C’est un véritable pavé dans la mare que jette Dan Adelman, ancien responsable de la branche “indé” de Nintendo of America. Apprécié des médias pour son franc parlé, il récidive l’esprit désormais libéré de cette clause non écrite exigeant des cadres dirigeants l’observation d’un devoir de confidentialité après une séparation en “bon terme” selon la formule consacrée. L’homme ne se prive pas pour dénoncer « la culture d’entreprise passéiste » de Nintendo, responsable selon lui d’une perte « d’efficacité et de temps ».
 
La situation géographique de son siège social basé à Kyoto est caractéristique de son mode de fonctionnement interne selon Dan Adelman. Le poids écrasant de la hiérarchie et le culte absolu du consensus qui ont cour ne favorisent pas l’émergence de cadres décisionnaires, « il n’existe que des conseillers possédant un droit de véto » regrette-t-il. Même au plus haut sommet de l’entreprise, la prise de décision est problématique : « Satoru Iwata rechigne à s’aliéner le moindre cadre ». Pire, cet unanimisme frappe également les filiales européenne et nord-américaine, faisant barrage à « une prise de décision audacieuse ». Il pointe aussi le vieillissement des décideurs dotés d’une lecture dépassée du jeu concurrentiel. La normalisation sur le tard des consoles de salon et portable de Nintendo connectées à Internet viendrait de leur incapacité « à saisir pleinement le paysage vidéoludique actuel ».
 
Dans ce contexte loin d’être harmonieux, car destinée avant tout à acheter la paix sociale, « la prise de risque n’est pas récompensée » fustige l’ancien responsable. Seule la loyauté immuable semble avoir les faveurs des hauts dirigeants « afin de maintenir le cap » sur les objectifs fixés. Il plaide pour une libération des forces vives de l’entreprise, et ce à tous les niveaux hiérarchiques afin que les employés « se sentent habilités à proposer d’ambitieuses propositions ».
 
Dan Adelman a attiré l’attention sur lui en avril dernier. Dans une tribune publiée par Gamasutra.com, il crie sa frustration d’être privé de son compte Twitter après avoir publiquement désapprouvé le verrouillage régional de la 3DS. « Au départ, Nintendo a suggéré que je devais être accompagné d’un représentant marketing ou d’un porte-parole lors d’entretiens accordés aux médias, dit-il à un journaliste de Kotaku. Après coup, ils m’ont définitivement interdit de parler à la presse ». La suite est rocambolesque. Ses supérieurs se plaignent de l’inactivité de son compte Twitter, sa reprise en son nom par un communicant précipite le départ du cadre dirigeant : « C’était une suggestion indécente, j’ai donc claqué la porte, le silence de mon profil Twitter parlera pour lui-même » déplore-t-il.
 
Dan Adelman a rejoint Nintendo en 2005 avant de démissionner de son poste en août 2014. Il travaille désormais comme consultant pour les développeurs indépendants.
 
(par Nintenboy, sources: Gamasutra, Gamespot, Kotaku, Dromble)