Avant de devenir le versant occidental de l'infiltration, le premier volet de la série des Splinter Cell a traversé maints passages mouvementés qui ont failli avoir raison de lui.
 
À l'origine l'équipe de développement travaillait depuis 2001 sur un jeu de tir rétrofuturiste appelé The Drift. Les bases de ce qui allait devenir le pendant de Metal Gear Solid étaient déjà posées : modes de vision multiples, armements modulaires. Toutefois, il manquait à ce titre un supplément d'âme que l'équipe inexpérimentée et dépassée par son propre projet était incapable d'imprimer. Dans une tentative désespérée de sauver du placard ce canevas mal engagé, la connotation espionnage high-tech de la licence James Bond possédait toutes les qualités pour relancer l'équipe.
 
C'est ce que révèle dans les colonnes du site IGN.com Yannis Mallat, PDG de la prolifique filiale Ubisoft Montréal. "Le propriétaire de la licence James Bond était insatisfait" de la démo présentée, scellant définitivement le sort de ce projet. Jusqu'à ce que la licence chèrement acquise Tom Clancy (60 millions d'euros) poussa l'éditeur français à mettre le nez dans le passif des prototypes de jeu non-retenues afin de la rentabiliser. Certains de leurs aspects pouvaient en effet cadrer avec l'univers d'anticipation géopolitique décrit dans les romans à succès de l'auteur américain. Pour le designer Nathan Wolf qui a déterré le projet, la démo James Bond possédait de manière embryonnaire ces éléments narratifs recherchés. Le créatif ajouta les éléments clefs du parfait espion américain (caméra miniature, combat à distance et furtivité) afin de convaincre le numéro 3 mondial de l'édition. Une formalité, la direction d'Ubisoft somma Nathan Wolf de réaliser un titre repris du livre La somme de toutes les peurs... Avec une grande idée en tête. Détrôner MGS 2 dans l'esprit des joueurs.
 
 
Tout heureuse de relever ce grand challenge, l'équipe reconstituée à cette occasion prit le risque de s'éloigner des canons si chers à Tom Clancy pour n'en conserver que l'esprit. Le champ créatif ainsi libéré du carcan patriotique et propre sur lui donne lieu à une lecture moins manichéenne du monde de l'espionnage : "nous nous sommes interrogés sur l'implication d'une cellule dissidente au sein de la NSA chargée de faire le sale boulot autrement que par des moyens conventionnels".  De ce questionnement, Splinter Cell voit le jour. Cette franchise pèse maintenant 22 millions de titres vendus.