Cela fait des années maintenant que le Japon est considéré en occident comme "souffrant" en matière de production de jeux. Difficultés du passage à l'ère HD, explosion en qualité des productions occidentales qui ont raffiné leurs méthodes de production, démocratisation des middlewares... Autrefois largement dominant, le Japon aura indubitablement connu une période de remise en cause sur cette génération de machines. Et si tout cela était sur le point de prendre fin et de céder sa place à un retour en force ?

Une force de travail impressionnante

Comme souvent, certaines déclarations sont peut-être allées trop loin. Des choses du genre "le jeu japonais est mort". Même des créateurs japonais se sont récemment rendus célèbres à coup de phrases choc, comme Keiji Inafune, le père de Mega Man, qui disait "en regardant les jeux présentés au Tokyo Game Show, je trouve que tout le monde fait des jeux affreux. Le Japon a au moins 5 ans de retard". Pour contre-balancer ces déclarations, revenons un instant sur ce qu'en dit Gaving Moore, du Sony Japan Studio, actuellement à l'oeuvre sur Puppeteer et expatrié britannique qui oeuvre au Japon depuis plus de 10 ans :

Quand les gens me disent "l'industrie du jeu vidéo japonais est morte"... Moi je crois que l'industrie du jeu vidéo japonais ne veut simplement pas faire les choses de la manière dont vous voulez qu'elles soient faites.

Pourtant, même si Gavin a sans doute raison jusqu'à un certain point, beaucoup de créateurs japonais ont surpassé les différences culturelles présentes dans les pipelines de production, les méthodes, les équipes, et construit des ponts au sein de leurs studios entre occident et Japon. Et par extension, ils ont aussi construit des ponts entre les audiences nippones et occidentales. C'est très clairement la volonté qu'exprimait il y a longtemps déjà Hideo Kojima (à l'époque de MGS4) avec son allégorie de l'Entreprise de Star Trek, réunissant en son équipage des talents d'origines totalement différentes pour en tirer le meilleur. Après ce week-end, et la démo de Metal Gear Solid Ground Zeroes, comment ne pas considérer le chemin parcouru ? Certes, Kojima Productions n'a jamais été vraiment à la traîne techniquement... mais ils paraissent désormais carrément en avance.

Mais au-delà de l'excellence technique, d'autres signes semblent soutenir la thèse d'un retour en force. Par exemple, avait lieu également ce week-end la célébration des 25 ans de Final Fantasy, pendant laquelle les équipes de Square Enix ont dévoilé Lightning Returns : Final Fantasy XIII. Faisons les comptes : 2010, FFXIII. 2011, FFXIII-2. 2013, Lightning Returns FFXIII. Alors on pourra certes critiquer ces titres (enfin surtout les deux premiers, on attendra pour le troisième), mais force est de constater que même sans ajouter FFXIV et sa toute récente révision, l'énergie déployée par les équipes japonaises de cette série mythique reste phénoménale. Ca s'est d'ailleurs senti pendant l'événement, avec un Kitase considérablement amaigri et les reste de l'équipe apparemment fatiguée... ça doit bosser sévère pour pondre de tels jeux à un rythme aussi soutenu. Que dire enfin du Luminous Studio, le nouveau moteur de Square ? De la préparation, en silence, de la next-gen ? On a clairement la sensation que les équipes japonaises (certaines du moins) ont su s'internationaliser, et embrasser le traitement multi-support et les méthodes de production occidentales, tout en conservant une certaine vision nippone du développement dans le soin apporté aux détails ou les directions artistiques typiquement japonaises. Tout cela, est-il besoin de le rappeler, après une catastrophe de Fukushima sans précédent en mars 2011, qui continue malheureusement de faire souffrir tragiquement le Japon.

Nippon Gen ?

Bref, les signes encourageants existent. D'autant qu'en prenant en compte les architectures similaires que semblent parties pour adopter les prochaines consoles, chez Sony comme chez Microsoft, et le raffinement continu des outils de développement, toujours plus proches de l'homme et plus loin de la machine, la technologie et ses défis semblent plus que jamais en passe d'être plus facilement maîtrisés par les développeurs, japonais comme occidentaux. Il y a aussi une forme de fierté, ou d'honneur japonais qui pousse ces créateurs à faire mentir ces états des lieux pessimistes, et à montrer que le Japon est bien loin d'être "mort" en matière de jeux vidéo (comme du reste).

Alors certes, il y a toujours des errances, comme celles de The Last Guardian ou de Final Fantasy Versus XIII. Ce dernier ne sera d'ailleurs vraisemblablement pas au TGS cette année. Mais une chose est sûre : l'occident aussi a ses errances. Et surtout, on sera à Tokyo avec un oeil ouvert, l'esprit alerte et le coeur plein d'espoir d'y découvrir de nouveaux signes, de nouveaux jeux laissant imaginer qu'en cette fin de génération et avec l'arrivée imminente de la prochaine, le Japon n'a pas dit son dernier mot. Les prochaines consoles seront peut-être celles de ce retour en force qu'on ne peut qu'embrasser avec enthousiasme !