Critique publiée originellement sur mon blog en août 2012.

J'ai cru abandonner ce jeu deux fois. La première c'était au chapitre 9. Je l'ai repris et je suis arrivé sur Pulse, où j'ai passé certains de mes meilleurs moments sur le jeu. Sur Gran Pulse, j'ai été tenté d'arrêter là le scénario pour m'adonner à la quête des stèles Cie'th. Un peu comme j'ai fait avec Just Cause 2 : fasciné par le défi de conquête de toutes les villes de la carte, j'en avais fait mon objectif, c'était devenu mon histoire, l'histoire que le jeu me racontait à moi ; je m'y suis tenu, j'ai conquiers les 365 infrastructures (villes, plate-formes pétrolières...) et je me suis arrêté de jouer. Je n'ai pas vu le fin mot du scénario (arrêté à peu près au milieu, ou avant le milieu) et ça ne m'a pas dérangé.

Pour Final Fantasy XIII ça aurait pu se passer d'une manière similaire. Arrivé sur Gran Pulse cette grande plaine très vivante (j'y reviendrai) et cette quête entraînante des stèles Cie'th m'ont happé. Il s'agit de stèles de gens qui n'ont pas accompli leur Tâche en tant que L'Cie et que les personnages principaux décident d'aider pour les libérer de leur prison éternelle et de leurs tourments (oui c'est pas tout à fait clair pour moi et c'est le cas de beaucoup d'autres choses dans l'univers de Final Fantasy XIII, j'y reviendrai).. Ce défi des stèles est optionnel mais c'est un challenge qui participe à la quête de puissance (on combat des monstres et on évolue) et qui n'est pas "cadré" : le joueur organise lui-même son aventure et ne peut pas faire n'importe quoi au risque de se retrouver confronté à des monstres trop forts pour lui. En terme de gameplay c'est plus intéressant que le simple "j'avance, je combats" de l'aventure et ça prend place dans ce qui constitue pour moi largement l'environnement du jeu le plus immersif et enivrant.

Ça ne s'est pourtant pas passé comme dans Just Cause 2 pour une raison toute simple : l'évolution des personnages est bloquée par l'avancée de l'intrigue (il faut battre certains boss pour débloquer de nouveaux stades d'évolution) et il me semble même que certaines stèles ne sont actives qu'après la fin du jeu (parce que oui on peut revenir sur Gran Pulse après le dernier combat, avec par ailleurs le dernier stade d'évolution fraîchement débloqué). Résultat, j'ai fini par quitter Gran Pulse et mettre fin à une aventure qui avait pourtant bien commencé - je fais référence aux stèles Cie'th.

Après ça s'est gâté. Tout s'est gâté à vrai dire. J'ai abandonné le jeu une deuxième fois au chapitre 12 pour le reprendre il y a une quinzaine de jours et aller au bout de l'histoire principale. Le problème à ce moment-là c'est que les combats cessèrent d'être intéressants, et ce jusqu'au générique de fin. J'avais une technique qui marchait à tous les coups, je l'appliquais à chaque combat et roulez jeunesse. Parce qu'il faut dire une chose : j'appréciais les combats jusqu'ici, du début du jeu jusqu'à Gran Pulse inclus. Ils ne s'étaient jamais montré vraiment triviaux, j'avais toujours dû être assez actif pour m'en sortir. A partir du chapitre 12 ça n'a plus été le cas et c'était plus qu'une affaire de patience, ma technique n'étant pas la plus rapide en général mais marchant à tous les coups. Du coup je me suis pas mal ennuyé en allant jusqu'à la fin du jeu.

Et une fois le boss battu et le générique défilé, je me suis retrouvé sur Gran Pulse. De nouvelles stèles sont apparues, ainsi que le dernier stade d'évolution de mes personnages. Mais je n'avais plus goût. Les combats étaient bien plus simples que quand j'avais laissé la plaine, et même si de plus grands et gros combats m'attendaient certainement, qui m'auraient demandé sans doute à nouveau la stratégie qui s'était dissipée lors des derniers chapitres, Gran Pulse avait perdu sa magie.

Gran Pulse, quand mon personnage l'a foulé du pied pour la première fois, c'était grandiose. Aller d'un bout à l'autre de la carte était long mais aussi dangereux, la plaine étant parcourue de long en large par des monstres de diverses espèces, et de gabarits très différents. On peut voir des dinosaures géants comme des espèces de loups ou encore des hiboux. Et ces animaux ont l'air de vivre, certains se déplacent en meute dirigée par un chef, d'autres se battent. La musique me faisait passer des images de plénitude et de nature sauvage. J'entendais le vent souffler et les cheveux et vêtements de Lightning bougeaient à son gré. Il y avait la perspective de chevaucher des chocobos qui m'attirait, parce que pour rallier chaque stèle et son monstre-objectif aux quatre coins de la carte, c'était difficile et ça demandait du temps.

Et puis, à la complétion d'une mission de stèle Cie'th, Lightning devint amie avec les chocobos. A partir de ce moment-là j'ai pu les monter pour me déplacer sur leur dos, à grande vitesse, en évitant les ennemis et avec l'habileté d'accéder à des endroits escarpés que le personnage seul ne pouvait pas atteindre. Certaines stèles, une fois leur Tâche accomplie, se changèrent en téléporteurs, permettant de rallier très vite les quatres coins de Gran Pulse. Et je crois qu'une fois tout cela accompli, Gran Pulse a perdu de sa majesté, de son attrait. Avec la possibilité de traverser la plaine en deux temps trois mouvements à dos de chocobos, invincible au combat, et pire de se déplacer en téléportation instantanée, c'est un peu comme si j'avais dominé Gran Pulse. Quelque part le but était atteint, il n'y avait plus rien à faire. Ce grand espace sauvage qui attendait d'être dompté, l'était dorénavant.

