A Numericity.fr, on aime bien les auteurs du jeu vidéo. Au delà
d'apporter une dimension humaine au jeu vidéo par l'apparition de
visages, ils ont une conception du média qui les pousse à poursuivre et
s'obstiner dans une voie. Plus que chercher à faire un bon jeu qui
correspond au très technique cahier des charges, l'auteur, souvent
entouré d'une équipe rapprochée, cherche à explorer un domaine qui
l'intéresse en utilisant les moyens que lui offre le média jeu vidéo et
en composant bon gré malgré avec les impératifs commerciaux. C'est
parfois réussi, parfois (beaucoup) moins, mais toujours ambitieux.

En regardant la première vidéo au sujet de Journey, le nouveau projet de Jenova Chen, le fondateur de thatgamecompany, donne cette impression. En effet, l'homme n'étant pas à son premier
coup d'essai, il est facile de voir dans ce dernier jeu la confirmation
d'une recherche particulière.

Cette idée motrice se trouve dans la l'atténuation, si ce n'est la
disparition des frontières « solides », ou peut-être même encore un jeu
sur celles-ci. Dans Cloud, nuage en Français, nous avons sans
doute là une première intention capitale du projet de Chen, à l'époque
encore étudiant. N'y a-t-il pas meilleur titre que celui-là, à savoir
que les nuages sont des entités finies mais dont leur forme,
c'est-à-dire leur « frontière » est indéfinissable ?
flOw, quant à lui, est l'exemple typique de la fluidité,
incarné dans le titre même. Au lieu de proposer différents niveaux
(level 1, level 2 etc.) qui forment donc des lignes claires, Jenova Chen préfère une progression fondue, douce. Le joueur dirige un organisme de base dans l'océan et doit grossir de plus en plus, évoluer. Tout
l'enjeu de flOw est de laisser le joueur évoluer dans un seul
grand niveau où la progression se manifeste par le changement des
couleurs ou l'apparition graduelle de nouveaux organismes.
Dans le jeu Flower, Jenova Chen ose placer dans les mains du
joueur un personnage principal inattendu, et lui aussi indéfinissable,
sans forme donc sans frontière : le vent. Se matérialisant par les
pétales de fleurs pris dans le sillage du vent, le joueur contrôle une
entité évolutive, comme flOw d'ailleurs, insaisissable.
Dans Journey, récemment dévoilé, nous pouvons déjà apercevoir les premières signes visibles et pour le coup « palpables » de cette
démarche. Se passant dans le désert, un espace perçu sans bord
d'ailleurs, s'étendant à perte de vue, nous pouvons apercevoir que la
chaleur floute les lignes des dunes, que le vent, de retour, agite les
étoffes. Surtout, celui-ci semble avoir une incidence sur le sol, fait
uniquement de sable, par définition non stable, non figé, mais au
contraire ondulant, mouvant, malléable...

 

Numerimaniac

Numericity.fr