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Comme chacun le sait, il est difficile de faire disparaître un cliché. À force d'être répété, il finit par être associé à une vérité dans l'inconscient collectif. Les joueurs ne le savent que trop bien. Qui n'a jamais entendu de la part d'un proche ou d'une connaissance que "les jeux vidéo rendent violent" ?

Les médias généralistes grands public se font d'ailleurs un malin plaisir, dès qu'ils le peuvent, à faire le raccourci entre meurtres commis par des fous et les jeux vidéo violents auxquels ces derniers aiment jouer (ou pas, d'ailleurs). Et c'est justement cette situation qui cause actuellement du tort à l'industrie française du jeu vidéo.

Adoptée il y a sept mois par le Parlement, la réforme du crédit d'impôt à destination des entreprises françaises du jeu n'a toujours pas été appliquée. Les raisons de ce délai ? Le fait que cette réforme concerne également les titres destinés aux adultes.

L'État souhaite en effet éviter de donner l'impression de financer la création de jeux violents, et par conséquent éviter tout mauvais coup de pub potentiel. C'est ce qu'a explicitement déclaré un proche du dossier au site internet du quotidien français Le Figaro :

Imaginez qu'un de ces jeux soit mis en cause par des associations familiales dans le cadre d'un fait divers. Ce serait dévastateur.

En somme, aider la création française c'est bien, mais avoir une communication et une image irréprochables, c'est mieux. Les députés et les sénateurs semblaient pourtant avoir pris leurs précautions pendant la phase de rédaction de la réforme. En effet, le texte précise que le crédit d'impôt ne pouvait profiter à des jeux "d'une très grande violence" pouvant "nuire gravement à l'épanouissement physique et moral" de son utilisateur. Si la première description est pour le moins explicite, la deuxième rend le texte difficilement applicable tant son interprétation est libre (cette seconde description pourrait par ailleurs être appliquée à des jeux qui ne sont pas violents).

Depuis plusieurs semaines, les cabinets et le Syndicat National du Jeu Vidéo (SNJV) tentent de trouver une solution. L'excès de prudence des représentants de l'État pose cependant un certain nombre de problèmes, comme l'explique Julien Villedieu, délégué général du SNJV, au Figaro :

Il y a une réelle volonté d'avancer, mais les services prennent énormément de précautions. Ces précautions peuvent se transformer en barrières et in fine amoindrir le dispositif.

Course contre la montre

À la peur du mauvais coup de pub s'ajoute, officiellement du côté du gouvernement, la crainte d'essuyer un rejet lorsque le texte sera présenté à la Commission européenne.

De leur côté, les membres de l'industrie française du jeu vidéo rejettent cette crainte et prennent en exemple le crédit d'impôt adopté en mars dernier par le gouvernement britannique. Ce dernier, qui peut être obtenu sans restriction par des jeux violents, a été intégralement validé par Bruxelles.

Si les professionnels du jeu vidéo et les représentants du gouvernement ne parviennent pas à se mettre d'accord rapidement, les conséquences pour l'industrie du jeu vidéo dans l'hexagone pourraient être désastreuses. En effet, la Commission européenne doit valider une aide donnée à un secteur d'activité par un état membre. Et si Bruxelles donne son feu vert après le 31 décembre prochain, le crédit d'impôt ne pourra pas être appliqué de manière rétroactive. De nombreux studios, qui devront alors payer de leur poche, se retrouveront dans le rouge.

La situation financière de nombreuses structures étant critique, comme le prouve la fermeture de nombreux studios, la création française s'en trouverait certainement bouleversée et fortement affaiblie.