Gunpei Yokoi était convaincu de sa réussite commerciale, une petite équipe d’expatriés britanniques beaucoup moins. Pas étonnant, ces derniers étaient en compétition avec le petit protégé de Yamauchi, président de Nintendo jusqu’en 2002. L’objet de la dispute ? Un projet de console montée sur casque. Ca vous rappelle rien ?

 

L’histoire a retenu l’échec retentissant du Virtual Boy, pas l’enchainement de mauvaises décisions qui a programmé ce fiasco industriel et écarté un concept prometteur appelé Super Visor. Derrière ce nom de code (super) ronflant se cache Jez San, un talentueux et ambitieux ingénieur à la tête d’Argonaut Software, studio britannique qui a propulsé la SNES dans la troisième dimension. For de cette prouesse technologique, de nouveaux projets sont soumis à l’état-major japonais.

 

Dans les arrière-cuisines de Nintendo, Gunpei Yokoi caresse le rêve de détrôner le téléviseur roi en faveur d’un écosystème en devenir. La technologie naissante de la réalité virtuelle aide le self made man à conceptualiser un dispositif monté sur trépied capable d’afficher des images en relief dans un mode rudimentaire. En dépit de faiblesses évidentes, le VB est préféré à celui de Jez San : « Nous l’appelions Virtual Dog, ce projet était tellement mauvais, s’étrangle encore le fondateur d’Argonaut. Yokoi s’était lancé dans une mauvaise direction ».

 

D’après lui, son concept n’était pas en cause. « C’était comme le casque Vive mais fabriqué 20 ans plus tôt (…) nous proposions la couleur et le head tracking, ce que personne d’autre ne présentait ». L’origine de leur échec à faire valoir la supériorité de leur système provenait davantage du manque d’ancrage de son équipe avec l'état major de Nintendo. Cette erreur stratégique est d’autant plus rageante qu’en plus d’avoir tuer dans l’œuf un prototype « quasi fini », Jez se persuade d’avoir été un pionner, « les jeux en réalité virtuelle aurait pu démarrer il y a vingt ans si Nintendo nous avait écouté ».