Le jeu vidéo va mal.

Voilà c'est dit, hop, une phrase à l'emporte-pièce histoire d'attirer le chaland, oui, toi, derrière ton écran qui veut du croustillant, du trollesque, du foutre virtuel histoire d'occuper ta bande passante cérébrale.

Voilà c'est dit, hop, un paragraphe s'adressant au lecteur derrière lequel se cache une critique cynique et pleine de hype technophile des geeks (notez le paradoxe).

Voilà c'est dit, hop, un paragraphe versant dans la méta-critique, histoire de se donner un genre et se démarquer des autres.

Bon j'arrête là, revenons à nos propos.

Donc, le jeu vidéo va mal, mouais c'est pas dit, à dire vrai en soi ça veut rien dire, surtout si on dit pas en quoi ça va mal. Le jeu vidéo est devenu aujourd'hui un marché qui se porte très bien, brasse des millions ; la culture vidéoludique commence à être reconnue au fur et à mesure que les geeks bourgeonnent à la lueur de leurs écrans. Chaque année, c'est de plus en plus de jeux qui sortent, toujours plus spectaculaires, tant du point de vue des graphismes que de la mise en scène, etc. Et même l'émergence du marché casual - dont la majorité des jeux représente tout de même un intérêt fort limité d'un point de vue culturel, sinon vidéoludique - n'entame pas la vigueur des jeux dits traditionnels.

Dans ces conditions, qu'est-ce qui va mal ? C'est simple, tout fout le camp :

  • Qualité des jeux en baisse : Final Fantasy est devenu un rail shooter en couloir, Metal Gear verse dans le mélo chiant en violant un bon paquet des personnages de la série, Naughty Dogs sort des jeux/cinématiques à la facilité désespérante, Nintendo connaît sur sa console de salon vieille de cinq ans autant de bon jeux qu'un être humain a de doigts ;
  • Dans le même temps, les séries à succès deviennent de vraies pompes à fric : Need For Speed, Prince of Persia, Call of Duty, ou à nouveau Final Fantasy et Metal Gear, tout ça sans compter les éternels jeux de sport qui reviennent inlassablement au prix fort pour une simple mise à jour de contenu ;
  • Le modèle des DLC, oh bien sûr ça se justifie allègrement, après tout y'a dix ans on appellait ça un add-on et on le vendait sur CD ; ok, mais au moins à l'époque on avait un jeu complet même sans payer le dit add-on.

Alors oui, je suis un connard nostalgique, oui, je prend bien plus mon pied en relançant un Flashback qu'en tâtant d'Heavy Rain, oui, Mario c'était définitivement mieux en 2D, en vraie 2D, quand y'avait un level design qui rendait le jeu difficile et long plutôt que d'essayer de vendre 60€ un ersatz bancal de Mario Bros. 3 sous prétexte qu'on peut y jouer à 4, lulz.

En passant, revenons sur Heavy Rain, David Cage se masturbe comme quoi c'est un jeu mature, que le reste c'est de la merde, le monde l'adule, la belle affaire. Sauf que son jeu mature, là, c'est un film interactif, un genre inventé dans les années... 80. Ce compte tenu des restrictions hardware de l'époque. Et à l'époque personne n'aurait songé à sortir l'étendard du « moi je » qu'affectionnent tant des gens comme David Cage, ou encore Peter Molyneux ou Hideo Kojima.

Un chef-d'œuvre ne s'auto-proclame pas, des millénaires d'art à travers l'histoire nous l'ont suffisamment appris, de Van Gogh mort dans la misère à Frankenstein pas pris au sérieux à l'époque, du fait qu'il était écrit par une femme. Mais naturellement, Heavy Rain est un chef-d'œuvre du jeu vidéo. Mouais, qui l'a réellement fait plus d'une ou deux fois, sinon pour avoir les trophées (aaah, les concours de qui a la plus grosse, on réinvente le concept de l'arcade dans les consoles de salon pour compenser des durées de vie de plus en plus courtes, mais passons) ?

Bien sûr, certains jeux sortent du lot, qu'il s'agisse du travail de certains studios comme Platinum Games ou Grasshoper Manufacture, de jeux sortant simplement du lot à la faveur du hasard et du talent de ses développeurs - je pense à Mirror's Edge, Portal ou Super Meat Boy - ou encore des jeux à venir tels que The Last Guardian, le prochain Tomb Raider, El Shaddai ou From Dust, qui semblent prometteurs.

Naturellement, et je le conçois tout à fait, bien des gens prennent plaisir à  jouer aux jeux actuels, quels qu'ils soient, prenant même leur défense vis-à-vis des jeux plus vieux, comme si les deux époques étaient en concurrence (car attention, si je critique l'état actuel du marché du jeu vidéo, ça ne lui enlève pas le fait d'avoir des jeux de grande qualité - et mettre en opposition les jeux présents et passés n'a à mon avis pas de sens - mais globalement, j'ai le sentiment qu'ils sont moins nombreux). Grand bien leur fasse, mais il n'empêche que d'une vue d'ensemble, et à mon humble avis, c'était mieux avant.