Salut les gamers, et plus particulièrement ceux d'entre vous qui aiment l'art de la trajectoire, l'odeur de la gomme brûlée et les zoulies carrosseries.

 

Aujourd'hui, parlons des simus autos, ce sous-genre prestigieux et objet de toutes les passions, du jeu de course. Ah, il en circule un paquet, de vérités assénées sur les forums, de connaisseurs ne jurant que par le volant mais ignorant ce qu'est un différentiel à glissement limité, ou d'apprentis Fangio n'ayant jamais approché une vraie voiture.

 

Alors, commençons par la base. Les simulations, ce sont les titres qui aspirent à faire vivre l'expérience de pilotage -ou de course, car c'est une nuance- au plus près de la réalité. Aucune à ce jour ne parvient encore à parfaitement remplir ce contrat, mais c'est une évolution très progressive qui fait qu'aujourd'hui, un GT6 n'a plus rien du tout à voir avec son premier opus, par exemple.

Une simu se doit en tout premier lieu de respecter les principes physiques de base d'une auto: cabrage à l'accélération, roulis en virage, plongée au freinage, et donc d'avoir une gestion du transfert de masses. C'est l'absolu minimum.

Il faut en outre qu'elle  dispose d'un moteur physique capable de simuler les différences de poids, de puissance, d'adhérence, afin que chaque modèle soit différent selon ses caractéristiques. 

Enfin, il faut dans le meilleur des cas que les modèles aient été essayés in vivo, afin que leurs spécificités (au-delà de la stricte fiche technique) se ressentent également.

 

Vous l'aurez compris, il y a déjà là matière à occuper un studio un sacré bout de temps, surtout s'il doit reproduire des circuits existants avec tous les détails (dénivelés, raccords, changements de surface...), et ajouter en sus une gestion des réglages plus ou moins complexe.

A ce stade, on peut estimer qu'un jeu répondant à tous ces critères serait déjà une simulation très acceptable. Cependant, la réalité est encore beaucoup plus complexe ; et cette complexité ne touche plus seulement aux aspects vidéoludiques, mais bien à la retranscription de la mécanique dans son immense variété.

 

Depuis que Turn 10 et Polyphony se livrent une concurrence farouche sur consoles, les joueurs ont pu constater que les deux licences traitaient de manière extrêmement différentes le ressenti des voitures. En d'autres termes, à modèle, aides à la conduite et circuit égaux (et même à temps au tour équivalent), le ressenti n'a tout bonnement rien à voir. C'est de moins en moins vrai à mesure que chaque série se rapproche du Graal physique ultime, ce qui est bien normal, mais c'est tout de même relativement étonnant au premier abord. L'avantage, c'est que cela permet aussi au chanceux qui aurait les deux consoles, de se régaler alternativement.

En fait, Forza est né sur un moteur physique prenant en priorité en compte la gestion de la température, déformation et donc variation d'adhérence des pneus. Un choix stupidement moqué par une certaine partie de la presse vidéoludique en son temps, alors qu'il tombe sous le sens: les pneus sont les seuls éléments qui relient la machine et le sol, et c'est un facteur déterminant au plus haut point en sport automobile. Par surcroît, c'est ce qui permit à la licence de surpasser dans le domaine toute la concurrence... GTR compris. 

En revanche, sa gestion des transferts de masse et la précision de sa conduite étaient en retrait de Gran Turismo, qui en était déjà à son 4ème épisode. Peu importe: Microsoft avait sa simu, qui proposait un feeling pour tout dire assez inédit, et surtout un potentiel faramineux que ses géniteurs ne manquèrent pas d'exploiter.

Si bien que quatre épisodes plus tard, la licence est unanimement saluée et son moteur physique au top absolu du moment, toutes plate-formes confondues. Assetto Corsa ne fait pas mieux (mais c'est déjà superbe pour un "petit" studio), tandis que Polyphony a décidé depuis GT6, d'enfin se pencher sur... La déformation des pneus! Avec succès, d'ailleurs.

