Malgré les critiques acerbes sur la rigidité du gameplay et sur l'orientation action trop prononcée, le précédent volet "canonique" (RESIDENT EVIL 5) fut l'épisode  le plus vendu et le plus rentable de la saga. Capcom a donc conservé logiquement le virage amorcé par SHINJI MIKAMI avec RESIDENT EVIL 4 et clos sa nouvelle trilogie en TPS action ce qui suscite toujours certaines craintes de la part d'une communauté de fans.

Sans vouloir lâché le concept qui a tant réussi à RESIDENT EVIL 4, et entre les mains de Kobayashi Hiroyuki (qui revient au poste de producteur aprés RE4 et utilise la plus grande équipe jamais réuni pour un épisode RESIDENT EVIL, soit plus de 600 personnes au total ont travaillé sur le jeu), Capcom n'a pas voulu ignorer totalement les fans de survivor horror en décidant de concevoir son titre entre le TPS action et le TPS survival.
Si vous êtes observateur, des essais ont été déjà fait : précedemment incarnés par des spin-off séparés (respectivement RESIDENT EVIL OPERATION RACCOON CITY pour l'action et RESIDENT EVIL REVELATIONS pour le survival).

Un compromis difficile à tenir parce qu'il ne faut pas se mettre à dos les fans de la première heure qui réclame le retour au survival mais aussi parce qu'il est crucial de réaliser un retour sur investissement important en gardant la ligne de conduite des deux précédentes réalisations qui ont rapporté financièrement.

LE DILEMME TPS ACTION OU SURVIVAL : ENTRE DEAD SPACE ET GEARS OF WAR ?

"Dommage que toute la campagne de Leon ne reste pas de la qualité des premières heures en "TPS survival"...

 

Incontestablement, RESIDENT EVIL 4 a imprimé sa marque de gameplay avec sa fameuse caméra épaule que tout TPS doit aujourd'hui emprunter pour se faire apprécier des joueurs. Depuis, d'autres studios ont repris la vue du quatriéme épisode en effectuant des ajoûts pour rendre la jouabilité plus souple (Gears Of War TPS action et Dead Space TPS survival ont beaucoup contribué à cette évolution).

L'ambition de Capcom est d'effectuer un mélange délicat des deux genres en modernisant son gameplay notamment l'emprunt à Dead Space de la possibilité de marcher en tirant) et le fameux "cover system" de Gears Of War repris dans la grande majorité des TPS actuels. Malheureusement, le systéme de couverture si intuitif dans GOW est complément approximatif dans RESIDENT EVIL 6.

Autre nouveauté et pas des moindres, la possibilité d'esquiver ou de donner des coups au corps à corps (trop?) efficaces contre les créatures qui seront trop proches du héros. Les glissades et la faculté de tirer tout en restant couché rend le personnage plus agréable à manier que le Chris Redfield si rigide dans RESIDENT EVIL 5.
Le dernier patch va aussi pouvoir vous permettre de choisir la distance de la caméra, bien pratique pour savoir si un zombie vous colle aux basques.
L'inventaire, pompé sur Dead Space (et qui différe selon le personnage incarné) est aussi plus dynamique et plus intuitif.
Les fameux QTE que RE4 avait démocratisé en 2005 reviennent en force avec demandant davantage de précision lors des (trop) nombreuses cinématiques et prennent une importance capitale pour le corps à corps. A l'heure où les gamers mangent du QTE à toutes les sauces et un peu n'importe comment, force est de constater que les QTE sont ici parfaitement intégrés, plus intelligents que la moyenne et peu poussifs (comprenez par là un matracage inhabituel du stick).

 

"OUPS, une erreur s'est glissée..., RE6 souffre essentiellement de la concurrence des autres TPS plus efficaces et mieux rythmés comme GEARS OF WAR sur cette image"

 

On peut regretter une action hachée par des cinématiques inutiles notamment lors des changements de zones (trop fréquents) qui donnent lieu à une scéne dispensable où notre duo ouvre simplement une porte... Les plus intéressantes sont parsemées des QTE, le temps où le joueur pouvait profiter des cinématiques pour poser la manette est révolu.
Enfin, un systéme de "points d'habilités" récupérés dans des caisses ou cadavres vont permettre d'améliorer les compétences des personnages (force, résistance, visée, etc...). Un bon moyen pour forcer le joueur à explorer les niveaux (linéaires) et à éliminer tous les ennemis d'une zone.

