J'avance de façon chaotique, pénible et ce depuis plusieurs mois déjà pour tenter de mettre en relief les dix titres les plus marquants de mes dix dernières années de jeu vidéo. Si vous avez déjà tenté cet exercice périlleux, vous avez une idée de l'ampleur de la tâche. On a toujours un jeu qu'on voudrait intégré et qui au final n'y est pas. Certains titres que l'on devrait mettre plus haut, d'autres plus bas. Mais il en est certains où le doute n'est plus permis. Les deux derniers jeux se sont retrouvés directement dans la plus haute sphère sans que j'ai à y réfléchir.

Shadow of the Colossus. On a dit tellement de chose à son sujet. Est-ce qu'il y en a tant à dire? Je me pose la question dès que j'aborde le sujet de ce monument. Parfois il faut juste faire les choses et arrêter d'en discuter. Malgré tout, comme je suis un intarissable bavard, je vais vous faire part de ce que j'ai pue voir et vivre avec ce chef-d'œuvre ludo-numérique.

 

 

Quand on en vient à parler des deux jeux de Fumito Ueda, Ico et Shadow of the Colossus, les premiers mots qui ressortent en général sont poétique, lyrique, épique. Je dois avouer n'être jamais vraiment entré dans l'histoire et surtout n'avoir jamais finis Ico. Probablement parce que je l'ai commencé à un moment où je n'en avais pas réellement envie. Cependant son successeur, m'a tout simplement transporté. Et pour cause, si l'on excepte un côté technique pas forcément en granite, il n'y a pas de plus beau jeu. Visuellement, narrativement, musicalement...

Partons de la plus simple des histoires. Wanda, jeune homme d'apparence frêle arrive dans une terre désolée dans le but de ressuscité une jeune femme. La condition de cette résurrection est la suivante. Seize colosses de pierre, de poil et de chaire devront périr sous les coups de son épée. Ainsi les choses lui ont été exposées par une voix. L'Homme est naïf lorsqu'il pense pouvoir jouer à Dieu.

C'est donc sur le dos de son seul compagnon, Agro le cheval noir, que l'on commence son périple. Peu ou pas d'indication sur la marche à suivre. L'épée de Wanda émet un fin rayon lumineux qui n'apparaît que lorsque le Soleil est visible. Celui ci indique la position du premier colosse. On chevauche très peu de temps pour ce premier combat. J'y suis allé tout simplement avec l'envie de remplir mon objectif. Je le rencontre, je le bat et je m'en vais pour trouver le suivant...enfin ça, c'est ce que je croyais lorsque j'ai débuté le jeu.

Au premier abord, tout est simple dans Shadow of the Colossus. L'objectif et sa réalisation en premier lieu. Bien sûr on imagine que battre seize géants ne relève pas de la promenade. Cependant on sait clairement ce que l'on à faire, on sait clairement comment on va le faire. On utilise son cheval pour se déplacer, on utilise ses mains pour escalader littéralement les colosses, et on utilise son épée pour les faire s'écrouler. Le premier d'entre eux est impressionnant. Je le vois pour la première fois après une petite varappe. Un plan large me fait saisir l'ampleur de la tâche. Il se déplace de façon lente et pataude. Je le provoque en le sifflant, je brandis mon épée, il se retourne, me regarde mollement, sans grande agressivité. J'en profite pour foncer et commencer mon ascension. En m'accrochant un peu à sa fourrure je gagne rapidement une zone de son corps où un sceau s'éclaire de bleu. Comme un appel au meurtre. Encore une fois, à ce moment là tout est simple. L'épée rentre sans encombre et une gerbe de sang noir me fait comprendre je suis au bon endroit pour lui faire toucher terre. Il se débat, me secoue dans tout les sens, mais quelques coups de lame plus tard il s'effondre. Je ne ressens aucun remord. L'intention est louable. Et puis je ne lui est pas laissé le temps de m'attaquer, cela ne signifie pas qu'il n'allait pas me réduire en miettes si je m'étais laissé faire...un phénomène étrange me fait tout de même tiquer. Une essence noire s'échappe du corps du colosse et pénètre en Wanda qui s'effondre. Je le vois ensuite se réveiller dans le temple où la bien aimée attend son retour à la vie, à côté d'une ombre noire qui n'est pas sans rappeler Ico.

Pourquoi ai-je décrit toute cette première partie? Et bien simplement parce que c'est le seul moment du jeu où pour moi les choses ont été simples. Au fur et à mesure, tout c'est complexifié, sans même que j'y prenne garde. Mon "moyen de transport" est devenu mon seul ami. Agro que l'on peut appeler, tapoter, féliciter. L'affecte que j'ai eu pour cet ami a grandit dès le deuxième combat. Il arrive que l'on soit obligé de le laisser en arrière. Un lac, une falaise à escalader, un temple enterré souvent nous forcent à partir sans notre compagnon. En ce qui me concerne cela s'est toujours fait à contre cœur.

 

 

 

Et puis bien sûr si certains colosses sont agressifs, forcent le combat, la plupart d'entre eux ne cherchent pas à faire un mal quelconque tant que l'on a pas attaquer le premier. On en vient alors rapidement à se demander s'ils méritent leur sort, à douter de nos actions. Mais on le fait. Parfois avec un gros remord quand on a vu leur étrange regard avant de porter le coup final, avec ses yeux tous ronds. Et puis on arrive à la conclusion que chaque bataille ne se fera pas sans tout donner. Non content d'être parfois durs à trouver, les géants sont de plus en plus beaux, mais aussi de plus en plus complexes. Arrivent alors des moments absolument dantesques, quand on a saisit quoi faire et que la chose se réalise, on se retrouve frissonnant entraîné par la musique de Kow Otani, une des plus belle OST que j'ai pu entendre de ma vie. Jusqu'à ce que l'on reproduise David contre Goliath, avec toujours la même issue. Ce retour dans le temple toujours plus peuplé au fil de nos barbaries que l'on a le temps de tourner dans sa tête lors du prochain voyage. Jusqu'à ce que la quête du colosse suivant prenne le pas sur les états d'âme du précédent.

Ses moments de vides, de rien, beaucoup ont put s'y ennuyer. Je dirais qu'ils sont en fait tout. Ce qui nous fait prendre conscience que tout se joue entre nous et ses grandes créatures. Créatures que l'on doit traquer et non que l'on doit fuir. Tout un symbole. Finalement Shadow of the Colossus est tout a fait ainsi, tellement simple, tellement complexe, tellement pauvre, tellement riche. Symbolique, épique phénoménal, comme chacun des combats que l'on provoque.

 

Pour finir partageons comme disait l'autre. Si je devais ne choisir qu'un combat, je pense que je choisirais le passage où l'on affronte une sorte d'aigle. Perché sur une poutre géante, cerné d'eau. C'est l'un de ceux où selon moi la mise en scène est la plus magistrale. Celui ci ne bouge pas. On siffle. On brandit son épée. Et puis finalement on décoche une flèche. Il fonce en piquet et on ressent le choc violent lorsque l'on s'accroche et qu'il nous emporte dans les airs. La bataille est rude, je suis tombé à de nombreuses reprises d'une hauteur incroyable dans l'eau, pour retenter ma chance après avoir regagner péniblement le petit bout de roche sur lequel on le défi...lorsqu'il est tombé dans l'eau, j'ai ressenti une vraie tristesse encore plus qu'un remord.

Et vous quel colosse vous a le plus marqué?