J'ai un peu mal à la tête ce matin. Ça revient de façon régulière. J'imagine que c'est ce qui arrive à toute personne qui prend une balle dans le lob temporal et qui n'en meurt pas. Ça et la perte partielle de mémoire. J'ai quelques souvenirs de mon enfance. Je me rappelle de la voix de Maman mais pas de son visage. Je crois que Papa est mort peu de temps après s'être engagé comme caravanier pour traverser le pays; il est tombé dans une embuscade de raiders...ou alors je confonds avec une histoire que j'ai entendu dans un bar. Ça ne m'étonnerait même pas.

Il y a peu de chose de mon passé dont je suis parfaitement sûre...mis à part mon nom ; je m'appelle Scarlett...Scarlett Johansson. Le Doc Mitchell m'a dit que c'était normal, que ça mettrait peut-être des mois à revenir, ou que peut-être ça ne reviendrait jamais. Il m'a dit que je devrais déjà être contente d'avoir encore mon visage d'ange. C'est vrai qu'il a fait un travail d'orfèvre. Non pas que la beauté soit toujours un avantage dans les wastelands, quand on pense aux rats qu'on peut bien y croiser ; m'enfin ça aurait été dommage de perdre cet atout qui m'a mine de rien sortie de pas mal de galère depuis mon réveil, et probablement aussi bien avant que je prenne une balle au dessus de l'œil.

Oui, je ne suis pas vraiment une goule. Maman disait que j'aurais pu être une star du cinéma comme on en faisait avant, si seulement l'ambiance avait encore été à cela. Je suis sûre que certains riches pervers me verrais bien dans des films, mais probablement pas ceux auxquels Maman pensait. Il fallait bien compenser ma faible constitution par quelque chose. Je sais tenir une arme et j'affectionne même les fusils -les armes de poing ou à laser ne me sied guère- mais quand il s'agit de résoudre un conflit, je préfère le charme, la discussion, les négociations ; et pour ce genre de résolution pacifique, ma "gueule d'ange" comme dit le Doc Mitchell, est une aide assez précieuse.

Entendons-nous bien, je ne suis pas une potiche. Négocier sans cervelle, même pour la plus belle des ladies, ce n'est pas recommandé. Dans les wastelands, particulièrement ici sur la côté Ouest, avec tous ces malades de camps différents qui ne luttent que pour un brin de pouvoir, si l'on veut survivre, il faut soit être fort, soit être en nombre, soit être malin et discret. Je suis assez frêle comme je l'ai déjà dit, je ne suis que rarement accompagnée -il n'y a que peu de personnes qui ont de bonnes intentions envers une jolie femme- si j'ai survécu jusqu'ici, c'est donc que je ne suis pas la dernière des idiotes et que s'il s'agit de traverser un bâtiment infesté de crétins armés jusqu'aux dents, je suis capable de le faire sans que l'un d'entre eux n'aperçoive ne serait-ce qu'un de mes cheveux blonds, le tout en piratant n'importe quel poste sur lequel je tombe.

Je suis en route pour Novac en ce moment. Je ne sais pas bien ce que je vais y faire, mais je trouverais sûrement. Je trouve toujours quelque chose à faire. J'aide quand je le peux et des gens à aider, on en trouve toujours. Je venais à peine d'être rafistolée et de me réveiller à Goodsprings qu'il a fallut que je tombe sur une conversation entre un poudrier et Trudy qui est ce qui se rapprocherait le plus d'un maire de cette ville. Enfin ville...j'ai remarqué que les habitants de la région utilise le mot ville de manière assez abusive. Trois tas de taules qui se battent en duel, pour moi ce n'est pas vraiment une ville. Quoi qu'il en soit, un jeune caravanier, un certain...c'est quoi son nom déjà. Je suis partie de Goodsprings depuis seulement trois semaines et j'ai déjà oublié son nom. Faut dire qu'il m'a piqué 50 capsules au jeu de Caravane alors que je ne connaissais pas les règles.

Bref n'étant pas rancunière pour un sou (ni pour 50) j'ai aidé ce type à se sortir de la panade. Pour faire simple, le poudrier qui s'était pris le bec avec Trudy était à la recherche de ce caravanier. Je dois bien admettre que l'idée d'aider plutôt les poudriers m'a effleuré l'esprit ; à la vue du nombre de ces ex-détenus avec qui j'ai du utiliser la négociation armée quand je suis arrivée à Primm, j'aurais peut-être du. Mais où en était-je ? Je n'arrive pas à me concentrer, avec ce mal de crâne.

