Je me suis fait la réflexion il y a de
cela quelques podcasts (voir ma question au podcast courrier des
lecteur #02) du grand flou artistique et/ou mercantile que les
créateurs de jeux vidéo ont jeté sur les genres du média depuis
cette génération HD. En regardant de plus près les styles de jeux,
on a déjà pu remarqué la presque mort de la plateforme pure, qui
mise à part quelques fulgurances venues de son créateur moustachu
ou une expérience de DICE fort mal vendue, s'est désintégrée ou
plus précisément intégrée dans tous les genres, oubliant la
plateforme/aventure encore nombreuse sur la génération précédente,
notamment avec les Sly, Ratchet&Clank et bien sûr Jak&Daxter.
Dans le même ordre d'idée, j'ai cru remarquer que lessurvival/horror disparaissent eux aussi au profit d'une action plus
soutenue; la langueur glauque des râles Pyramidesque ne ferait-elle
plus effet?

Encore qu'il faille nuancer la remarque
sur le survival/horror qui parfois s'en sort avec des Condemned, Dead
Space
(très bourrin tout de même) et Silent Hill qui survivent plus
qu'ils n'effraient, je suis en revanche catégorique sur un point:cette génération de consoles a tué l'infiltration. C'est notamment
en lisant un article assez fourni dans IG Mag #09 concernant le genre
aujourd'hui même que cette triste réflexion m'est revenue.

"Tu es mort mais tu ne le sais pas encore." Une phrase qu'on ne dira plus à l'avenir?

L'infiltration est un genre dont je
vous passerais la naissance pour m'intéresser à son épanouissement.
Quand on y regarde de près, la démocratisation du genre est arrivée
avec le célèbre Metal Gear Solid. Le premier épisode en 3D de la
saga de Kojima n'est certes pas le premier du genre (ne serait-ce
qu'en comptant les opus MSX, on voit très bien que non) mais il a
été l'un des tout premier à donner la notion d'infiltration en 3D,
avec beaucoup d'observation et plus de prises de risques du au simple
fait qu'on ne peut pas regarder partout à la fois en 3D, chose qui
est très possible sur un screen en 2D. C'est là que je vais
invoquer la sage parole d'un certain Chocapic qui lors d'une
présentation de Splinter Cell Conviction dans une émission de jeux (si tu vois
de quoi je veux dire) mettait en avant les mots « Prises de
Risques »
. L'infiltration c'est une prise de risque.

C'est un genre qui est basé sur le
rapport entre la dangerosité des ennemis et la faiblesse en
comparaison de notre personnage
. Cela ne veut pas dire que celui
qu'on incarne est une chiffe molle. D'ailleurs si l'on regarde les
héros porteurs du genre, il s'agit de ninjas, militaires sur-armés
et sur-entraînés, de tueurs à gage ou assassins au sang froid
remarquable
. Mais le point commun entre tous ces personnages si
blindés soient-ils, c'est leur faiblesse au regard du nombre et/ou
de la force de l'ennemi qui oblige sinon à le contourner, au moins à
l'abattre sans rameuter tous ses collègues. De plus c'est un genre
qui contrairement à ce qu'on pourrait croire, appartient presque à une mouvance arcade ou seul compte la perfection de l'exécution de ce
qui est demandé. A mes yeux c'est cela qui rend ce genre si prenant
et qui par ailleurs le place en premier dans mes styles de jeux
préférés, c'est que l'intérêt vient du beau jeu, du role-play,
du fait de vouloir créer l'expérience autour du gameplay et de se
mettre ses propres défis.

Finir Splinter Cell Double Agent en tuant tout le monde à distance au sniper est très facile. Finir le même jeu sans toucher personne...c'est une autre paire de manches.

Depuis 1998, il y a eu cinq sagas qui
ont fait perdurer le genre jusqu'à la génération suivante. La
première c'est Tenchu: Stealth Assassin, suivie de près par MGS en
1998 sur PlayStation. En parallèle sur PC, c'était Thief qui
commaitait ses premiers crimes. Deux ans plus tard, c'est Code 47 qui
prenait les armes (silencieuses) sur PC toujours. Enfin en 2002,
c'est ma série fétiche qui voyait le jour, sortant de la pénombre
avec trois led vertes sur la tête, Splinter Cell sur Xbox.

