On ne souligne pas suffisamment, à mon goût, l’importance de la composante sociale du jeu vidéo, dans la presse de nos jours. En même temps, je ne sais pas pourquoi je m’étonne. Il est rare qu’il transparaisse autre chose que « le meurtrier jouait aux jeux vidéo, ce qui, chacun le sait, est, sinon une cause probable, au moins un facteur aggravant » au sujet de notre cher divertissement dans les médias de ce pays comme des autres, les Etats-Unis étant des professionnels de la chose.

Petit retour en arrière, 1999 et la terrible tuerie de l’école de Columbine. Deux étudiants, bardés d’armes, provoquent la psychose en parcourant les couloirs de leur école, assassinant  15 personnes et en blessant une vingtaine d’autres. C’est la première qu’une telle vague de violence se déchaîne sur un campus américain, et hélas loin d’être la dernière.

Rappel pour les néophytes, les années 90 sont considérées comme la réelle naissance du FPS tel qu’on le connaît aujourd’hui, avec l’apparition de titres devenus légendaires, tels que Quake, Unreal Tournament, Doom et, à la fin de la décennie, Half Life. Toujours pour les néophytes, ces jeux vidéo ou en ligne, par leur nature de First Person Shooters, consistent à arpenter des niveaux plus ou moins linéaires en faisant feu sur tout ce qui bouge depuis une perspective subjective, le tout dans des fontaines de sang… Et le rapport de police indique que les deux tireurs jouaient régulièrement à Doom.

Il a suffi de ça pour que les médias de l’époque, se vautrant grossièrement dans le sensationnalisme  (on est aux Etats-Unis après tout, rien de surprenant), se saisissent de l’affaire avec le recul qu’on peut espérer dans ce contexte, et reprochent aux jeux vidéo d’être le mal incarné, l’outil de Satan et le vecteur de toute la violence du monde. Il suffit de jeter un ½il à une capture d’écran du premier Doom pour voir que la violence s’y résume à quelques pixels rouges au milieu de la masse informe qui passait pour des graphismes à l’époque…

Loin de se dissiper avec le temps, ce genre de controverse ne fait qu’empirer à chaque tragédie, et ce malgré l’avènement des jeux en ligne plus « familiaux », à défaut d’un meilleur mot, où même les scènes de combat restent colorées et très sobres. Qu’on ne vienne pas me dire que Farmerama ou Rising Cities peuvent être une cause probable de pulsions meurtrières…