A l 'instar de Child of Light, avec lequel il a quelques points communs, dont le moteur, l'UbiArt Framework des derniers Rayman, et un développement en équipe assez restreinte, Soldats Inconnus nous avait bien tapé dans l'oeil lors des Digital Days d'Ubisoft, en septembre dernier. Sa présentation permettait d'entrevoir une direction artistique cartoon très accrocheuse et une atmosphère travaillée surfant sur des événements historiques. Mais impossible de le prendre en mains. Cette fois, c'est bon. Durant environ une heure, nous avons enfin pu découvrir comment s'articulait la progression.

Emile en images

C'est une histoire à plusieurs facettes qui est contée ici, soit par un chroniqueur à la voix de quelqu'un qui rêve d'un bon bain dans une bonne auberge, ou via des échanges épistolaires. L'allure cartoon du plus bel effet de ce titre se déroulant sur un plan 2D, les grommellements des personnages croisés, typés selon leur nationalité, sont terriblement efficients. Ils dédramatisent, prêtent à sourire parfois. Une légèreté presque Chaplinesque par moment, qui n'occulte pourtant pas la dramaturgie de certaines scènes ni le fait que l'on va guider des héros (et une héroïne) aux destins brisés. Nous avons pu lever le voile sur trois d'entre eux. Il y a d'abord Emile, enrôlé au début de la guerre et qui, croisant son gendre allemand, Karl, sur un camp où il était fait prisonnier, n'a plus guère pour objectif que de le ramener chez lui, à sa fille. Puis Freddie, un américain qui vivait paisiblement sur notre sol et qui, bien décidé à se venger d'un régiment en particulier, s'est porté volontaire. Enfin, Anna, une étudiante en médecine qui ne pouvait pas rester les bras croisés à Paris. Et j'allais oublier le toutou, pierre angulaire tant pour la trame que sur le plan du gameplay, pour lequel il apparaît comme un soutien fréquent.

Chacun sa route

Si je devais sortir deux références comme ça, à brûle-pourpoint, je dirais qu'on assiste à la rencontre d'Un Long Dimanche de Fiançailles, pour l'ambiance et le contexte, et de The Cave. Comme dans le jeu d'aventure de Ron Gilbert, vous allez vous retrouver sur des tableaux de parfois plusieurs écrans face à des puzzles nécessitant un bon coup d'oeil, l'usage de l'objet adéquat (un seul en main, pas d'inventaire) ou des facultés propres à chaque personnalité. Tous capables de donner un coup et de lancer précisément ce qu'ils tiennent, ils peuvent aussi creuser à l'aide d'une louche (Emile), couper des barbelés (Freddie) ou prodiguer des soins (Anna). Et donner des ordres au chien comme se positionner, actionner un mécanisme ou ramasser quelque chose qui pourra faire office de levier. Absolument pas compliqué à prendre en mains, Soldats Inconnus nous met, du moins durant ce premier quart de l'aventure, face à des énigmes mignonnettes. Des soldats français encerclent et agacent Freddie sur le quai de la gare ? Avec Emile, envoyez-leur la vapeur de la locomotive en pleine tronche après avoir soudoyé quelqu'un avec une bouteille de pif et distrait un autre grâce à un orchestre. Une scie qui a servi à amputer un blessé grave retrouvera son utilité première sur un arbre où s'est accroché une écharpe qui peut servir à maintenir un bras cassé... Lancer une brique pour détourner l'attention du casque à pointe qui stationné près d'une sulfateuse libérera l'accès vers une réserve entière de TNT... Pour quelqu'un rompu à l'exercice, cela paraîtra, du moins dans ces premiers instants, un peu léger. Y compris lors de puzzles plus complexes où l'on doit ajuster des tuyaux pour provoquer la surchauffe d'un engin de mort. Quand bien même on piétinerait, il est possible de faire appel à une aide grâce à une touche dédiée. L'idée n'est pas de bloquer ceux qui s'y essaieront. A regretter ou à applaudir, selon son ouverture d'esprit.

Devoir de mémoire

Pour varier les plaisirs et donner davantage de tempo, une petite composante action s'est immiscée. Vous verrez par exemple tout s'accélérer lorsque, porte-drapeau de votre régiment, il sera question de courir en évitant les obus ennemis aux ombres menaçantes ; aurez le loisir de tenter un mini-jeu de rythme avec Anna lors des séquences de soins... Mon coup de coeur reste pour l'instant la séquence en taxi parisien où, vu de face, vous devez esquiver d'autres véhicules... sur un air de French Cancan. Encore une fois : pas bien difficile. Mais plutôt réjouissant. Tout comme le fait que Soldats Inconnus aime à rappeler qu'il s'appuie sur des faits historiques. Des reliques seront à ramasser et vous laisseront accéder à des fiches de lecture abordant la Grande Guerre sous différents angles, de ses origines aux grandes batailles en passant par les forces en présence, avec quelques images d'archives. Pour ne pas oublier, surtout en cette année de commémorations d'hostilités débutées voilà un siècle.

ON L'ATTEND : BEAUCOUP

De ce que nous avons joué, on retiendra évidemment une patte artistique flamboyante, des (prémices d')histoires touchantes, joliment racontées et un gameplay accessible. Même si on se doute que la difficulté ira crescendo, on peut craindre que les amateurs de défis n'y trouvent pas leur compte. Mais il reste encore deux personnages que nous n'avons pas incarné et des heures de jeu à venir. Nous pouvons envisager que la suite saura se montrer aussi corsée que captivante. En tout cas, on a hâte que la version finale arrive. Pour rappel, Soldats Inconnus : Mémoires de la Grande Guerre arrive le 25 juin sur PC, Xbox 360, PS3, Xbox One et PS4, en téléchargement à 14,99 euros.