Comme tout poltron face à une possible critique, je vais immédiatement me dédouaner de toute réelle intention avec ce billet. Ce n'est pas à proprement parler une réflexion un peu posée et un tant soit peu réfléchie comme j'essaye d'en proposer de temps à autre (tant bien que mal). Ce sera plus une réaction à quelque propos entendu récemment et qui concerne le jeu vidéo. Alors non, je ne serais pas dans la vindicte qui concerne cette chère Mar_Lard puisqu'il y a déjà des réponses forts intéressantes sur le sujet ; je vous renvoies à ce (très) long billet notamment. Non, je voudrais parler d'un des derniers podcasts de Gameblog et un peu de but en blanc.

Dans le podcast 253 de Gameblog, intitulé « Jeu vidéo tout connecté attention danger ? », l'équipe de GB parle en long et en large du jeu vidéo relié à Internet et de l'avenir possible du média qui se dirige vers des consoles et/ou PC demandant au joueur une connexion et une preuve constante de sa bonne foi pour jouer. JulienC évoque à un moment quelque chose de très intéressant à savoir la pérennité des œuvres ludiques qui aurait à terme une date de péremption, si l'on imagine un avenir où seuls les jeux hébergés sur serveurs (serveurs pouvant être coupés n'importe quand) sortiraient de manière grand public. Rahan par ailleurs parle des difficultés qu'ont les développeurs à créer des codes réseaux pour des titres ainsi architecturés qu'ils doivent recevoir des millions de joueurs lors de leur sortie. Mettant ainsi en avant la nouveauté du procédé qui amène à des crash tels que les sorties catastrophiques de Diablo 3 ou de Sim City (le reboot), il ajoute tout de même qu'évidemment, ça ne concerne pas le consommateur et qu'à partir du moment où celui-ci a payé son jeu/service il est en droit d'en jouir jusqu'à ce que mort s'en suive sans que les désidératas de l'éditeur ne viennent lui couper la chique au moment de son achat ou quelques mois ou années plus tard quand le jeu ne fait plus recette, voire pompe des ressources de serveurs pour quatre clampins qui y jouent toujours. Je pense qu'on sera peu à contredire le rédac-chef sur ce point ; ce n'est pas notre problème, on veut simplement un jeu fini et la possibilité d'y jouer où l'on veut, à partir du moment où l'on a payé.

Voilà donc où je veux en venir. JE M'EN FOUS. Je m'en fous que vous ayez des difficultés à rentabiliser vos jeux triple A qui n'ont aucune ambition, à part répondre à ce que ''demande'' le joueur moyen qui achète vos jeux. C'est un putain de cercle vicieux ; vous proposez un style parce que tout le monde achète ça, donc il n'y a qu'un style, donc tout le monde achète ça. Je m'en fous que vous ayez des problèmes avec le piratage ; c'est pas une raison pour prendre en otage les gamers honnêtes qui dépensent de l'argent pour vous faire vivre et vous permettre de créer d'autres jeux. Vous voulez nous prendre pour des consommateurs ? Alors adhérez au diktat du Client Roi. Je ne suis pas un larbin, soumis à vos envies. Vous faites des jeux pour moi parce que j'ai les moyens et l'envie, la passion de vous faire vivre pour ce que vous nous proposez.

Il y en a marre de lire que les éditeurs de jeux sont contre l'occasion, que les constructeurs de consoles pensent à la bloquer. La bloquer pour qui ? Pour les éditeurs ? Ceux que nous allons payer pour leurs titres et pour les consoles des constructeurs ? N'oubliez pas que si le jeu vidéo perd de l'argent, c'est pas parce qu'il y a plus de personnes qui vous volent vos productions, mais c'est simplement parce que ceux qui voudraient bien vous payer ont de moins en moins de possibilité de le faire et de moins en moins de raison de le faire. Arrêtez de mordre la main qui vous nourri ! Il y a que dans le jeu vidéo que j'ai l'impression d'être fliqué. À la décharge de tous ces cons d'éditeurs qui voudraient bien que Big Brother soit moins sournois et plus actif, qui voudraient qu'on soit tous aussi idiot que moi à s'inscrire sur Facebook et Tweeter (pour ne rien y foutre en plus), qui voudraient qu'on soit les fameux « predictible bastards », les lobbys du cinéma et de la musique veulent aussi prendre leurs consommateurs pour des débiles et s'assurer que ceux-ci consomment comme ils l'entendent. Acta, Hadopi, la mode des lois liberticides. Je suis le premier à m'en contrefoutre parce que j'ai suffisamment de temps passé sur un ordinateur pour savoir que c'est pas ça qui nous arrêtera.

