Ce qui m'a toujours frappé lors de mes pérégrinations dans l'archipel, c'est la facilité avec laquelle le Japon marchandise son histoire. Alors oui, nous nous avons bien des cuillères Louis XIV et des crayons Napoléon, mais au Japon, ça va encore plus loin. Les japonais n'hésitent pas à réutiliser l'image de ses personnages historiques sous une forme manga/animé, avec en point d'orgue le jeu qui nous occupe aujourd'hui.

A l'instar des autres Musô comme Dynasty Warriors ou le récent (et excellent) Orochi Warriors 3 Ultimate, Samurai Warriors 4 (SW4) est un jeu d'action reprenant comme personnages jouables les grandes figures du passé, en l'occurrence ici uniquement les généraux ayant guerroyé lors de l'ère Sengoku (période de conflits intérieurs s'étalant sur tout le XVe siècle). N'attendez cependant pas un jeu austère à la Kessen, car tous ces illustres personnages reçoivent pour l'occasion tout un tas de super-pouvoirs tape-à-l'oeil : déluge d'éclairs, océan de flammes et rayons lasers sont à prévoir alors que vous revisitez les grands tournants de l'histoire japonaise comme la bataille de Sekihagara ou la trahison de Mitsuhide Akechi.

Venons plus en détails dans le gameplay. Contrairement à WO3U où vous avancez avec un groupe de 3, SW4 vous donne un personnage principal + un allié qui va agir +/- à son gré. Souvent plus que moins, car en dépit des instructions qu'on peut lui donner (attaquer tel point, défendre), il a la fâchause manie de rester coincé exactement là où il ne faut pas. Cette IA très défectueuse est même un sacré boulet dans les niveaux de difficulté, car elle ne tient pas longtemps devant des généraux ennemis puissants.

C'est le seul point noir vraiment notable de ce SW4. Se ruer sur le champ de bataille à 1 contre 20 n'a jamais été aussi trépidant. Comme d'habitude dans la série, vous aurez à gérer le moral de votre camp en multipliant les faits d'armes. Vous pourrez également prendre certaines positions pour installer vos hommes et repousser la ligne de front. Dernier point dans la catégorie stratégie, il existe des zones d'influence ennemies (en rouge sur la carte) dans lesquelles la soldatesque est extrêmement coriace : il faut soit beaucoup de courage, soit bien identifier et éliminer l'unité ennemie qui motive les troupes.

Les combos sont à la fois simples et fouillés. Tous sont des arrangements des touches carrée, L1 et triangle : base carrée ou L1 pour les combos standards, base triangle pour les rush combos vous permettant de foncer au travers des lignes ennemies. Tous les personnages ont jusqu'à une quinzaine de combos qui leur sont propres (puisque chaque type d'arme est unique), et quel que soit celui-ci, les combinaisons de boutons sont les mêmes. Dans le même esprit et en plus de la traditionnelle forge vous permettant de booster vos armes, il est possible de transférer à tout moment les compétences d'une arme à un autre type d'arme. Ce tour de force en matière de jouabilité rend SW4 fun d'entrée et sans temps d'adaptation venant casser le rythme de l'aventure.

Vos personnages acquièrent de nouveaux combos et des points de stats au fur et à mesure des niveaux. Il y a donc comme dans WO3U un côté action/RPG à considérer sur l'échelle de la difficulté. En l'état, SW4 est sensiblement plus facile que WO3U : le mode hard est relativement jouable, mais le mode 地獄 (litt. «enfer») demande des persos surentraînés. Régulièrement pour ne pas dire très souvent, les parties vous proposeront des objectifs optionnels à l'intérieur des chapitres. Souvent en temps limité, ce derniers rajoutent un peu de sel aux combats et vous permettront de mesurer votre maîtrise du jeu.

Alors bien sûr, des tas de journalistes bien pensant vous dirons que tout ça, c'est répétitif et qu'il vaut mieux aller voir ailleurs. Cet argument fallacieux ne tient pas une seconde pour SW4. En premier lieu parce que vous avez 50 personnages jouables, et donc par extension plus de 700 combos uniques, auxquels il faut ajouter les finish moves et les 無双奥義 (les grosses attaques spéciales qui consomment la jauge de furie). En 42 heures de jeu, j'en ai vu au mieux la moitié. Sachez en outre que, contrairement à Hyrule Warriors, le titre peut se jouer en coop par internet sur la totalité du mode histoire et en skirmish, ce qui ne manque pas d'égayer les parties. J'ai fait une grande partie du mode histoire avec Ichikyo57 (l'éclair violet ci-dessus, il joue tellement vite qu'il est impossible à suivre), et la stabilité de la connexion s'est révélée impeccable.

Si tout cela n'était pas assez, SW4 vous donne en outre la possibilité de créer votre propre personnage avec tout un tas d'options, notamment en termes d'armes et de combos qui sont spécifiques au character making, jusqu'à l'insertion de l'icône de votre choix en JPG! J'ai pu ainsi recréer plusieurs personnages d'autres jeux/mangas/anime (ci-dessus Shirayuki de Aria the Scarlet Ammo), de manière aussi addictive que dans les derniers SoulCalibur par exemple.

Ce player avatar est utilisable dans le mode Vagrant, qui est en fait une série d'escarmouches sur tout le territoire japonais (sauf Hokkaido, pour une raison inconnue. Si j'étais de Sapporo, je serais grave vexé quand même!), entrecoupés par des events humoristiques avec les généraux du mode histoire.

Parce que la grande force de SW4, outre son gameplay génial, c'est la grande qualité de sa mise en scène. Tantôt burlesque, tantôt dramatique, la jeu de Omega-Force fait bien les deux. Le contexte historique est rendu avec une telle intensité et une telle précision qu'il marque autant qu'un musée ou qu'un bon film de samurai : les présentations géopolitiques font frémir et les cinématiques sont grandioses.

Finissons par l'aspect technique : ce SW4 PS4 étant une version upgradée de l'opus PS3 sorti au printemps dernier au Japon, ce n'est pas une claque générationnelle. Ceci dit, un grand soin a été apporté aux personnages principaux (au détriment des secondaires il est vrai) et aux divers effets (lumière, météo, éléments). Mais surtout, cette version PS4 affiche beaucoup plus d'ennemis, sans aucun ralentissement et les temps de chargements sont quasi-nuls. On a donc un jeu parfaitement optimisé, plus qu'agréable à l'oeil. La bande-son est de qualité, mais très en retrait par rapport à WO3U.

Je ne croyais pas que SW4 puisse surpasser WO3U, et pourtant il le fait. Jeu d'action génial doublé d'une fresque historique à faire frémir les amateurs de cette époque adulée, il est en ce qui me concerne l'une des meilleures surprises de l'année.

Mes captures d'écran #PS4share sont sur mon blog