Gods [Amiga, Atari ST](Génération4 N°31 Mars 1991, p. 76-78,
Joystick N°14, Mars 1991, p. 42)

C'était le nouveau jeu en préparation des développeurs :
The Bitmap Brothers. L'occasion toute trouvée pour moi de vous parler de ces
acteurs du vidéo-ludisme, précurseurs en ce sens qu'il s'agissait de ces
quelques élus à s'être fait une renommée dans le milieu de telle sorte que l'on
pouvait mettre des noms sur des créateurs de cette sous-culture à l'époque.

Est-ce que cette considération a vraiment évolué ? Aujourd'hui, certes des
personnalités matricielles de tout bord (Nolan Bushnell, Andy Gavin, Jason
Rubin, Shigeru Miyamoto, Eiji Aonuma, John Carmack, David Braben, Eric Chahi,
Michel Ancel, Hideo Kojima, Fumito Ueda, Peter Molyneux, David Cage... attenton,
cette liste n'est aucunement décroissante...) ont su focaliser les projecteurs de
la presse spécialisée mais au final pour quelle connaissance de grand public.

Mais
qui étaient-ils, ces Bitmap Brothers ? Etaient-ils vraiment frères ? Quel lourd secret pesait
sur cette famille ?  Née à Wapping
(dans la partie est de Londres) en Angleterre et en 1987, cette compagnie a été
cofondée par Mike Montgomery , toujours en activité de MD (Manager Director =
CEO : Chef Executive Officer in America), Eric Matthews et Steve Kelly.

De gauche à droite : Eric Matthews, Mike Montgomery, Steve
Kelly.(source abondonware-France.org)

Chacun d'eux travaillaient dans des boîtes différentes
expliquant parfois le rush pour sortir certains titres et leurs nombreux
projets en cours. Mike Montgomery était programmeur chez Leisure Software (e.g.,
Cluedo sur Commodore), Steve Kelly chez Psion qui développait pour Spectrum, et
Eric Matthews dans une boîte spécialisée en logiciels éducatifs, c'est par une collaboration sur Scalextric pour Amiga qu'il rencontra Mike.

Eh oui, vous discernez des méandres de la sémantique avec
votre œil aiguisé qu'ils n'avaient aucun lien de parenté. Qu'importe tant qu'on
a l'ivresse !

De plus, ce trio collaboratif proposait toujours dans leur
jeu une originalité dans le gameplay, c'était quelque peu leur marque de
fabrique en plus des qualités graphiques et musicales de leur jeu. The Bitmap
sont considérés comme des artistes du jeu vidéo en leur temps de règne dans l'industrie
(fin des années '80, début des années '90). Le chant du cygne livrant ses
dernières notes en 1996 avec Z et Z2 en 2000 sur PC.

Ces développeurs se sont d'abord illustrés par Xenon, un shmup, autrement dit un shoot'em up pour les non-initiés (le ball-trap numérique en gros), sorti
en janvier 1988 en premier sur Amiga. Il s'agissait d'un shmup à scrolling
vertical. Il se démarquait principalement par ces graphismes impressionnants
pour les ordinateurs de l'époque et sa bande son. Ce qui l'a conduit à recevoir
un Awards's In-Din dans la catégorie Best Music and Effect. Par la suite, il
fut porté sur de nombreux autres supports

Dans leurs années fastes, la production de cette compagnie qui
m'aura le plus marqué est sans conteste Xenon 2 : Megablast paru une année
seulement après son prédécesseur en partie expliquée par une programmation
effectuée par The Assembly Line, The Bitmap Brothers s'occupant de la
conception et du design et ce remarquable dès l'introduction grâce à sa musique
inoubliable, jugez plutôt :

Pour la petite histoire, la Major Rythm King Records avait
été approchée afin d'inclure ce titre Bomb The Bass emblématique dans Xenon 2.
Dans l'introduction, il s'agissait d'une version digitalisée à partir du master
original, toutefois en jeu, c'était une version inférieure en qualité. Après
des péripéties pour rendre dans les temps le master du jeu, ce fut un carton et de nombreuses fois primé.

