Un dimanche pluvieux.  Pas envie de sortir. Heavy Rain
tout juste acheté traîne sur l'étagère. Coïncidence météorologique amusante. Je
lance le jeu comme n'importe quel autre soft dans le but de me divertir. C'était
sans savoir ce qui m'attendait.

J'avoue avoir eu peur. Peur d'un prologue qui a bien
faillit me faire abandonner. Plongé au cœur d'un « american dream »,
on est invité à faire des choses pas vraiment intéressantes : dresser  la table, se faire un café, prendre une
douche, etc. Problème : jouer la banalité ne la rend pas plus amusante
pour autant. Pourtant on s'accroche jusqu'à l'événement qui va mettre en marche
tous les rouages d'une aventure ne laissant pas indemne.

Oscillant entre références cinématographiques plus ou mois évidentes, Heavy Rain brouille les pistes. Ni totalement jeu vidéo, ni totalement long métrage, cette œuvre polymorphe est au carrefour de plusieurs influences.

Il est amusant de voir que les codes du jeux vidéos sont ici pris à contre-sens. Alors qu'habituellement l'avatar incarné monte au puissance, acquière de nouvelles aptitudes, gagne de l'argent, ici, le personnage principal plonge dans l'enfer. Vivant reclus, puis fugitif, encaissant les coups, on le voit sombrer aussi bien physiquement que psychologiquement.

Du cinéma Heavy Rain garde le goût de la mise en scène, et surtout le jeu d'acteur. Certes d'autres jeux avant ont ouvert la voie (Uncharted, plus loin Final Fantasy X  et même Metal Gear Solid 3), mais le traitement réaliste d'Heavy Rain est sans précédent.  L'empathie pour les personnages virtuels est bien réel et la quête des 4 personnages principaux ainsi que tous leurs sentiments sont intimement partagés par le joueur.

L'intrigue, impressionnante de maîtrise quel que soit l'arc narratif choisit (ou subit si l'on échoue lors de certaines épreuves clés), avance au grès des investigations des 4 personnages principaux . Constamment relancée, elle s'enrichit au fur et à mesure des avancées de l'aventure. Les vies de chaque protagoniste, que tout sépare, sont amenées à se croiser, de manière explicite ou non, encore une fois en fonction de nos actions.

Pionnier à sa manière, cassant des codes, établissant de nouvelles règles, Heavy Rain, est une créature hybride. Mais que l'on ne s'y trompe pas. Une fois lancé dans l'aventure, on ne lâche plus le pad. Et
surtout, surtout, on éprouve des émotions qu'on ne pensait pas ressentir dans
un jeu. Nous ne sommes  plus  joueurs d'ailleurs, ni spectateurs. Juste des
êtres humains éprouvant de l'empathie pour des personnes se battant cœurs et
âmes pour sauver un enfant d'une mort certaine.

Merci à David Cage d'avoir porté cette œuvre, merci à Sony d'avoir cru en ce projet. Nul doute qu'il y aura un avant et un après Heavy Rain.