Seulement cinq saga pour un seul genre,je ne devrais même pas m'étonner d'un tel essoufflement, mais en
vérité, le nombre de licence n'est pas à mettre en cause mais bien
l'élargissement du public. L'infiltration est un genre qui demande
de la patience, de la réflexion et comme je le disais plus haut un
sens de l'auto-motivation pour entrer pleinement dedans
. C'est
peut-être aussi le genre le plus et le moins scripté dans le même
temps. Pour faire simple, on est souvent dans l'observation de
patterns précis et on tente de se faufiler sans faire de vague.
C'est la prise de risque. Si on casse le pattern on provoque des
réactions diverses et parfois très surprenantes en fonction
notamment de comment l'IA est codée. C'est ce qui rend le genre si
passionnant et c'est ce qui me pousse systématiquement à passer des
heures pour finir une mission dans Splinter Cell et Tenchu sans
toucher personne. D'ailleurs il est à noter que c'est aussi un des
genres qui utilisent le plus l'intelligence du joueur et son
imagination
. Jouer à Himan: Blood Money et vous comprendrez ce qu'est la perfection du level design.

Probablement l'une des missions les mieux designées que j'ai pu voir.

Alors que reste-il de mon amour?
L'infiltration n'est pas complètement décédée. Elle s'est muées
comme la plateforme pour intégrer des jeux qui n'ont pas pour but de
créer du puzzle-game en tenue furtive. Le constat est simple,l'infiltration, la vraie n'existe plus, sauf si Thief 4 revient en
puissance et que IO Interactive se sort les doigts de son délicat
fondement. Sur la génération de consoles précédente, nous avons
eu deux Metal Gear Solid (qui ne sont pas les meilleurs en terme
d'infiltration pur déjà) autant de Tenchu, trois Hitman, quatreSplinter Cell et un Thief. Surtout, à part les défauts techniques
qui peuvent rebuter dans la série de ninja, il s'agit d'excellents
jeux au minimum et de jeux cultes pour certains
comme MGS2 et 3,Splinter Cell et Splinter Cell: Chaos Theory et Hitman: Blood Money.
Ça nous fait donc douze titres qui valent largement d'être joués,
et qui ont tous forcément une rejouabilité à la hauteur du défi
de les finir sans jamais être repéré.

Si je compte cette fois ci les titres
purement infiltration de la génération Xbox360 et PlayStation3, il
y a eu deux Splinter Cell. Le premier est Double Agent qui est une
version différente de celle de la génération précédente, mais
qui est sorti il y a un moment déjà. Le second est Splinter Cell:
Conviction
, un titre certes pas aussi brute qu'il en à l'air
(courir, c'est courir à sa perte) mais qui néanmoins est beaucoup
moins profond que ses prédécesseurs sur l'infiltration. Preuve en
est certain moment où l'on est obligé d'être exposé s'il on veut
continuer d'avancer dans le scénario, une première dans la série.Hitman n'a connu qu'un volet, le fantastique Blood Money qui à
l'heure actuelle demeure dans mon top personnel de mes jeux les plus
marquants. Seulement ce volet est identique à la versionPlayStation2 et Xbox et n'a à son avantage que de plus beaux
graphismes. Metal Gear Solid ne s'est aussi installé qu'une fois sur
console de salon (puisque la PSP a pris le relai). Guns of the
Patriots
devient d'ailleurs l'épisode le plus jouable et le plus
agréable à prendre en main. En contrepartie c'est celui où le
gameplay ne vaut pas un clou si on décide de la jouer Rambo, la
faute à une possibilité idiote d'acheter des munitions n'importe
quand.

