Continuant sur ma lancée GTA vs Red Dead Redemption, je m'essaye à un article un poil plus court, sur un thème plus précis. Au menu, les combats. C'est surtout une excuse pour parler de l'impact des mécaniques des TPS dans leur ensemble. C'est loin d'être un chef d'œuvre de littérature ou d'intérêt, c'est parfois assez trivial, mais je l'ai écrit, et tout n'est pas à jeter, donc je le soumets à votre regard (pas si :p) critique. Ça me permettra de me consacrer à autre chose.

Lors de sa sortie en avril 2008, GTA IV a enfin réussi à s'attirer les bonnes grâces de la critique pour son système de combat. Après plusieurs épisodes aux améliorations constantes mais loin d'être complètement convaincantes, Rockstar se met à la page en reprenant les bonnes idées de la concurrence. Une évolution qui s'est aussi poursuivie avec Red Dead Redemption.

Vue épaule
Notablement introduite par Resident Evil 4, rares sont les jeux à s'en passer désormais. Ses apports sont en effet nombreux. En écartant le corps du personnage du champ de vision du joueur, en zoomant légèrement sur l'action, elle permet un plus grand contrôle des tirs, de leur dispersion, au plus près de l'expérience que proposent les FPS. La mise en scène en bénéficie aussi, le recul de l'AK 47 et son impact sur l'épaule de Niko, les munitions qui s'éjectent du fusil au premier plan, sont plus impressionnants ainsi. 

Système de couverture
Popularisé par Gears of War, il est lui aussi devenu la norme des 3rd person shooter, et est d'ailleurs en train de se répandre aux FPS (Killzone 2, Deus Ex : Human Revolution). Ce système ajoute à la crédibilité des phases de jeu, avec des personnages qui se cachent sous le feu ennemi au lieu de rester à découvert. 
Le premier impact sur l'expérience du joueur est que le rythme des combats s'en trouve altéré. Le jeu est plus lent, plus posé, et se découpe en deux phases. Une phase d'attente, caché derrière sa couverture, à l'abri des tirs ennemis ou en train de recharger, qui sert à préparer la seconde phase, d'assaut, dès que la cible se découvre. Ceci permet donc de s'éloigner d'un gameplay reposant principalement sur la dextérité et les réflexes pour s'orienter vers un gameplay reposant plus sur la préparation et l'observation.
L'implémentation de ce système est légèrement différente entre les deux jeux, avec une système beaucoup plus souple et accessible dans Red Dead Redemption. On peut en effet se mettre en couverture de beaucoup plus loin, grâce à une très esthétique glissade. Les déplacements et changements de direction en couverture sont aussi plus rapides, le jeu en couverture est donc tout aussi maniable que le reste du jeu. Les avantages l'emportant clairement sur les inconvénients, le système est donc bien plus utilisé dans Red Dead, alors qu'il était dans mon expérience assez rapidement délaissé.
Il oblige aussi en théorie le joueur à mieux tirer parti de son environnement. Idéalement, cela doit le pousser à mieux observer son environnement, et choisir la meilleure couverture, faire preuve d'initiative, de créativité. GTA, avec son environnement urbain crédible, s'en sort plutôt bien, les couvertures sont naturelles et doivent être activement recherchées par le joueur. A l'opposé, les développeurs de RDR, confiants de leur implémentation améliorée, jettent à la face des joueurs des couvertures à chaque occasion. Leur intégration est bien moins naturelle, et le confort d'avoir à notre disposition un système plus fonctionnel et accessible se substitue à la crédibilité du monde et notre immersion.
Le besoin d'observation et de préparation est néanmoins réduit par le "confort" de ces couvertures. Contrairement à un Uncharted Drake's Fortune, ou les ennemis sont très mobiles, vous contournent, vous délogent avec des grenades et détruisent vos abris de fortune, les couvertures de RDR et GTA IV procurent un abri très sûr, duquel il n'est pas vraiment nécessaire ni conseillé de s'extraire. Cela résulte donc en un jeu moins dynamique, même si RDR laisse la possibilité de la faire, notamment avec le saut par dessus la couverture.