Pour toutes ces raisons, j'ai assez vite laissé tomber les stèles une fois le jeu terminé.

J'ai donc parlé des combats intéressants jusqu'à la dernière partie du jeu, de Gran Pulse qui était un environnement gigantesque, plein de vie, planant et surtout cohérent, j'aimerais maintenant parler de l'univers, qui lui est tout sauf cohérent. J'ai un vrai problème avec l'esthétique du jeu : pour moi ça ne ressemble à rien. Eden et Nautilus, des coins de Cocoon, je ne vois pas comment ça peut exister. J'ai l'impression d'assister à une vision d'artiste sous champignons hallucinogènes. Il y a des objets de formes bizarres dans tous les sens, qui flottent dans le ciel, dans l'air, et de toutes les couleurs.

De même, cet univers n'a aucune cohérence physique : c'est un mélange de magie et de technologie qui permet de faire exister toute sorte d'événements délirants, de telle sorte qu'on ne sait jamais à quoi s'attendre puisque tout peut arriver. Le peuple de Cocoon, c'est une seule personne : un être qui boit les paroles des gouvernants, qui ne les remet pas une seconde en question et qui éprouve de la peur et de la haine pour l'objet qu'on lui suggère. C'est pathétique, je n'ai pas pris une seconde l'histoire au sérieux. De même, parlons de l'architecture : dès qu'on se trouve dans un niveau "de combat", alias un donjon, on peut être sûr d'avoir droit à un labyrinthe abstrait et interminable, fait de morceaux copiés-collés et dont on atteindra la fin quand le level designer l'aura bien voulu. Dans ces moments de traversée de lieux n'ayant aucun sens (impossible de comprendre à quoi ils servent, comment ils se sont constitués, etc) l'impression de vivre une histoire faiblit dangereusement. C'est d'ailleurs ce qui m'avait fait arrêté Digital Devil Saga, un donjon tellement long et tellement bête (des couloirs vides et rectilignes) que je n'avais plus du tout le sentiment qu'on me raconte une histoire.

Les personnages sont tous, je dis bien tous, niais à pleurer. Lightning n'échappe à la règle, sous ses airs de rebelle. Fang et Vanille ont peut-être un lien intime, ça ne sera jamais dit dans ma partie. Des fois j'ai eu l'impression que c'est ça qu'on me suggérait, mais des fois j'avais plus l'impression de voir une mère et sa fille, d'ailleurs elles ne s'embrassent pas et ne font jamais l'amour. Le couple hétéro lui s'embrasse par contre.

Techniquement, le visuel est d'un très haut niveau mais en contrepartie les murs invisibles sont extrêmements grossiers. L'aspect couloir se ressent moins en jouant sans la mini-carte. Des villes avec des personnages avec qui parler auraient permis de donner du corps au peuple de Cocoon, dont on n'arrête pas de parler mais qui n'existe au final vraiment que dans la bouche des personnages principaux. Ça vaut aussi pour Cocoon elle ou lui-même : est-ce une planète dans le ciel ? Est-ce un plateau qui flotte dans l'espace ? Comme on ne fait que traverser un couloir tout le long du jeu impossible de s'en rendre compte. Ce n'est qu'en voyant depuis Gran Pulse la sphère de Cocoon dans le ciel que l'on a une idée de la forme géographique de ce "cocoon" qu'on a parcouru et dont on nous parle depuis le début du jeu. Voir Cocoon depuis Gran Pulse et se rendre compte de sa forme, c'est similaire à sortir d'une ville dans un vieux Final Fantasy, se retrouver sur la carte du monde et situer le volume de la ville, sa structure et sa position sur une planète que l'on peut parcourir et explorer. Final Fantasy XIII ne nous donne jamais une telle opportunité et faillit à faire exister son univers.

Mots de la fin

Mon ton me semble amer à moi-même, mais c'est un fait que j'ai été laissé sur la touche par ce jeu. Un univers qui n'a jamais pris ni vie ni cohérence, des personnages impossibles de niaiserie et une histoire qui sur de telles bases n'avait aucune chance de tenir la route. Une belle déception.

Appréciation : certaines choses ont fonctionné.

Observations diverses

- la caméra manuelle trop brusque casse la "majesté" des décors (le contraire de Shenmue II)

- le jeu peut ne pas suffire pour comprendre l'histoire (ni les cinématiques), il faut alors passer par l'encyclopédie du menu

- dans une cinématiques les personnages s'embêtent à escalader un mètre alors qu'en jeu ils font des bonds de dix mètres de haut

- on nous parle de la menace d'une panique dans la population mais on ne voit jamais cette population ; elle pourrait très bien ne pas exister

- les coffres qui flottent dans un coin dénotent avec le contexte très scénarisé

- jouer sans la mini-map permet de sentir un peu d'exploration

- "cette fois, cependant, ils ne fuient pas pour échapper à la réalité mais bien pour survivre" (extrait d'un résumé de l'écran de chargement)

- interface, menus très très classes

- on ne peut pas tourner la caméra pendant une interaction (saut, ouverture de coffre) et surtout même pendant un moment après, j'ai trouvé ça pénible

- même chose pour le changement d'épaule permanent de la caméra quand on est à dos de chocobo