Pour le reste on attend toujours. Mon
constat fait donc état de cinq jeux en comptant
l'action/infiltration de Conviction et en ajoutant un peu au
chausse-pied le récent Alpha Protocol qui donne une large part à de
l'infiltration relativement efficace si on fait beaucoup d'efforts
d'abstraction; en sachant également que ce dernier est blindé de
Boss qui représentent des piques de difficulté pour quiconque
jouerait l'infiltration, ce qui est très dommage. Que puis-je donc
faire pour étancher ma soif de stealth kill?
Rejouer sans cesse aux
jeux que j'ai maîtrisé de bout en bout? Ou chercher vainement la
perle rare dans l'avenir du jeu vidéo? J'attends toujours les messiesHitman 6 et Deus Ex Human Revolution qui promettent de laisser la part
belle à l'infiltration pour quiconque voudra l'exploiter. Cela mis à
part et bien je me vois obliger de picorer cette friandise que j'aime
tant dans des jeux qui la noie sous une tone d'autre mécaniques,
souvent à son détriment.

Assassin's Creed n'est pas un jeu
d'infiltration et n'en a jamais eu la prétention. A son sujet, je
parlerais plus de jeu de discrétion, puisque finir une mission sans
éveiller le moindre soupçon est d'une difficulté extrême et trop
pleine d'imprévue idiot (la foule qui bouscule, un garde qui
s'énerve sans raison etc...) mais surtout, une fois repéré il n'y a pas de vraie sanction; on joue un peu de son épée et on est de nouveau tranquile. The Saboteur a tenté quelque chose,
le mélange entre Assassin's Creed, Hitman et GTA le tout saupoudré
d'une ambiance de Seconde Guerre Mondiale en plein Paris pour
touriste, frivole à souhait. Far Cry 2 a également mélangé un
aspect infiltration dans son gameplay FPS bac-à-sable, du moins il
laisse entendre que cette voie est viable. En vérité, pour le
denier jeu de Pandemic comme la fausse suite d'Ubisoft,
l'infiltration ne se fait qu'au prix d'énorme frustration, la faute
à l'IA trop aléatoire et pensée pour l'action.

Ceci tendrait à montrer que mélanger
de l'infiltration et la furtivité avec autre chose fait des grumeaux
en général du moins pour la personne qui se voudra discrète.
Heureusement il existe de talentueux développeurs qui, s'ils ne
satisfont pas pleinement mes envies du genre, ont le mérite de faire
des mélanges parfait. Je pense à deux scènes assez courtes deMafia II par exemple qui sont plutôt bien vue et bien venue pour
changer le rythme (je trouve ce jeu excellent d'un point de vue
variété), à une ou deux scènes de Uncharted 2 assez corrects,
mais surtout je pense au meilleur super-héros de tous les temps.Batman: Arkham Azylum est probablement LE seul jeu au monde qui mêle
à la perfection de l'infiltration pure, avec sanction immédiate
suite à une mauvaise prise de risque et de l'action beat them allavec un système de combat excellent.

Je ne veux pas faire mon le vieux
grincheux (encore une fois à la vingtaine à peine passée ça me
ferait mal) mais le genre infiltration est en train de mourir. La
faute à une simplification du gameplay
, tourné vers l'immédiateté
plutôt que la réflexion et la patience. La faute aussi au
melting-pot de genres
qui affectent plus facilement les mécaniques
gameplay infiltration qui se reposent sur de l'IA et des level-designcréés pour. Seul quelques titres précis de temps à autres et surtout désormais les RPG-occidentaux parviennent à donner envie de se cacher plutôt que d'attaquer de front. Alors je suis assez triste de constater cela. J'espère
surtout que les ténors du genre reviendront pour un baroud d'honneur
et surtout que cette génération qui est pourtant sans conteste ma
préférée de toutes celles que j'ai joué, ne tuera pas d'autres
genre comme le survival/horror aujourd'hui trop impressionnant pour
ménager son horreur...Car pour ceux qui ne comprendraient pourquoi
je râle, il y a entre Splinter Chaos Theory et Splinter Cell
Conviction
, le même fossé qu'entre Silent Hill 2 et Silent Hill
Homecoming
. Pas en terme de qualité mais d'esprit. On sent que l'esprit veux y être mais, la magie n'opère
pas...