On
connaît l'amour de Tim Schafer pour les univers marginaux et décalés.
Ce n'est pas un Grim Fandango ou un Psychonauts qui me contredira. Mais
il y a une autre chose qui lui tient vraiment à cœur : le heavy-métal.
Un genre musical empreint de mythologie, de batailles héroïques et de
look douteux. Un thème parfait pour un jeu en somme ! Après une promo
menée tambours battants par le déjanté Jack Black, il est temps de voir
si ce Brütal Legend est réellement le meilleur jeu jamais créé.

Au
delà de toute prétention de la part de Double Fine en ce qui concerne
la qualité de leur bébé, c'est surtout la volonté de se faire plaisir
et de faire plaisir, qui transparaît. C'est quelque chose d'assez rare
dans l'industrie vidéoludique pour être souligné. Cette totale liberté
de thème et de ton apparaît dès le début et continuera jusqu'à la fin.
Héros fumeur, arbre à binouzes et insultes ont ici leurs places pour
notre plus grand bonheur ! Quel plaisir d'entendre notre métalleux
lancer après avoir perdu une course : « Mais quel fils de pute ! ». De
même dans l'introduction, on vous donnera la possibilité, non sans
humour, de biper les vilains mots ou de censurer (avec un carton
"censured" !) les scènes gores. Original.

Tout comme le scénario surréaliste mais maîtrisé de bout en bout, avec révélations, amour, amitié...et bastons façon Seigneur des Anneaux.Vous incarnez Eddy Riggs, un roadie (pas un radis), un vrai, un dur,
condamné à subir les dérives du métal moderne. Heureusement, il va se
retrouver projeté, grâce à sa broche de ceinture, dans le monde du
métal, celui qui ne fait aucuns cadeaux à vos oreilles. Le soucis,
c'est que celui-ci est en guerre. Donc les pogos ce sera pour plus
tard. Pour l'heure, il est plutôt question de monter une armée pour
bouter le gros méchant Doviculus hors du royaume de tonton Lars. Car
dans votre quête « free-métal » vous croiserez la route d'une tripoté
de bonhommes tout de cuir vêtu et à la personnalité...étrange. Un
technicien un peu con, des gros bras lobotomisés, des headbangers
parodiant le fan de métal moyen, une famille de chauve- souris, ou un
mec volant avec ses cheveux ( ?!), vous n'allez pas être déçu du voyage.

Un
voyage au multiples excursions. C'est là la grande force du titre : le
fait de mêler plusieurs gameplay pour ne pas lasser et proposer quelque
chose d'originale. Le résultat est réussi, même si le syndrome
Assassin's Creed pointe le bout de sa lame. En effet, les missions
secondaires ne sont pas vraiment variée (5 types) et même l'histoire
principale nous met face à des objectifs déjà vus mille fois, dans un
GTA par exemple. Protection, destruction, voyages sur la map,
l'influence de la série de Rockstar est palpable. C'est quelque chose
de récurrent dans les productions récentes de Schafer: ces influences
aux maîtres tels que Zelda. Les bases sont donc rarement originales
mais la façon de les exploiter, elle, le sont. Le principe des solos,
par exemple, fait obligatoirement penser à l'Ocarina dans Ocarina of
Time. Ceux -ci se jouent à la manière d'un Guitar Hero et vous permette
d'interagir avec l'environnement ou de déclencher un « pouvoir »
destructeur. Cela servira par exemple à déterrer des reliques (nouveaux
morceaux, artworks) ou à accéder au garage métal tenu par Ozzy Osbourne
et permettant de personnaliser votre monstre de la route, votre guitare
ou votre hache.

On
en vient donc à parler de ces trois objets qui en plus d'être utiles,
vous donnent une certaine classe. La Destroymobile, comme l'appelle
Eddy, vous permet de parcourir la carte, grande de son état, de heurter
des trucs ou d'en dégommer d'autres. La guitare, elle, fait plus que de
la musique, elle électrise les foules et les fait « jumper » avec
violence (léger euphémisme). Enfin la hache ne fait pas des gaufres,
comme on pourrait le penser, mais découpe des membres avec finesse.
Mais tout ça c'est de la rigolade car les bastons prennent une autre
échelle avec la partie stratégique de Brütal Legend. Car oui, aussi
surprenant que cela puisse être, vous passerez le quart de l'aventure
(et le mode multi) dans la peau d'un chef des armée ! Grâce à une
pirouette scénaristique qui vous permettra de survoler l'action, vous
dirigerez vos troupes, préalablement recrutées dans les missions du
scénario. Et il faut bien l'avouer, les débuts sont un peu brouillon
car il faut apprendre à utiliser les différentes capacités des diverses
classes et assimiler les commandes permettant de cibler, attaquer ou
encore sélectionner une unité précise. Pour l'emporter, vous devez
protéger votre scène (base) et construire des stand de goodies (tours)
qui vous rapportent des fans (ressources). Ces fans vous servent à
acheter vos unités et améliorer votre scène pour en avoir de plus
puissantes. Le but ultime étant de prendre les fans des autres et
finalement détruire leurs scènes. Mais ce qui fait tout le sel de cette
partie stratégique, c'est qu'elle s'avère assez riche pour ne pas
lasser et qu'elle évite la redondance du gros morceau du jeu :
l'exploration. Le cocktail est donc quasi-parfait et la patte
artistique apporte une âme au jeu.

Il
ne faut pas chercher du côté des graphismes pour vous prendre la claque
attendue mais plutôt du côté des voix, des animations, des décors et de
la cohérence de l'univers créé à partir des codes inhérents au monde du
bruit. Le casting vocal, en VO, inclus la participation de Jack Black
évidemment, mais aussi de toute les stars du milieu. La VF est, elle
aussi, de qualité avec le doubleur officiel de Jack Black (ou Cartman
de South Park aussi) pour Eddy. En ce qui concerne l'univers, c'est
énorme ! Montagnes d'enceintes, buissons de cymbales, volcans, statues
gigantesques, araignées tisseuse de cordes de basses, ruines, c'est
sacrément destroy et l'on est constamment surprit par cet univers
parallèle où tout ce qui touche au métal est présent puissance dix.
Tout transpire la musique et l'on sus sang et bière pour survivre aux
précipice mortels (et agaçants) et à la faune du coin, que l'on peux
chevaucher cela dit en passant.

Brütal
Legend est donc une sorte d'hymne à ce genre musical peu compris et
seulement apprécié par les connaisseurs. On en ressort presque
converti! Grâce, non seulement, à la tracklist monstrueuse (plus de 100
morceaux) brassant une grande partie de la culture métal (Motörhead,
Black Sabbath, Judas Priest...) mais aussi au soin qu'a apporté l'équipe
de développement à la représentation de cette mythologie. C'est tout
ces éléments qui permettent de faire oublier les quelques défauts du
titre comme une durée de vie riquiqui (10 heures pour le terminer 90%)
ou une progression dans l'ensemble assez convenue. Une fois de plus,
comme dans Psychonauts, l'originalité ne se trouve pas dans les
mécanismes de jeu mais dans les dialogues, l'humour et le background
exceptionnel. Et puis comme dit Ozzy : " lâche toi putain ! "