Sur le papier, le programme était séduisant  : Leon incarnait la partie TPS survival/ exploration, Chris assumait pleinement sa partie TPS action et Jake servait de mariage des deux ambiances agrémenté d'une fuite en avant avec un nouveau "Nemesis" aux trousses. Malheureusement, cette alliance des deux gameplay fait davantage penser au mariage de la carpe et du lapin...

En réalité, malgré la promesse d'un certain retour aux sources, qu'importe la campagne choisie, la mécanique d'exploration des traditionnels RESIDENT EVIL est complétement effacée puisque le jeu propose d'alterner phases de tir musclées avec caméra à l'épaule et phases de conduite en autorisant aucune interactivité avec les décors (seules des caisses en bois au diamétre bien précis sont destructibles).

 

"Les combats au corps sont particulièrement mis en avant dans cet épisode...ici Ada en traint de réaliser des acrobaties"

Au final, Resident Evil 6 s'approche de ce qu'à fait Resident Evil 4 et 5 (avec assouplissement du gameplay) à savoir une succession de phases explosives et spectaculaires ponctuée de phases plus calmes (rares) et ce, dans les trois campagnes, même si Leon met l'accent sur une ambiance plus feutrée (les deux première heures simplement) et Jake sur une fuite en avant perpétuelle.
La tournure action est assumée en témoigne les notes et documents que le joueur ramassait autrefois entre deux étagéres se trouvent...dans le menu bonus du jeu!

La promesse de Capcom de faire de la campagne de Leon celle du retour aux sources du survival n'est clairement pas tenue. Mais ce n'est pas le défaut le plus marquant...

 

"Le nouveau Nemesis de cet épisode est l'occasion de poursuites musclées...et donnent lieu à des scénes de gameplay parfois insipide (une aréne de combat avec shoot et scripts), parfois ingénieuses (la grotte avec les lucioles)"

 

L'OMBRE DE LA CONCURRENCE ET DE RESIDENT EVIL 4 PLANE : QUELS SONT SES DEFAUTS ?

Malheureusement, quelques éléments restent aujourd'hui, avec la concurrence actuelle, peu pardonnables : l'interactivité avec les décors est quasi-absente (les matériels de bureau sont insensibles au contact des balles, les niveaux sur la place du marché où aucune caisse de légumes et autres objets ne peuvent être déplacés ou détruits, certaines vitres sont incassables, les décors sont obstrués par des "murs invisibles" ou quelques caisses en carton indestructibles, ce qui laisse une impression étrange, que les niveaux sont allergiques à toute interactivité). Certains détails comme l'impossibilité de blesser certains ennemis à l'avance quand ils sont au sol irrite (il faudra attendre le script prévu pour qu'ils puissent être touchés).

Ces défauts cassent grandement l'immersion pour peu que l'on ait joué aux ténors du genre, en plus de sabrer l'exploration, le joueur sachant pertinement que majoritairement seuls les caisses et tonneaux contiennent des objets.

"Les décors sont parfois trés réussis mais figés autorisant une interaction trés limitée avec le décor..."

 

L'I.A n'est pas franchement convaincante et même si Capcom peut mettre en avant pour pallier à ce défaut l'absence d'intelligence d'un zombie, on pourrait se demander pourquoi certains arrivent à piloter des hélicoptères pour nous envoyer leurs hordes mais ne parviennent pas à nous contourner et profiter des décors pour se couvrir convenablement.

Le principal grief de cet opus est d'avoir fait moins bien que ses concurrents (qui ont bien profité du modéle RE4 mais qui l'a vite digéré et amélioré) malgré le confort et l'aura de la licence Resident Evil.
Force est de constater que RESIDENT EVIL 6 ne maîtrise parfaitement à aucun moment ses propres mécaniques de gameplay.