Mais je m'égare dans mon énervement qui ne mène nul part (en fait, je suis là où je voulais en venir donc j'y reste). Quand j'entends que Sony ou Microsoft veulent trouver une solution qui satisfasse les deux parties, je suis scié de constater qu'on considère les éditeurs comme une des deux parties. Les éditeurs ne comptent pas. Ils n'ont pas leur mot à dire sur des consoles que NOUS ALLONS PAYER. Activision, EA, Ubisoft, Capcom, Konami, je vous enjoins gentiment à clairement la fermer (physiquement). Vous ne me donnez pas d'argent pour que je paye la machine qui va accueillir vos jeux et vous ne me payez pas pour que je joue à vos jeux. JE vous donne de l'argent, parce que c'est de ça dont il est question, on est des consommateurs pas des individus qui cherchent à se cultiver, je vous donne de l'argent pour que vous viviez de ce que vous produisez. C'est moi et les millions d'autres qui décident si vous êtes des inutiles au monde. La formule est sévère, elle n'est pas de moi (mais de feu Robert Castel) et veux bien dire ce qu'elle veut dire. Si vous produisez des jeux qui ne sont pas achetés par les gens, au sens de notre société capitaliste moderne, vous êtes des inutiles au monde, des surnuméraires.

Maintenant la problématique est d'avoir un peu de compassion pour la création. Si l'on avait la grande bonté d'âme de croire en un sincère sacerdoce de la part des sociétés citées (en particulier les deux premières) pour la création vidéoludique plus que le business, on pourrait s'imaginer que leur revendication, quant à l'incompatibilité entre la création AAA et le coût que cela entraîne, force à composer entre les joueurs et les entreprises qui fournissent les jeux. Non.

Si vous voulez vraiment nous prendre pour des consommateurs, assumez vos actes et vos paroles. Quand un développeur (indépendant ou pas, ça on s'en fout) dit qu'il va faire un jeu parce que c'est qu'il a envie de faire et qu'il prie simplement pour que ce qu'il va faire à l'arrivée plaise à quelqu'un, sinon tant pis, j'aurais essayé ; c'est de la création. Claude Chabrol a dit dans l'introduction de Comment faire un film : « De nos jours, le cinéma jouit d'un prestige assez bizarre. Nos contemporains ne veulent pas faire du cinéma, ils veulent être dans le cinéma, ce qui n'est pas du tout la même chose. Ceux qui veulent « être dans le cinéma » ne ressentent pas une véritable nécessité de faire un film. Cela n'est pas aussi indispensable que l'air qu'ils respirent... ». Vous ne voulez pas faire du jeu vidéo, vous voulez être dans le jeu vidéo, manufacturer un produit. Alors dans ce cas, assumez votre statut de producteur et dîtes simplement que vous êtes incapables de produire à la vitesse et à la quantité que vous produisez sans saturer le marché. Le problème c'est pas les joueurs, c'est le rythme. Le joueur est devenu boulimique mais avant d'être boulimique, il a été à la diète et ça a donné ce que beaucoup (dont je ne fais pas partie) considèrent comme l'âge d'or du jeu vidéo. Ce n'est pas le piratage ou les « mauvais payeurs » que vous pensez avoir trouvé dans les acheteurs d'occasion, qui posent problème. Ce qui pose problème, c'est qu'en Mars 2013, 60 jeux sont sortis en même temps. J'ai la légère impression qu'il y a un lien de cause à effet.

Je ne sais pas où tout cela nous mène. Je n'ai aucune solution à proposer à cette logique mercantile qui dépasse de très loin le jeu vidéo. Tout ce que je sais, c'est que comme tout bon élève de la société, je finirais par me plier à la « dictature de la majorité » (lisez Tocqueville, c'est très intéressant). Je jouerais connecté comme connard avec une caméra pointée sur ma tronche et une sonde anal qui vérifiera si tout ce passe bien en terme d'expérience...ou alors j'arrêterais avant l'insertion rectale.