur efficacité est sans égal. Aptes à dissiper les volutes de poison qui seraient fatales à vos autres larbins, les verts sont pour leur part d'excellents combattants au corps à corps, pourvu que les bruns occupent leur proie : bondissant alors dans leur dos, ils font des ravages. Utilisez-les également pour évoluer en toute discrétion : immobiles, ils savent rester invisibles au regard non entraîné. Enfin, seuls à pouvoir nager, les larbins bleus sont aussi capables de ressusciter leurs frères d'armes tombés au combat. Soyez vigilants à leur égard. Tout comme les rouges, leur fragilité excessive n'autorise pas les échauffourées gratuites.

"Duc de la sournoiserie"

Halfelins, guerriers du désert, morts-vivants et autres créatures des forêts... La grande diversité des ennemis rencontrés vous obligera à adopter certains réflexes salvateurs. Ainsi serez-vous prompt à enflammer les champs dans lesquels sont embusqués les premiers, à vous méfier des seconds qui alertent de votre présence leurs confrères, à surveiller vos arrières pour éviter que les nains ne massacrent vos fragiles larbins postés en retrait, ou encore à vous jeter sur les shamans vaudous avant qu'ils ne ressuscitent leurs confrères. Très basique lorsqu'il est question d'adversaires classiques, les combats se montrent davantage tactiques dès qu'il s'agit d'affronter boss et mini boss, du teigneux Flambeur Nain aux créatures cyclopes invocatrices. Là encore, pour peu que vous n'ayez pas peur de perdre des larbins, il vous est souvent possible d'opter pour une solution radicale en vous jetant férocement dans la bataille. Mais attention, vos réserves de larbins ne sont pas inépuisables, et la seule façon de pouvoir en invoquer davantage consiste à récolter les âmes de vos victimes (brunes, bleues, vertes ou rouges selon leur espèce), chacune d'elles vous permettant d'invoquer un séide de la même couleur. Si vous pouvez à tout moment revenir sur les territoires que vous avez déjà conquis pour regarnir vos puits d'âmes en faisant un carnage dans les zones de respawn, la solution brutale n'est pas toujours la meilleure...

Car outre pillages et combats, de nombreuses séances de réflexion mettent plus que jamais à contribution les aptitudes particulières de vos nervis turbulents. Épreuves de diversion, partage des tâches, organisation d'embuscades, jeux de pistes, vols discrets... À vous de trouver la stratégie qui vous débloquera tel ou tel passage, ou vous permettra de vous emparer d'un objet important. De manière générale, soyez attentif à toute interactivité avec le décor : si votre larbin en chef vous donne régulièrement des indices, on se retrouve parfois un peu désemparé face à certaines énigmes moins évidentes. Par endroits, trop livré à vous-même, vous pourriez même opter une fois de plus trop facilement pour la solution brute du sacrifice de larbins. Et pourtant...

"Miséricordieux farceur d'estomac"

Malheureusement peu aidé lors de ses exactions diverses, le joueur doit apprendre sur le tas, passant parfois à côté d'éléments essentiels dont il ne saura tirer pleinement profit, tels les différents pouvoirs magiques mis à sa disposition. Car sachez-le, votre Overlord est tout puissant dès qu'il s'agit de combattre. Résistant, et frappant fort, il dispose également d'une batterie de sorts divisés en 4 écoles que vous obtiendrez au fur et à mesure de votre progression. Buffs de protection ou d'attaque pour vos troupes, debuffs de l'ennemi et sorts de feu pour Sa Majesté : votre avatar est loin d'être en reste quand il s'agit de passer à l'action, et peut même exterminer certains boss à lui tout seul entre des mains expertes. Dommage qu'un grimoire ne fasse pas davantage lumière sur le sujet pour résumer chaque aptitude : les plus frileux - ou les moins curieux - ne prendront pas forcément la peine de toutes les tester... De même, on regrettera l'absence incompréhensible d'une carte ou d'une boussole pour retrouver plus aisément son chemin dans certaines zones. Il vous faudra vous en passer. Finalement, il vous faudra un certain temps pour découvrir toute l'étendue des actions possibles et apprécier à sa juste valeur le maniement des gobelins ; et en l'absence d'explications plus fournies, le découvrir de vous-même. A ce titre d'ailleurs, il est fortement conseillé, sur PC, de brancher un paddle à double stick analogique de type PS2 ou 360 pour un contrôle optimal des larbins, très douteux et pour le moins imprécis à la souris et au clavier, voir totalement « à chier » et « frustrant » pour reprendre les termes de Caf. Sélection des gobelins par couleurs, individuellement ou en groupe, positionnement sur le terrain, déplacement sur de longues distances, transport d'objets, enclenchement de mécanismes... Le contrôle de vos larbins est trop important pour se passer de manette.

"Purgeur de paladin perverti"

N'hésitez pas à rentrer au bercail entre chaque mission pour vous oxygéner un brin ; votre tour est un parc d'activités à elle seule, bien que dispensable à votre progression. Rebâtissez-là en achetant les ornements qui lui rendront sa grandeur d'antan, et faites confiance à votre maîtresse pour décorer les lieux avec goût. Vous y trouverez notamment une arène pour vous entraîner, ainsi qu'une forge qui vous permettra, moyennant finances, de créer de nouvelles armes et armures pour votre Overlord. Cette dernière option, non négligeable, verra votre efficacité augmenter en combat. Si tant est que vous n'ayez pas bêtement gaspillé vos larbins de réserve, profitez-en pour les sacrifier ici par centaines afin d'ensorceler chaque pièce forgée et améliorer ainsi votre puissance d'attaque, votre endurance ou encore votre capacité à contrôler davantage de gobelins...

"Chef de l'armée pyromane !"

Séduisant dans le fond, Overlord fait également mouche dans la forme. Patte graphique pleine d'humour (à l'unisson avec les dialogues !), décors soignés, effet de bloom presque excessif mais qui renforce sans fausse note la vision enchanteresse des paysages typés heroïc fantasy... Même l'animation se révèle admirable, en tout cas celle des larbins, friands de cabrioles en tous genres (et capables de soulager leur vessie n'importe où...). Détails notables : la bande son se montre aussi agréable que variée, les bruitages d'excellente facture et le doublage, si peu souvent convaincant dans les jeux en français, réussit l'exploit de nous décrocher des sourires. Une réussite d'ensemble incontestable même si, ne vous leurrez pas, Overlord réclame une configuration relativement puissante sur PC pour donner le meilleur de lui-même.

En ce qui concerne la durée de vie, attendez-vous à dépasser la trentaine d'heures de jeu si tant est que vous fassiez le nécessaire pour que l'on vous confie toutes les quêtes existantes. Certains pourraient s'en inquiéter et pressentir la lassitude : ils la ressentiront si les allers / retours obligés les agacent. Mais si vous accrochez, croyez-moi, ce titre sera limite trop court à votre goût. Dommage, toutefois, que ce jeu pèche par son manque de clarté généralisé, et l'absence de menus explicatifs. Son incroyable diversité méritait que l'on accompagne davantage le joueur dans sa découverte. Mais que ce traitement ne vous rebute pas : l'ambiance d'Overlord, son système de jeu ainsi que sa richesse impressionnante sont les garants d'une expérience de jeu grisante, et rafraîchissante dans son originalité.