Bien au contraire, même, puisque Soul Bubbles est entièrement auto-financé. Si Eidos a signé pour éditer le jeu, ce dernier a été bouclé en s'affranchissant des modèles de financement traditionnels. Une totale liberté créative, donc, chère à Olivier comme à ceux qui l'accompagnent... et le résultat, à paraître le 13 Juin, fleure bon la légèreté printanière.

Un parcours de cancre génial

Après avoir quitté Nevrax (The Saga of Ryzom) dont il fut le co-fondateur, puis créé Mekensleep, Olivier accède enfin à l'indépendance créative. En bon garnement, il n'en a fait qu'à sa tête, bravant les règles établies en étant persuadé que tout le monde avait tort et lui raison. Et au final, il s'est débarrassé du diktat des éditeurs (la mauvaise influence extérieure), de celui des capital-riskers (la mauvaise influence intérieure). Mais plus question de faire du MMO ; c'est le poker en ligne qui l'intéresse. Il y a semble-t-il autant à y apporter (vu la pauvreté des clients de jeu existant à l'époque), qu'à en ramasser (des business-modèles particulièrement intéressants). Alors que le projet est à peine lancé, la France légifère de manière "handicapante" sur ce terrain de jeu d'argent émergeant, et enraye la machine. Le projet passe en stand-by, nouveau coup dur...

Changement de monde

En 2004, Olivier travaille depuis des années déjà dans le jeu vidéo. Et il n'en a pas encore sorti un seul. Retour dans les starting-blocks, mais cette fois, ce sera un concept solo, éveillé par Omar Cornut (ce n'est pas un pseudonyme), et développé autour de la DS. Le programmeur et ami d'Olivier lui montre un petit programme tout bête, avec une bulle sur laquelle on peut souffler, et c'est tout. S'en suivront plus de deux ans de tâtonnements et d'idées, de design et de recherches, de prototypes et de démos, pour créer le coeur de Soul Bubbles, avec l'aide de Frédérick Raynal (Alone in the Dark, Little Big Adventure) au passage. "Il a toute cette culture du jeu solo que je n'avais pas encore, et avec son expérience, il nous a permit d'éviter plein de pièges", explique Olivier. Au printemps 2006 le projet s'accélère, pour un an de level design, de test, de polissage, de création de contenu, d'affinement des personnages... et tout le nécessaire pour faire de Soul Bubbles un jeu.

Un jeu Zen

Comme pour beaucoup de très bons jeux avant lui, tout s'articule autour d'un concept basique (mener des esprits à la sortie du niveau), et de mécaniques simples (les esprits doivent être protégées de l'air libre par une bulle et le joueur peut dessiner, diviser, ou aspirer les bulles). Enrobé dans une direction artistique inspirée des grandes cultures chamaniques, Soul Bubbles nous offre donc le rôle d'un guide, qui mènera les esprits au travers de huit mondes divisés en niveaux plus ou moins labyrinthiques, dont le graphisme comme l'ambiance sonore jouent la carte de la nature, du calme, de l'apaisant ; et ça lui va bien. Il y a bien quelques ennemis qui tenteront de gober les esprits protégés par vos bulles, mais même ceux-ci renaîtront sous forme de fleur après qu'on s'en est débarrassé, et l'essentiel du challenge se situera plutôt dans le level design lui-même qu'au travers d'ennemis à éliminer. Epines, flammes, courants d'air, givre, mécanismes divers et autres trouvailles compliquent la progression et la physique de la bulle sur laquelle le joueur souffle à l'aide... du stylet, et qui s'avère vite être le personnage principal du jeu.

Le plaisir de buller

Jouer sur la taille de la bulle pour qu'elle touche un double interrupteur, la diviser en plusieurs plus petites pour franchir un passage étroit, récolter de l'eau pour éteindre un feu, trancher des lianes qui retiennent la bulle... les mécaniques qui tournent autour de cette (ces) bulle(s) tirent parti de sa physique irréprochable, autant que des spécificités du couple stylet / écran tactile. Particulièrement original, Soul Bubbles a beau reprendre une structure classique en niveaux et en mondes, et demander la récolte de "calebasses" pour progresser, à jouer, il procure des sensations qui lui sont propres. On peut le parcourir en tentant le meilleur chrono, ou explorer de fond en comble les niveaux en prenant son temps, mais quoiqu'il arrive il semble surtout parti pour détendre, et surprendre. Après l'avoir parcourue sur une "eprom" que je vais devoir me décider à rendre en attendant la version finale, je m'avoue curieusement sous le charme de cette production unique aux mécaniques intelligentes. Reste à voir si les idées sauront se montrer aussi nombreuses et surprenantes que cet avant-goût charmant ne me laisse l'espérer...