Burton, Burton, Burton...je l'aimais inconditionnellement il n'y a encore pas si longtemps que ça. Mon réalisateur de cœur avec qui je me sentais bien, noyé dans sa magie et son macabre humour. Et puis il a collaboré avec Disney, cette boîte que j'adore par ailleurs, mais qui lui a fait tant de mal, ou plutôt dans laquelle il a eu tant de mal à ne pas partir en dépression complète. Le résultat était aussi décevant que la surprise de le voir travailler avec la boîte qui lui avait « volé » Jack Skelington en l'obligeant à le sortir sous leur label Touchstone. Alice au Pays des Merveilles m'avait dégoûté, à un point tel que j'en arrivais à avoir du mal à revoir ses anciens films, n'y voyant désormais que la redondance dont tout le monde me parlait avant. Johnny Depp, Helena Bonham Carter et Danny Elfman, la team reflet de cette redondance. A la fois bons dans ce qu'ils font, mais répétitifs forcément.

Les rumeurs de son retour avec Dark Shadows, La Famille Addams ou encore Frankenwinnie m'avaient tout à la fois rassurées, parce qu'il revenait à son style pour moi complètement absent de Alice, et dans le même temps assuré qu'il n'arriverait pas à se renouveler, prenant encore la même équipe, les même thèmes encore et toujours. Pourtant, j'ai trouvé Dark Shadows, son dernier bébé très très réjouissant.

Déjà, Dark Shadows est le prétexte parfait, dans l'interprétation qui est faite pour le film, pour faire du pur Tim Burton. Celui-ci nous narre l'histoire de Barnabas Collins, un homme dont la femme a été sacrifiée par une sorcière dingue de lui, qui pour le forcer à réfléchir à leur relation (et surtout ne pas rejoindre sa femme dans l'au-delà) l'a maudit et transformé en vampire avant de l'enfermer dans un cercueil de métal dont il ne ressortira qu'en 1972...en plein époque hyppie. Ce pitch permet donc de jouer à la fois sur l'épouvante, le genre cinématographique préféré du réalisateur et sur l'humour, son humour, qu'il aime à glisser dans pratiquement toutes ses films depuis Pee Wee's Big Adventure.

Pour le coup, le cocktail est savoureux. Ne vous détrompez cependant pas, c'est vraiment du pur Burton. L'ouverture est la sœur (jumelle) de No Place Like London de Sweeney Todd. L'arbre du bord de la falaise d'où tombe Barnabas n'est pas sans rappeler l'arbre des morts de Sleepy Hollow. Le château nous ramène directement à Edward Scissorhands. Les couleurs flashy sont dans la veine de Charlie and the Chocolate Factory. L'humour décalé et parodique renvoie à l'hommage du cinéma bis de science-fiction qu'était Mars Attack.

Cependant et c'est là que ça devient intéressant, Dark Shadows multiplient les références, à la fois à l'univers de Burton et à celui des films d'épouvante comme le Dracula de 1931 (ceux qui l'ont vu y penseront directement) ou des années 40-50 de la Hammer, mais ne s'arrête pas simplement à ça. Le tout se parre de l'ambiance baba-cool des seventies qui n'est pas pour déplaire. Les voitures, les hyppies (qui une bien bonne scène), un concert de Alice Cooper et la bande-son d'une manière générale qui est génialissime, le tout en conservant donc la saveur « spooky ». C'est un peu comme voir un Scooby-Doo à moitié sérieux. Pour finir sur les petits plus qui font plaisir, on dirait qu'enfin Burton sait écrire les dialogues, chose qui globalement lui manquait terriblement malgré les univers fantastiques. La plupart des répliques sont super bien délivrées et le duel entre Johnny Depp et Eva Green est assez exquis. D'ailleurs, je ne manque de dire qu'il ajoute une touche de sexy au film qu'on avait pas vu depuis Batman Returns et sa Michelle Pfeiffer toute de latex noir vêtue.

C'e'st marrant on dirait une poupée Barbie sur cette affiche.

Au final Dark Shadows est à mon avis, le vrai retour de Burton après un Sweeney Todd qui pourra largement déplaire pour son aspect comédie musicale, avec certaines chansons que même moi je désavoue (et pourtant j'adore le film) et un Alice in Wonderland lui ressemblant très peu, notamment parce que le numérique complet nuit gravement à son univers plastique qui a mainte fois prouvé qu'il avait besoin de chose solide pour fonctionner. Le casting est certes encore une fois trusté par Johnny Depp et sa charmante femme, Helena Bonham Carter, mais le retour de Michelle Pfeiffer devant sa caméra a été pour moi un délice, et Eva Greene, parée de sa blondeur platine et d'un décolleté à faire changer un pape de vocation, était tout simplement parfaite dans son rôle. Dark Shadows donc, pour les amateurs de Burton, ou pas d'ailleurs, c'est un film drôle, avec un bel univers, travaillé et emprunt d'un cachet disparu depuis longtemps que malheureusement on ne retrouve qu'à la Maison Hantée de Disneyland, à la fois d'épouvante et humoristique, un casting top tier, de bonnes répliques et une bande-son qui déchire sa maman. Pour les hostiles au maître du macabre, je ne suis pas persuadé que ça vous fera changer d'avis.

PS : Le film parvient à résoudre le « dilemme » moisi de Twilight en 30 secondes...bien vue !