Santé
Longtemps un des plus grands partisans de la santé avec barre de vie, kits de soins et gilets pare balles, le dernier né de Rockstar cède aux sirènes contemporaines pour nous donner une vie qui se régénère rapidement, et dont la déplétion se signale par une coloration rouge graduelle de l'écran. 
Pour résumer, les barres de vie fixes de GTA obligent généralement à faire attention à son avatar sur le moyen terme et à explorer les niveaux en quête de kits de soin. Ceci met un poids supplémentaire sur le joueur, qui peut être vécu comme une punition, en l'obligeant à consacrer du temps à sa survie, que ce soit à la recherche de kits pour se soigner, ou en préparation des missions en se dotant de gilets pare balles. On est donc plus investi dans le bien être de son personnage, compte tenu du mal qu'on s'est donné pour y parvenir. 
A l'opposé, la vie qui se régénère dans RDR est plus concernée par la survie à court terme et encourage le dynamisme, les petites expérimentations et exploits individuels, puisque leurs conséquences peuvent être rapidement annulées en se cachant quelques instants. La quantité de dégâts que l'on peut subir d'un coup est aussi diminuée pour balancer.
Pour diminuer la frustration due au caractère définitif de la perte de santé et au temps nécessaire à aller récupérer des gilets pare balles, GTA offre plusieurs solutions intéressantes. Tout d'abord, des packs de vie sont situés à intervalles réguliers lors des missions les plus longues. Cela offre une certaine marge d'erreur au joueur. L'autre solution pour diminuer la frustration du joueur est la possibilité d'appeler un ami pour avoir accès à un magasin sans trop se déplacer (une autre solution serait de remplir la ville de marchands d'armes clandestins ou légaux, ce qui changerait notablement la perception du monde). Ces solutions restent bancales : dans un cas, le joueur est dépendant du développeur pour distribuer correctement les kits de soin, et les mettre assez en avant. Dans l'autre, s'équiper avant une mission reste un processus lent et fastidieux, qui doit de plus être réinitié à chaque échec.
Red Dead Redemption offre lui aussi des nouveautés sur la santé. En effet, malgré sa vie qui se régénère, concept éprouvé dans de nombreux FPS et TPS, le jeu offre la possibilité assez unique de stocker pour un prix dérisoire des items de soins qui remontent immédiatement l'intégralité de la barre de vie. J'ai du mal à comprendre l'intérêt d'une telle décision, à part indiquer au joueur que foncer tête baissée au milieu d'un gunfight est une option valide et de peu de conséquence, ce qui me semble assez contreproductif. 

Visée
Les deux jeux proposent des systèmes très similaires, conjuguant liberté et accessibilité.  Le lock automatique permet de rapidement viser ses adversaires. Cela rentre bien dans le schéma narratif de personnages maitrisant les armes à feu et n'hésitant que peu à s'en servir quand le besoin s'en fait sentir. Ainsi, indépendamment du skill du joueur, on retrouve la rapidité et l'efficacité que suggère le scénario. Il est néanmoins possible d'influer un peu sur la visée, et le lock est assez "lâche" pour que l'input du joueur, que ce soit la légère inflexion du stick pour toucher la tête plutôt que le torse, ou le suivi d'une cible en mouvement, conserve son importance et sa signification.
Cette liberté dans la visée peut servir aussi la créativité des joueurs, ou du moins leur laisser plus de choix : tirer dans les pneus d'une voiture, dans la tête d'un cheval, désarmer son adversaire, l'handicaper d'une balle dans la jambe, sont autant d'alternatives avec leurs propres conséquences, leurs propres récompenses, et permettent au joueur d'exprimer une variété d'intentions plus large que la simple volonté de tuer ou pas. Le moteur d'animation réaliste tend aussi à valider ces alternatives, avec des conséquences particulières et donc intéressantes.
Pour continuer sur la visée, RDR se dispense de montrer la santé de l'ennemi directement dans le viseur. On peut penser qu'un tel système servait à indiquer au joueur quand il touchait l'ennemi, et à justifier des ennemis résistants, avec une barre vie. RDR s'en dispense, les animations permettant de savoir quand on fait mouche, et réduisant drastiquement le nombre de balles nécessaires à tuer un adversaire. Cette diminution de la résistance des ennemis a deux conséquences : les pétoires rudimentaires de l'Ouest, moins rapides, non automatiques, évitent d'être frustrantes grâce à cette efficacité accrue, et le monde semble ainsi plus expéditif, plus dangereux, plus impitoyable. Enfin, la visée s'améliore pour les projectiles, avec la trajectoire symbolisée directement. Finie la grenade qu'on jette à ses pieds, bienvenue à la dynamite qui atterrit pile dans la cachette de l'ennemi.

