Un coche à ne pas rater

Seize joueurs de classe internationale étaient présents dès le Vendredi pour en découdre dans les dernières phases des WCS 2015 Saison 1, le tournoi officiel de Blizzard organisé par l'ESL. En 2014, la majorité d'entre eux auraient été coréens, mais pour la cinquième année d'existence du jeu, Blizzard a changé quelque peu les règles, fermant la porte à la plus grande partie des robots venus du pays du matin calme. Ainsi, seuls trois Coréens réunissant les conditions requises étaient présents, et la France a aussi pu se targuer de son représentant avec le joueur zerg de l'équipe Punchline, FireCake. Ce dernier a d'ailleurs remporté la Gamers Assembly le lundi matin, empochant ainsi 3.000€ qui s'additionnent à ses gains en WCS. Ne nous y trompons pas cependant : si la nation qui domine le RTS depuis les premiers jours n'était représentée que par trois éléments, ces trois derniers étaient tous largement favoris pour la victoire.


Le français FireCake aux prises avec MaNa

Deux phases du tournoi devaient se jouer pendant ces trois jours. Les seize joueurs présents commençaient par s'entre-tuer les Vendredi et Samedi dans une phase de groupes pour qu'il ne reste plus que la moitié d'entre eux. Réduits à huit, les protagonistes restants pouvaient alors aborder la deuxième phase, un arbre à simple élimination joué le dimanche d'une traite. Ce programme ultra-chargé et très condensé avait provoqué quelques réactions au sein de la communauté : comment peut-on espérer le succès du plus important circuit de StarCraft II quand la moitié du tournoi donne l'impression d'être « expédiée » en si peu de temps ? Autre détraction de taille, pourquoi l'ESL et Blizzard ont-il attendu qu'il ne reste plus qu'un mois avant l'événement pour en révéler la date et le lieu ? Ces deux éléments majeurs, accompagnés d'autres plaintes, ont créé un élan de scepticisme quant au succès de ces finales WCS chez les fans. Pourtant, au terme de ce week-end, toutes les craintes ont disparu, laissant place à la satisfaction d'avoir été spectateur d'un tournoi franchement réussi.

Une production de grande qualité

L'ESL et Blizzard ont réellement gâté le public pour ces WCS. Non contents de venir avec toute leur équipe technique et leurs casters pour proposer le meilleur de ce qui se fait en terme de StarCraft II, David Kim lui-même s'est déplacé pour se livrer au jeu des interviews et dévoiler des exclusivités sur Legacy of the Void. La nouvelle unité terran actuellement réfléchie serait ainsi une unité air-air pouvant se mettre en mode siège pour attaquer au sol en sacrifiant sa capacité à se déplacer : une sorte de tank volant donc. Malheureusement, aucune clef bêta LotV n'a été distribuée au public, et ce n'est pas faute d'avoir réclamé.


Kaelaris présent cinq heures avant le début du stream pour se préparer

La localisation à Poitiers était un défi de taille pour les organisateurs. Les gradins ont parfois eu du mal à se remplir les deux premiers jours, mais les places vides étaient compensées par une ambiance toujours très chaude, jusqu'à une dernière journée de compétition explosive. Seule déception : les commentateurs, à la fois français et anglais, étaient absents de la scène puisqu'ils commentaient depuis le backstage. Si on pouvait ainsi entendre les voix d'O'Gaming TV et croiser dans les gradins les membres de la webTV française quand ils n'étaient pas occupés au micro, il était impossible de les voir à l'oeuvre.

Il est tout autant impossible de ne pas évoquer O'Gaming TV quand on parle de la réussite des WCS. Qu'on aime ou qu'on aime pas les commentaires, Pomf, Anoss, Thud, Funka, Imre et MoMaN n'ont pas leurs pareils pour animer un stream. La ferveur du public n'est pas tant liée à la qualité de jeu des compétiteurs présents qu'à la véritable euphorie provoquée par les blagues de Pomf, les « COMMENT ?! » d'Anoss ou autres phrases devenues cultes. Première webTV au monde, le projet créé par Pomf&Thud n'est pas étranger au fait que StarCraft II perdure aussi bien en France. Là où la tendance globale de popularité du jeu est à la baisse, les scores ne cessent de croître dans l'Hexagone. Au final, c'est un total d'environ 60.000 viewers qui ont regardé la finale sur le stream officiel, pendant que la TV française d'O'Gaming a largement dépassé les 8.000. Si le score total peut sembler désuet pour les joueurs de League of Legends ou Counter Strike, il est excellent étant donné la conjoncture actuelle de StarCraft II, et cette réussite de la retransmission française est historique : aucune autre webTV nationale ne parvient à réaliser de telles audiences, pas même TaKeTV. La DreamHack s'est ainsi intéressée à notre terre locale, et il ne manque plus qu'une édition des IEM pour que l'année 2015 soit une année gauloise historique. A quand Iron Squid III ?

Le plus haut niveau mondial

Mais quid de StarCraft II en lui-même ? Les premières phases du tournoi avaient logiquement déçu les fans en terme de niveau : sans la plupart des Coréens qui tiraient la moyenne vers le haut, de nombreuses parties du Ro32 se sont révélées inintéressantes. Fort heureusement, il n'en a rien été au cours de ces trois jours de Gamers Assembly. Des rencontres historiques ont été livrées, dont un match épique entre MaNa et FireCake, les deux joueurs qui avaient battu le record de la partie la plus longue en compétition lors des WCS en 2013. La victoire du français dans ce duel vit le nom de ce dernier scandé pendant plusieurs minutes, pendant que le joueur Punchline profitait ravi et presque étonné de cette standing ovation du public. S'il ne sortira malheureusement pas des phases de groupes suite à sa deuxième défaite contre Polt dans le match suivant, FireCake s'est définitivement imposé comme le meilleur joueur français du moment ce week-end. Comment lui en vouloir de perdre deux fois contre celui qui se sacrera grand champion ?


Polt, le plus américain des Coréens

Une finale absolument monstrueuse est venue clore ces WCS en beauté. Bien entendu, sur les trois Coréens présents au départ, deux d'entre eux se sont retrouvés engagés dans l'ultime face à face. Polt et Hydra se sont affrontés dans le plus noble des match-ups, le TvZ, se livrant un Bo7 littéralement incroyable. Alors que le joueur zerg de l'équipe canadienne ROOT Gaming menait 3-1, Polt, aussi appelé « Captain America », n'a pas flanché et a remonté partie par partie le score sans commettre la moindre erreur. Revenu à 3-3, il s'est débarrassé du doute d'un revers de la main et a fait ce qu'il fallait pour être en mesure de se saisir du trophée : une victoire émouvante plébiscitée par le public, béat devant cette démonstration de talent et de classe, et triste que ces trois jours magiques arrivent à leur terme. 3-2, 3-2, 4-3, tel fut le parcours de Polt en phases finales. Le terran a ainsi démontré un véritable mental de champion pour remporter trois fois consécutives son duel de la plus petite des marges sans trembler. Hydra, finaliste malheureux qui avait 3-0 ses deux précédents adversaires, n'a pas eu ce sang-froid.

Attendues au tournant, ces finales WCS n'ont pratiquement déçu en aucun point. Il faudra attendre d'avoir un peu plus de recul pour juger, mais il semble que Blizzard et l'ESL ont en plus appris de leurs erreurs : les dates et l'emplacement des prochaines finales ont déjà été annoncés. Rendez-vous à Toronto du 26 au 28 juin.