Je lui ai dit de rester caché dans sa station service délabrée et que j'allais voir ce que je pouvais faire. A deux on se serait fait massacré sans aucun doute. Je vise bien, très bien même, mais ma combinaison de l'abri 21 offerte gracieusement par le Doc n'est pas en kevlar. D'ailleurs je ne la porte plus trop. Quand je dois traverser les terres arides entre deux villes, je suis toujours équipée de mon armure en cuir. Armure est un bien grand mot ceci dit. Au moins, les balles ne me traversent pas directement et certaines morsures de fourmis ou geckos sont nettement moins dangereuses. Et puis j'ai ce foulard trouvé sur un cadavre à Primm. J'évite les insolations, j'ai déjà assez à faire avec les problèmes d'eau et de nourriture. Pas moyens de boire ou manger sans s'intoxiquer d'une manière ou d'une autre. Mais pourquoi je parle de ça ? J'étais en train de parler de l'embuscade à Goodsprings.

La première personne à qui j'ai pensé pour m'aider à défendre le pauvre caravanier...RINGO ! Il s'appelle Ringo !

Enfin...la première personne à qui j'ai pensé pour m'aider à défendre Ringo, c'est Sunny. Cette femme est beaucoup plus capable que moi de survivre. Si j'ai tenu jusqu'ici -je suis à la Station Ranger Charlie- c'est en partie grâce à elle. Elle m'a remis le pied à l'étrier. J'étais courrier avant pas mercenaire. Elle m'a donc donné un fusil à vermine ; ce truc n'a l'air de rien, mais je l'ai tellement rafistolé que je pourrais mettre une balle dans les mandibules d'une mante à 200 mètres. Elle m'a également montré grossièrement comment faire sa tambouille. C'est donc sans surprise qu'elle a accepté de se joindre à moi sans condition.

Sunny comme moi n'envisageait pas vraiment qu'on puisse battre une bande de poudriers -qui au passage se nomment ainsi parce qu'ils utilisent de la dynamite pour se faire comprendre- si on les affrontait à trois. Connaissant le poids certain de l'avis de Trudy sur les paysans du coin, elle m'a conseillé d'aller la voir. Cette dernière était loin d'être enchantée par l'idée de se mettre les crapules à dos pour quelqu'un qui finalement n'appartenait pas à Goodsprings. J'ai su la convaincre en lui expliquant qu'étant les attaqués, il nous serait aisé de leur tendre une bonne vieille embuscade. Avec elle acquise à notre cause, on avait déjà de quoi faire le poids. Je me suis juste assuré que le vendeur du village, cet espèce de rapace, comprenne bien que la survie des habitants étaient dans ses intérêts pour qu'il nous fournisse des armures en cuir...Tiens, c'est d'ailleurs là que j'ai obtenu celle que je porte actuellement. Il me tarde d'arriver à Novac pour que je puisse remettre des vêtements plus élégants pendant quelques temps.

Quand j'eus rassemblé tout le monde, je me suis empressé de prévenir Ringo que l'on allait se battre à ses côtés. A peine sortions-nous de la station délabrée, que six poudriers entraient en ville. On était bien préparé. Un peu juste côté organisation, mais à part quelques balles dans les gigots, on en est tous ressortis vivants. On ne peut pas en dire de même pour les poudriers. Celui qui était venu pousser une gueulante dans le bar de Trudy s'est fait arraché la jambe par un tir de 357 Magnum. Les autres sont tombés sous une pluie de balles et le dernier a même eu le droit à une décapitation en bonne et due forme. 75% de chance de le tuer ; c'était ce qu'indiquait mon VATS. Ce bijou fait des merveilles.

Le Doc m'a donné son ancien PipBoy-3000. Il avait l'air de penser que ça me serait vaguement utile. Ça m'a sauvé la mise plus d'une fois. Ne serait-ce qu'avec tout le bardas que je transporte ; ce truc garde constamment en mémoire ce que je trimbale, mon nombre de capsules et a même un accès directe à mes fonctions vitales. C'est lourd certes, mais à part ça, ça n'a presque que des avantages. Je suis même surprise que personne n'est encore essayé de me le prendre...

Ma migraine s'est un peu calmée. Je pense pouvoir faire les deux ou trois derniers kilomètres qui me sépare de Novac sans m'évanouir. Par contre, il faudrait vraiment que je trouve un médecin sur place. Ma jambe me fait toujours mal depuis l'embuscade à la frontière de Nipton et si je compte marcher jusqu'à Vegas, il va falloir que je puisse tenir debout une journée entière sans avoir à faire des pauses dans tous les patelins du coin.

D'autant qu'au rythme où je vais, je me serais mis à dos toutes les factions de la région avant d'arriver et de mettre la main sur le charmant jeune homme en costume qui m'a laissé pour morte. Ce serait dommage...