Il y a quinze ans déjà, des analystes de tous horizons prêtaient à Electronic Arts des ambitions démesurées, à hauteur des constructeurs, tant sa puissance commerciale pesait sur la destinée de ces derniers. Avec la promesse d’un monde désintermédié, l’aspiration présumée de l’éditeur éclate enfin au grand jour avec son offre cloud gaming, chassant sur les terres de Microsoft, Google et Sony…

C’est tout modestement que le géant canadien présente sur son blog officiel la seconde étape de Project Atlas, appellation de la technologie maison sur laquelle s’appuie son service de jeux en nuage. Celui-ci s’est ouvert depuis lundi dernier au test public afin de tester la solidité des infrastructures réseaux ainsi que les moteurs de jeu développés en interne (Frosbite pour ne citer que lui).

« Notre objectif, à travers cet essai, est de collecter des informations sur les performances et la qualité de service de Project Atlas, ce dans diverses conditions techniques et selon plusieurs scénarios » , écrit Ken Moss, responsable ‘’technologie’’ au sein d’EA. Bien que les tests se limiteront au format PC, « nous travaillons aussi sur plusieurs autres dispositifs » glisse prudemment l’ingénieur. La neutralité du roi de l’édition est donc toute relative, puisque le périmètre des joueurs dévoués à ses jeux s’étend aux consoles de salon, afin d’être « au plus près des fans ».

Ce sont les poids lourds et dans des genres différents de son épais catalogue de titres tels que Fifa, Titanfall, NFS et Unravel que le géant canadien éprouvera son service de cloud gaming. Le jeu en vue subjective exigeant « une précision et une exactitude sans compromis » mettra à l’épreuve la solidité des infrastructures réseaux tandis qu’un jeu de plate-forme sera plus accommodant. Pour l’instant, seule la haute définition sera supportée, la 4k et le HDR sont deux normes encore élitistes pour la jeunesse de cette technologie.

L’accent sera mis sur « les interactions sociales » insiste Ken Moss. Quoi de mieux que le cross play pour fédérer les différents supports du marché autour d’un jeu : « c’est ce vers quoi nous travaillons ». Reste à dégager un modèle commercial lucratif et pérenne, c’est « encore trop tôt » reconnaît le technicien.

L’avènement du cloud gaming bouleverse le statut d’éditeur agnostique d’EA. Futur acteur majeur du jeu en nuage ? « EA a pris soin de préciser qu’il ne s’agissait pas d’une version bêta, réagit dans les colonnes de GD.Biz Candice Mudrick analyste en chef chez Newzoo. Cette hésitation peut indiquer que d’autres projets sont dans les tuyaux ou cela résulterait d'une incertitude face aux solutions concurrentes de Google, Microsoft et Sony ». Le géant de l’édition devra faire « preuve d’inventivité » en cas de lancement effectif de son service cloud : « ils pourraient favoriser temporairement Atlas en commercialisant Fifa avant Stadia, xCloud et PS Now ou se réserver des items exclusifs ».

L’addition de l’ensemble des offres cloud gaming pourrait aussi se révéler élevée pour le joueur. « De fortes réticences à payer pour plusieurs services qui se chevauchent » abonde l’analyste.

Avec plus de mille employés dévoués à l’offre d’EA, un vaste portefeuille de titres en service par abonnement (EA Origins, EA access…), l’éditeur dispose de fondamentaux décisifs. Mais le secteur n’échappera pas au phénomène de consolidation, certains acteurs devront se retirer de la course ou fusionner.