 

Tout cela pour dire que tout au long de leurs évolutions, ces célèbres séries ont offert aux joueurs des sensations et un feedback totalement différents. Mais, et c'est là qu'à mon sens la chose est très intéressante, chaque licence a choisi d'accentuer tel ou tel trait pour se rapprocher du sacro-saint réalisme.

Pour GT, il s'agissait de marquer le passage à la génération PS3 et d'implémenter nouvelles disciplines, gestion climatique et cycle jour-nuit, autant d'arguments solides et incontestables, ; cependant pas décisifs à eux seuls: à côté de cela la physique manquait encore de rigueur dans la gestion du grip, et beaucoup d'autos manifestement jamais essayées par l'équipe de dèv, se retrouvaient avec des comportements complètement fantaisistes. Je ne parlerai pas ici des soucis de finition divers, hors de propos.

En face, Forza présentait son troisième (et bientôt son quatrième) épisode, lequel proposait une physique toujours plus aiguisée et surtout, énormissime atout de la série, un comportement de chaque modèle hyper typé. C'est simple: le moindre changement de set-up châssis entre deux autos proches (par exemple deux GTi) se retrouvait directement dans le jeu. Tendance au sur ou sous-virage, neutralité en courbe, stabilité au freinage, sensibilité aux changements de cap, efficacité du train moteur, courbe de couple et de puissance...

Je ne parle pas de choses aussi basiques que de ressentir la différence entre traction, propulsion et 4x4, qui constitue une base absolue. Non, TOUT était fidèle non seulement à la fiche technique des modèles, mais avant tout au ressenti des essayeurs de tous bords (pilotes, presse auto...). Un de mes grands plaisirs constituait même à lire quelques essais presse d'un modèle, puis l'essayer dans le jeu si possible sur la même piste, et comparer mon ressenti. Et là, constater que les suspensions avaient réagi comme en vrai, que le moteur avait donné des sensations proches, que la boîte avait été aussi rapide, que le différentiel auto-bloquant avait donné la même sensation de motricité... Bluffant, et définitivement indispensable pour tout futur jeu entendant rivaliser avec ce poids-lourd. 

 

C'est pourquoi aujourd'hui, une simu qui ne proposerait "que" des réactions plausibles et une gestion physique convaincante, ne pourrait en aucun cas se prétendre au niveau. A chacun ses priorités bien sûr, mais il me semble inconcevable en tant qu'amoureux de belle mécanique, de devoir rouler avec des voitures dont les uniques différences se situeraient dans les chiffres. 

Ce que GT6, Forza 4/5 ou d'autres titres arcade mais disposant d'un véritable moteur physique, comme PGR ou Drive Club proposent aujourd'hui, après des années de mise au point, ce sont des expériences sensitives, organiques, permettant de simuler non pas seulement les strictes performances des bolides, mais bien leur personnalité au volant. Ce qui rend de facto utile la présence d'une immense variété de modèles, au-delà de l'aspect collection. Si Gran Turismo a encore beaucoup à faire dans ce sens, le reste de ses acquis est convaincant et permet d'envisager l'avenir assez sereinement. Pour Forza, la gestion climatique et temporale en temps réel constitue indéniablement l'axe d'amélioration indispensable pour magnifier ses qualités. Quant à Project Cars, il semble avoir une longueur d'avance dans sa capacité à immerger le joueur, grâce à une vue cocpkit extraordinaire. Sera-t-il à la hauteur pour le reste? 

 

Quoiqu'il en soit, la simu ce n'est pas juste la gestion complète d'une course avec son règlement comme le PC s'en est fait une spécialité (bien que je comprenne tout à fait qu'on puisse rechercher cela en priorité), c'est aussi proposer la meilleure expérience de pilotage possible. Et en cela  comme en toute chose, le diable est dans le détail.