Ainsi, les scénes TPS horreur de Leon font moins frissonner que celles d'un DEAD SPACE avec ses nécromorphes et les phases TPS action font moins efficace qu'un GEARS OF WAR. Les scénes d'action se succédent scindées à chaque fois par des portes métalliques à ouvrir seul ou à deux et quelques phases de conduite (moto sur la route ou dans la neige) permettent d'offrir un peu de variété et soutenir un certain rythme de jeu.

"Les phases de conduite ne sont pas désagréables bien qu'elles nécessitent la plupart du temps à simplement maintenir la gachette enfoncée puiqu'enfermées dans un couloir...elles ont le mérite d'apporter de la variété"

 

Les niveaux sont aussi trop linéaires et cloisonnés laissant peu de marge de manoeuvre et de liberté au joueur (les passages dans les rues embrasées sont assez frustrantes sur ce point).
L'absence de chemins alternatifs participe grandement à la sensation d'être enfermé dans des "arénes" où des vagues d'ennemis apparaissent jusqu'à la prochaine cinématique (soulignée par l'impossibilité de revenir en arriére, usant des artifices ultra-connus (des roches qui s'effondrent ou une barricade qui apparaît obstruant le passage).

Bien entendu, la volonté affichée est de rendre cet opus le plus immersif de toute la saga. Malheureusement, les cinématiques dispensables et les temps de chargement trop nombreux ruinent franchement l'immersion. Au final, RESIDENT EVIL 6 souffre d'un probléme de rythme.

 

 "Le bestiaire est un melting-pot de tous les opus Resident Evil et les principaux films hollywoodiens des années 80-90, un régal sur ce point"

EST-CE UN BON RESIDENT EVIL ?

RESIDENT EVIL 6 fait mieux que le 5 c'est une évidence. Pour ceux qui n'ont pas apprécié le virage action de RESIDENT EVIL 4 ne seront pas plus convaincu par ce nouvel opus, malgré les promesses des développeurs, même si les premières heures passées avec Leon pouvait laisser espérer un retour (rapide) vers le survival horror.

La réalisation est correcte bien que certains décors paraissent ternes mais variés (un village en ruine, des rues enflammées, une université, une église, un cimetiére, une colline enneigée, les toits de Chine, etc). Certaines maps sont anguleuses et les textures manquent de détails heureusement masqué par un travail sur les ombres et les effets de lumière souvent remarquables (les ombres dans les couloirs du métro, les projections des tombes grâce aux éclairs dans le cimetière, etc.).
De manière générale, la réalisation a moins d'éclat que celle de RESIDENT EVIL 5 (2009), ce qui est assez décevant pour une production de 2012.

"Les effets de lumière et de particules impressionnent même si on regrette une réalisation globale moins impressionnante que Resident Evil 5..."

La principale qualité se retrouve dans le bestiaire, surprenant, varié, protéiforme et véritablement soigné.
Nous avons (enfin) la joie de retrouver le zombie "classique" que nous n'avions pas vu depuis CODE VERONICA mais aussi de nouveaux types d'ennemis : ceux qui ont le pouvoir de regénérer la partie blessée de manière dantesque), des créatures plus insectoides, des horreurs humanoides entre les monstres sangsues de RESIDENT EVIL ZERO et les difformités de SILENT HILL et des monstres sortis des meilleurs films de Carpenter ou encore des boss impressionnants qui ont un design dans l'ensemble réussi).

En terme de contenu et de variété, ce volet fait aussi trés fort avec quatres campagnes, une vingtaine de chapitres avec la possibilité de jouer en coopération en splitté et en ligne.

 

"En plus du retour des traditionnels zombies, de nouveaux, capable de muter dangeureusement sont plutôt réussis"

 

Il convient de souligner que l'expérience est nettement meilleure avec un ami, certaines séquences souvent classiques en solo se transforme en passage culte accompagné d'un second joueur. En fait, c'est clairement, à mon sens, un des meilleurs mode coopératif de cette génération.

Notons aussi une partie sonore, avec quelques élans "Hans Zimmeriens", plutôt réussie.

