C'est fatigué que je fuis un court instant, un exposé peu intéressant, annonçant une nuit longue et douleureuse, pour vous parler d'un film vu il y a un petit moment, The Murderer. Deuxième long métrage de l'excellent réalisateur de The chaser à savoir Hong-jin Na. Nom que je ne vais pas écrire souvent dans cet article...

 

Deuxième long métrage donc, d'un réalisateur ayant plus ou moins suscité beaucoup d'intérêt lors de la sortie de son premier film. The Chaser nous narrait les mésaventures d'un proxenette en quête d'une de ses filles de joies manquant à l'appel. Le film réussissait à tisser une ambiance sombre et froide et nous plongeait subtilement dans une critique brutale de la police et de l'indifférence humaine face à la cruauté. Le tout prenant l'aspect du bon film noir à l'ancienne. 

Synopsis : 

Gu-Nam est un looser. Un bon vieux looser des familles même. Chauffeur de taxi le jour, claquant son blé la nuit dans les jeux, Gu-Nam ne mêne pas ce que l'on peut appeller une vie de rêve. Il est de plus criblé de dette auprés de types louches qui l'ont aidés à financer le passeport de sa femme pour partir en Corée. Car oui je ne l'ai pas précisé mais l'action se déroule à Yanji, une petite ville paumée entre la Corée du Nord et la Russie, un coin assez pauvre en gros. 

La vie de notre bon héros basculera le jour où il fera la rencontre de Myun, sorte de chef mafieux local, lui proposant un contrat. Tuer un homme en Corée, lui rapporter son doigt et toutes ses dettes seront épongées. Une affaire en or que notre bon Gu-Nam ne refusera pas. 

Cast et Réal : 

J'ai déjà un peu évoqué précedemment le réalisateur du film, je ne vais donc pas trop m'attarder sur lui. En fait non, je vais quand même m'attarder sur lui. Excellent réalisateur, il confirme encore une fois son talent. Captant avec brio les rues dégueulasses de Yanji ainsi que la froideur malsaine des nuits Coréenne. Preuve de son talent, le film sent bon le gros blockbuster Coréen mais sait rester intimiste tout du long. L'action ne prenant jamais le pas sur les personnages et leurs quêtes émotionnelles. Car de l'action il y en a. Et de la bonne action. De l'action Coréenne même. Et ça change tout. Alors que beaucoup de films insistent sur l'aspect très impréssionant des dites scènes, The Murderer joue la carte inverse. Au même titre que pouvait le faire The Chaser en son temps. Les affrontements sont brutaux mais terriblement humain.

Pour le Casting, on retrouve le duo de tête de The Chaser. Yun-Seok Kim et  Jung-Woo Ha. Deux puissants acteurs Coréens. L'un (Jung-Woo Ha), jouant avec brio le jeune immigré en quête d'identité au sein de cette grande Corée et l'autre (Yun-Seok Kim), illuminant le film en chef de clan brutal n'hésitant pas à se salir les mains quand il le faut. 

Une Critique sociale ( pas d'idée de titre désolé...) :

Un peu comme The Chaser, The Murderer continue dans la critique sociale initiée par le premier film du réalisateur. On retrouvera encore une fois un bon brulôt sur l'incompétence policière, celle-ci paraissant encore une fois comme incapable de réussir quoi que ce soit. Souvent en retard, toujours à la ramasse, incompétente jusque dans l'arrestation d'un simple suspect. Elle sera même tellement incompétente que le réalisateur l'occultera du film au bout d'un moment. On retrouve ce message d'une police ne comprenant pas le monde qui l'entoure, ne saisissant à aucun moment les enjeux ni la gravité d'une situation. 

Il en sera de même pour la vision du mal au sein du film. Le film opposera deux clans l'un à l'autre tout au long du film. L'un représentant la campagne, l'autre la ville. L'un semble jeune, prête à se salir les mains et à agir tandis que l'autre s'est profesionnalisé donnant l'impression de n'être au final qu'une organisation de bureaucrates. De par cette opposition le réalisateur nous proposera sa vision de l'être humain et de sa soif permanente de pouvoir. Une société où prime seulement le pouvoir personnel au détriment des autres. Une société où la vie d'un homme pèse bien peu quand de l'argent est en jeu. 

Impossible, à moins d'avoir beaucoup de mal, de ne pas voir aussi la dénonciation du réalisateur contre les conditions inhumaines que subissent tous ces gens tentant de travers illégalement la frontière entre leurs villes et la Corée. C'est avec beaucoup de froideur que le réalisateur nous décrira cette situation. Du transport en bus au voyage en bateau où les faibles meurent dans des cales jusqu'à l'ultime plongée dans l'eau pour rejoindre la Corée. 

C'est aussi par le biais de son héros que Hong-jin Na véhiculera plusieurs messages assez forts. L'identité sera le plus fort message du film. Car avant même d'être l'histoire d'un meurtre, de la quête d'homme pour sa femme, le film sera avant tout le parcours initiatique d'un homme vers son identité. L'affirmation d'un individu, la revendication d'une existence. En effet, tout au long du film notre héros ne sera appellé qu'une fois par son prénom, il sera référé le reste du temps par son statut d'immigré niant ainsi sa personnalité. De simple chauffeur de taxi, Gu-Nam deviendra Homme, refusant ce qu'on lui a trop longtemps imposé. Affirmant sa volonté à ne plus être consideré comme un outil à la merci des grands.

Le chapitrage du film renforce cette idée, celui-ci scindant le film en plusieurs parties. Chaque partie symbolisant le statut du héros tout au long du film. De Taxi Driver il passera à celui de Murderer puis d'immigré. Le héros se voit ainsi symbole des oubliés, des petits. 

Conclusion : 

The Murderer est noir, triste et violent. Mais The Murderer est aussi beau, touchant et terriblement intelligent. Maitrisé de bout en bout, possédant un admirable casting et une magnifique bande son, The Murderer est à l'image de The Chaser en son temps, à voir absolument. 

Allez, petit bémol pour les néophytes, le film peut paraitre assez long. Il ne l'est pas. Il est même trop court. Non mais...