Sélection des armes
Pour continuer sur les armes, RDR se dispense aussi du système classique des GTA. Celui ci était simplement une plaie : aucun moyen de savoir de quelles armes et de combien de munitions on dispose sans les faire défiler péniblement une par une, ce qui pose fréquemment des problèmes dans certains affrontements. Quand des objets se retrouvent dans le cycle, comme les parachutes, le comble est atteint. Le micro-management des armes, avec plusieurs modèles pour chaque slot, qui oblige à changer d'armes pour récupérer les munitions n'apportait pas grand chose non plus.
RDR adopte donc  un système beaucoup plus simple de sélection radiale, qui permet d'afficher simultanément toutes les armes et munitions disponibles, et donc d'équiper rapidement l'arme appropriée. Plusieurs modèles peuvent peupler chaque slot, ce qui gêne en partie la lisibilité, mais au global, le système est bien plus pratique, et encourage bien plus l'usage occasionnel d'armes originales (puisqu'en cas de danger imprévu on pourra revenir aux armes classiques sans soucis). La récupération de munitions se fait aussi plus facilement, sans devoir valider des changements d'armes, ou devoir descendre de cheval. La sélection se faisant en temps réel, tout est fait pour préserver le flow et le sentiment d'urgence des gunfights. A ce titre, il est surprenant que l'usage d'items comme les potions suspende l'action.
Les deux jeux proposent des systèles de combat au corps à corps. Généralement peu aimés par les joueurs pour leur manque de lisibilité, de réactivité et tout simplement d'efficacité, ils permettent néanmoins de fournir un rapport plus tactile, plus direct au monde. Malgré les efforts pour améliorer et rendre plus attrayants le corps à corps, avec notamment une quête optionnelle de combats undergrounds dans Gay Tony, un succès/spécifique et une mise à l'honneur lors des chargements en multijoueurs dans RDR, le corps à corps reste largement inexploité.

Les nouveautés de Red Dead Redemption
La première nouveauté est le Dead Eye. Décliné en trois variantes au cours du jeu, sans que ces changements ne soient jamais justifiés, il permet en substance d'accomplir des exploits avec la gâchette. Le temps ralentit, et on aligne les tirs. Cela donne au joueur un avantage précieux, parfois indispensable au vu de la rapidité de certains cavaliers qui nous fondent dessus, et de l'inhérente vulnérabilité de notre personnage sur un cheval. Ainsi, le Dead Eye et sa gestion sont particulièrement importants lors des captures de bandits, ou des ennemis surgissent rapidement de partout et peuvent nous envoyer ad patres en quelques secondes. Néanmoins, le système est tout de même imparfait car, malgré la confusion induite par le changement fréquent de fonctionnement, le système est trop puissant : la jauge se remplit très vite (on peut là encore user de potions qui aggravent ce constat) et rend le jeu très facile. Derrière une couverture hermétique, avec une réserve illimitée de Dead Eye, aidé par la visée assistée, le joueur pourra affronter sans crainte n'importe quelle armée que le jeu pourra lui opposer.
Ironiquement, c'est derrière une gatling, aux munitions illimitées et qui ne requiert jamais de recharger que le joueur est le plus vulnérable, démuni qu'il est de couverture et de visée assistée. Penser alors que faire une séquence de shoot sur rails face à une chair à canon uniforme est une récompense en soi (puisque RDR les multiplie vers la fin du jeu), que cela en fait un spectacle impressionnant, exacerbant la progression du joueur et sa puissance, me parait manquer clairement de clairvoyance.

Une autre nouveauté de RDR, que j'apprécie cependant particulièrement est le lasso. Il offre une alternative non létale particulièrement intéressante, avec ses propres mécaniques de gameplay, dans la capture de bandits, de chevaux, en trainant ses ennemis derrière son cheval, ou en laissant les captifs sur les rails... Une autre forme d'interaction avec le monde tout simplement.

Enfin, RDR ajoute encore à ce melting pot de systèmes, une dernière nouveauté, les duels. L'idée est de mettre l'accent sur certains affrontements, les mettre en scène pour les rendre plus significatifs. Le résultat est sympathique et globalement atteint, avec une tension palpable. Néanmoins, le jeu échoue à bien enseigner au joueur le fonctionnement de ces duels, le feedback manque de clarté, et le résultat parait ainsi parfois aléatoire sans qu'on sache comment s'améliorer ou même pourquoi on a réussi.

Conclusion
Au final, les expériences des deux jeux sont assez différentes du point de vue du gunplay. Red Dead Redemption offre plus de possibilités, avec le lasso, les duels, le désarmement, le Dead Eye. La couverture et les projectiles y sont plus pratiques, ainsi que la sélection des armes. Le jeu s'en trouve plus fluide, plus expéditif aussi.
GTA IV quant à lui, incite plus à rester en position, se cantonner à l'AK ou au SMG, à moins se déplacer. Pour pallier aux problèmes, les extensions ont introduits des armes plus puissantes, presque cheatées (notamment ce fusil à pompe à munitions explosives, qui a une portée impressionnante).
Néanmoins, pour toutes les améliorations de Red Dead Redemption, il est loin d'être parfait. On se retrouve parfois à tirer sur les murs quand notre viseur est bien pointé sur l'ennemi, se déplacer en intérieur est toujours aussi délicat, comme faire de la grimpette. Les différents types de visée n'aident pas non plus à mettre tout le monde sur un pied d'égalité dans les matchs online. 

Uncharted 2 : Among Thieves reste pour tout cela ma référence en la matière, avec des déplacements fluides et précis et une visée satisfaisante et fiable qui permettent de me concentrer sur ce que je veux faire plutôt que la maniabilité pour y arriver.