Non content d'être présent sur beaucoup de micro-ordinateur,
il s'est vu aussi adapté sur des consoles de salon et portables telles que la
Master System, la Megadrive et même la Game Boy (oui, il faudrait écrire le)

Mais si vous le permettez revenons à l'actualité... ...de Mars
1991, qui s'est vu accueillir Gods, premier jeu sorti sous leur label Renegade. Ce
label créé en association avec une major en musique (Rythm King Records) aux ambitions
démesurées et pompeuses d'éclairage du vidéo-ludisme sous un nouvel angle jamais
vu auparavant a vite déchanté mais a tout de même proposé des titres de
qualité. Comme ce Gods, sur fond de Grèce Antique, vous incarniez un guerrier assoiffé
de gloire. Et afin d'affirmer votre courage et défier la mort, vous devrez occire
des démons transformant votre citadelle en ville de
danger
. Hum, cela ne vous rappelle rien ?

Suite à ce scénario complexe vous en conviendrez, Kratos
devait donc... Ah non, pardon il a une chevelure blonde, un casque et point de
QTE (Quick Time Events vous savez le
système homme mort des jeux vidéo), votre guerrier devait donc parcourir
différents tableaux, façon Castlevania, semés d'ennemis. Vous pouviez emprunter
des échelles, activer des mécanismes, récupérer des items et lancer des dagues
pour en découdre avec vos belligérants. Les niveaux comportaient en plus de
nombreux pièges mortels et des endroits cachés qu'il vous faudra découvrir.

Graphiquement, le jeu était magnifique comme à l'accoutumée avec
The Bitmap Brothers, rien que dans le premier niveau se déroulant dans un décor
de château proposait un scrollingdifférentiel vertical que l'on apercevait si l'on regardait bien au travers des
fenêtres.

Chose surprenante pour l'époque et ce type de gameplay, le
jeu gérait le rank. C'est-à-dire qu'en fonction de votre habilité, le jeu s'adaptait.
Si vous aviez quelques difficultés à parcourir les niveaux, le programme décidera
de vous distiller quelques bonus supplémentaires. Au contraire, si vous
excelliez dans les différents environnements et bien votre dextérité était
récompensée par des monstres en sus. C'était à l'époque la patte du jeu sur
laquelle reposait tout le marketing, un jeu intelligent qui s'adapte au votre
niveau ! Toutes les types de consommations vidéo-ludiques pouvaient être
assouvies. Des plus novices en la matière ou ceux qu'ils ne voulaient pas se
prendre la tête jusqu'aux hard core
gamers
qui souhaiteraient découvrir toutes les subtilités du gameplay et du level design.

Par ailleurs, pour obtenir certains objets, il fallait
laisser les ennemis vous piller votre inventaire. Il fallait donc un minimum
étudier les niveaux afin de progresser au mieux, de plus dans chaque
environnement vous pouviez aller satisfaire vos envies. Mais non, pas dans un
bordel ! Mais chez un marchand vous permettant ainsi de vider vos bourses
et de vous préparer au mieux en termes d'équipements et d'objets pour la suite
de votre quête qui était de terrasser les quatre gardiens des quatre
environnements différents.

Sachez que le jeu devait être adapté sur Game Boy Advance en
2002 par Crawfish Entertainement qui avait racheté les droits avec de
nouveaux niveaux à la fin desquels vous pouviez débloquer les originels. Cependant,
en dépit d'une preview vidéo et un développement de l'ordre des 60%, le projet
fut avorté pour des raisons d'abandon de l'éditeur et faute de finances. De
plus, nous avons même ouï-dire qu'une version DS pourrait voir le jour, mais là
aussi sans suite. (source : unseen64.net)

Pour terminer une petite pépite relevée dans Joystick qui a
appelé le jeu durant toute la preview Goods... Bien vu l'aveugle ! Peut-être trouvaient-ils le titre du jeu trop outrancier
pour les non-anglophones qui ignoraient sans doute que Gods en anglais signifie Dieux. Que
voulez-vous, les Voies Du Seigneur sont impénétrables !

Pour aller plus loin :

https://www.bitmap-brothers.co.uk/front.htm

https://www.grospixels.com/site/bitmapbros.php

https://www.abandonware-france.org/ltf_abandon/ltf_dossiers.php?id_dossier=6