Qui aurait pu croire que l'un des volets les plus marquants de la franchise Final Fantasy fut développé en seulement un an ? C'est d'autant plus étonnant que Final Fantasy VI incarne à lui seul l'épisode du renouveau du rpg, mais il se signal également comme la fin d'un glorieux chapitre entre Nintendo et Square. Cette fois, le rôle de réalisateur d'Hironobu Sakaguchi s'efface au profit d'Yoshinori Kitase et Hiroyuki Ito. Les deux créatifs avaient l'ambition de bousculer la routine scénaristique par le contrôle alterné de 14 personnages : "veiller au maintien d'un équilibre délicat entre tous les personnages est probablement ce qui a représenté le plus grand défi" confirme Kitase lors d'une interview accordée à Edge.
 
Cependant, il reconnaît quelques ratés dans l'écriture de certains personnages : "en regardant en arrière, je remarque que j'ai un peu brisé cette cohésion. À l'exemple de ces scènes dans lesquelles les personnages (non jouables) Celes et Kefka prenaient de l'importance et devenaient de plus en plus influents" alors qu'à l'origine, ces deux protagonistes ne devaient endosser que des rôles secondaires. Autre écueil à surmonter, les limitations techniques de la SNES. À chaque épisode, les ambitions graphiques de Square s'élevaient. L'éditeur se sentait de plus en plus étroit sur la console vedette de Nintendo. La gestion de la mémoire était pointée du doigt.
 
 
Pour la première fois, les sprites étaient dessinés en haute résolution et les animations des personnages étaient suffisamment détaillées pour non plus deviner, mais constater des états émotionnels. Comble du caprice de l'éditeur star, le mode 7 de la SNES était utilisé dans l'affichage de la carte du monde de FFVI. Bien que le développement de cet opus avait respecté le délai de production et les exigences budgétaires de Squaresoft, une crise ouverte était née des pesantes contraintes techniques : "la capacité de la cartouche était tellement sommaire" se souvient Kitase. À cela s'ajoutait la politique de moralisation éditoriale effrénée de NoA.
 
La version internationale de l'épisode VI (III en Occident) subissait également les foudres de la censure du fabricant. Tous les aspects volages, religieux, politiques furent modifiés. La dramaturgie très sombre du scénario (référence à la mort, violence verbale) avait ruiné ses effets larmoyants.
 
Quand bien même, le succès international de FFVI donna des ailes à Squaresoft. Devenu un solide empire financier, l'éditeur monnaya au prix fort la prolongation de l'exclusivité de la franchise Final Fantasy avant de claquer la porte au nez de Nintendo. Cet épisode concluait à la fois une époque faste pour les deux géants tout en ouvrant une période glacière qui fit le bonheur de Sony.