Souverain sur son marché domestique, Atari ne pouvait ignorer le Japon. Entre 1981 et 1983, ce territoire vierge de concurrents sérieux était surtout dominé par des consoles bon marché ou des produits d'importation hors de prix. Alors que Nintendo pataugeait avec sa gamme de Color TV, l'Epoch Tv Game avait pignon sur rue. Un bien piètre adversaire face au défi technologique que représentait l'Atari 2600. L'état-major américain décida de légèrement toiletter  sa console vedette avant de partir à la conquête de l'archipel. La machine sera rebaptisée Atari 2800 et s'habillera d'une coque inspirée de la 5200. Un excès de confiance qui lui coûtera cher.
 
 
La firme américaine pensait partir en terrain conquis. Son concept de plate-forme aux jeux interchangeables était révolutionnaire à cette époque. Pour les décideurs, cet avantage concurrentiel sera suffisant pour renverser tout prétendant, et ce malgré le vieillissement de la console (techniquement, elle n'a pas bougé depuis 1977). À l'automne 1983, le rouleau compresseur marketing se met en place et inonde les téléviseurs des foyers japonais. La société ignore royalement Nintendo et Sega dont la capacité de nuisance commerciale est considérée comme négligeable, en dépit du gouffre technique existant entre une NES et une 2800. Le catalogue de jeux vidéo constitué de plus de 400 titres submergera toute velléité concurrentielle, croyait-on naïvement au sein des hautes sphères décisionnelles d'Atari.
 
En réalité, Atari était pris à la gorge. Il lui fallait rapidement trouver un indispensable relai de croissance après la violence inouïe de l'implosion du marché nord-américain. Cette précipitation scellera le sort de la 2800. Avec seulement neuf titres lancés en 1983, la NES balaiera d'un revers de main l'offre pléthorique de la console d'Atari (30 jeux au lancement). Sega et son SG-1000 se cantonneront au rôle de figurant. Techniquement surclassé par la concurrence, et plombé par un surcoût de 10 000 yens (environ 100$/76€) par rapport à la NES, Atari se débat avec les détaillants noyés dans un océan d'invendus.
 
Une comparaison assassine
 
Cette conquête prend les allures de désillusions. L'accident industriel reste néanmoins absorbable pour le géant américain qui tentera de revitaliser son marché domestique cliniquement mort avec d'autres machines à plus forte puissance, mais sans succès notable. Ironie du sort, c'est avec la NES que le marché le plus dynamique au monde retrouvera des couleurs au grand dam d'Atari, furieux d'être relégué à un rôle figuratif dans son propre fief.