Moins fascinante que la phase de conception de RESIDENT EVIL 2 (Squaresoft qui a débauché une partie de l'équipe de développement de la version 1.5 pour créer PARASITE EVE) ou le développement houleux de RESIDENT EVIL 4 (qui a généré trois à quatres versions BETA, dont l'une qui a générée la licence DEVIL MAY CRY et une autre avec le fameux fantôme bleue au crochet), celle de ce RESIDENT EVIL 6 n'en est pas moins intéressante en ce qu'elle imprime ce dilemme perpétuelle entre survival et action en associant les gameplay des TPS des licences concurrentes, et surtout la volonté de réaliser le meilleur épisode de la saga.

Aussi, nous pouvons nous réjouir des multiples clins d'oeils et références faites au joueur qui révèle toute la passion de l'équipe de développement pour l'univers Resident Evil, ses codes, son game-design et ses (trés) nombreuses influences cinématographiques.

Sur ce point, cet épisode est incontestablement le plus référencé. Non seulement, l'équipe de développement s'est laissé séduire par l'influence des précédents Resident Evil (comment ne pas penser aux rues embrasées de Raccoon City au second chapitre de Leon, à Resident Evil 4 pour l'embuscade dans l'armurerie et le boss aquatique dans la grotte ou encore à Code Veronica pour le boss de la mine ou de la soute dans l'avion).

Fort de ses influences, RESIDENT EVIL 6 puise aussi dans les expériences vidéoludiques passées (nous pouvons citer en vrac Gears Of War, Alone inthe Dark, Call Of Duty, Dead Space, Dino Crisis 3, Tomb Raider, Lost Planet, Silent Hill, Uncharted, Left For Dead, etc.) ou n'hésite plus à offrir des hommages rappelant de nombreuses oeuvres cinématographiques (en vrac, La Nuit des morts vivants, Aliens, Indiana Jones et le temple maudit, Jurassic Park, Resident Evil le premier film, 28 Jours Plus Tard, Les Dents de la Mer, Evil Dead, The Thing, La Mouche, Air Force One, etc.).  

Pourtant trés généreux en contenu et en références multiples dont le joueur s'amusera à les reconnaître, le dernier né de CAPCOM n'arrive pas ni à réitérer l'exploit de la qualité d'un RESIDENT EVIL 4 ni à donner un nouveau souffle au survival horror comme ELECTRONIC ARTS l'a fait avec DEAD SPACE.

Bien pire, RESIDENT EVIL 6 immite mal ses concurrents même s'il faut reconnaître que l'on s'ennui pas et que l'on se laisse facilement embarquer dans ce "train fantôme" bancal mais finalement séduisant, rythmé et explosif.

CONCLUSION :

RESIDENT EVIL 6 a l'ambition énorme de marier l'intégralité des ambiances des précédents RESIDENT EVIL avec le gameplay "modernisé" des deux précédents et en tentant d'embrasser la totalité de la complexité des qualités des jeux d'action/ horreur actuels.
A force d'ambition et d'influences, le titre de Capcom perd en qualité intrinséque et n'arrive pas à éviter les erreurs de game-design.

A trop vouloir embrasser mal étreint.

 

En bref, pour les flemmards :

+ Un bestiaire hallucinant
+ Une jouabilité (enfin) plus souple (marcher en tirant, esquives, roulades, caméra libre, etc.)
+ Un épisode archi-référencé (de Evil Dead en passant par Aliens, Les Dents de la Mer ou Tomb Raider)
+ Un mode coopératif encore meilleur
+ Le contenu (4 campagnes + multijoueur en ligne ou en écran splitté)
+ Des QTE immersifs

- Réalisation perfectible (ça fait mal aprés Resident Evil 4/ 5)
- Le "cover system" bancal (pourquoi ne pas avoir pris comme modéle Gears Of War?)
- La trop grande linéarité et un effet de "cloison" entre chaque zone de jeu
- Une action parfois trop hâchée par des temps de chargement trop nombreux et des cinématiques inutiles
- Certaines séquences trop longues (notamment certains Boss, interminables)

N.B : A noter deux patch sortis récemment, le premier qui permet de régler la distance de la caméra (bien pratique il faut le reconnaître) et le second sorti au mois de janvier permettant de selectionner les niveaux dans les chapitres (plutôt bienvenu si le joueur ne souhaite plus attendre d'avoir fini un chapitre entier pour zapper sur une autre campagne) mais aussi de désactiver les QTE (?).