J'imagine la tête de mes deux associés lorsqu'ils liront ces quelques lignes... "Le salaud !", s'exclameront-ils, à coup sûr. Et oui, pendant que l'un devait être plongé dans ses traductions, et l'autres, englué dans les corrections de Pix'n Love, onzième du nom, moi, je suis allé au cinéma ! Je veux pas non plus trop culpabiliser... C'était samedi soir ! Il fut un temps où, jamais, travailler un samedi soir aurait été concevable... Lorsque mes parents ont déboulé hier soir, en nous fourguant dans la pogne un bifton bleu et nous disant : "On garde les petits, allez voir Avatar, c'est un ordre parental", je n'ai pas osé contrarier leur propos. 

Et grand bien nous en a pris, à ma moitié et moi ! Aussitôt dit, aussitôt cassos direction le ciné. Lunettes 3D sur le nez, la main plongée dans un saut (que dis-je, un baril !) de pop-corn, le générique commence. 3 heures ? Promis, je ne les ai pas vues passer. On m'aurait dit "1h30", je n'aurais pas été étonné. Bien sûr, tout le monde en parle, et moi, j'étais encore dans le vent. Et du coup, j'avais fait la sourde oreille dès que fusaient un propos, une critique, un commentaire... Pendant 3 heures, j'ai été un gamin. Un enfant, scotché dans son fauteuil, la bouche béante... bercé par une histoire extraordinaire, des images merveilleuses... Incroyable... Une expérience inédite. Le générique de fin s'est limite avéré une souffrance mélancolique : "Quoi ? C'est déjà fini ? Arf !"...

La Forêt d'Emeraude

Je ne vais pas vous dire combien Avatar, de Cameron, est un film "génial" (le mot qui conviendrait le plus). La plupart d'entre vous le sait déjà. Je voudrais juste m'insurger contre certaines critiques que j'ai pues lire ici et là sur la platitude du scénario ! Qui oserait dire que "Mission" de Joffé est un peu con-con ? Que "Apocalypse Now" ou "La Ligne Rouge", c'est mignon ? L'histoire est la même, sauf que transposée sur une autre planète. Fable écologique, bien sûr. Mais ce serait réducteur : le propos est aussi de dire - ce qu'on sait tous déjà - que lorsque l'homo economicus débarque quelque part, il ne laisse que de la cendre sur son passage. Exploiter toutes les ressources, en faisant fi des autochtones, des richesses de la biodiversité ou simplement, la beauté naturelle : voilà le destin tragique de l'homme. La SF aime nommer l'humanité "le cancer de l'univers". Faut pas non plus exagérer. Mais lorsque certains viennent dire que ce film a un scénario un peu cul-cul la praline, je me sens mal à l'aise... Je ne me souviens plus du nombre de terrains de foot (en termes de surface) on déforeste par heure depuis des années dans l'Amazonie (la Forêt d'Émeraude, Boorman, 1985...). Je dis peut-être une connerie, mais je crois que c'est une vingtaine. Alors, bien sûr. Ça reste du cinéma, et là, je suis tranquille devant mon ordi avec du papier tout autour. C'est hypocrite. Mais à mon sens moins grave que de dire qu'un scénario qui traite de l'annihilation de la nature par l'homme, c'est un peu con-con...

© Séb