C'est un succès qu'on n'attendait guère: immuablement positionné parmi les meilleures ventes de jeux vidéo à sa sortie, Farming Simulator amène depuis plusieurs années le petit monde des exploitations agricoles dans le salon des joueurs PC. Ventes record à la clé pour cette drôle de simulation qui s'invite aujourd'hui sur Xbox 360 et PS3, sans doute par la perspective de nouvelles recettes alléchée. Reste à savoir si la récolte est vraiment de bonne qualité.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'abord est austère. Onze points de tutoriel assommants servent d'introduction brute de décoffrage à Farming Simulator 2013. L'on y découvre ce qui constitue, au moins en surface, les bases du gameplay de cette simulation de gestion d'exploitation agricole : la conduite de machines-outils. Du labour à la récolte, en passant par l'ensemençage et l'épandage d'engrais chimiques, c'est l'agriculture version intensive qui se décline dans les mécaniques de jeu. Conduire un tracteur, travailler des surfaces de terre pour optimiser leur production, utiliser des machines toujours plus performantes pour simplifier son travail... C'est dans le vacarme des moteurs surpuissants des engins que le joueur passe le plus clair de son temps.

Lassant, répétitif... et prenant ?

Autant dire que le titre promet d'emblée lassitude et répétition, au point d'embarquer ses deux défauts déjà dans son introduction. Conduire un engin, accomplir une tâche, changer de machine, reprendre le volant et s'acquitter de sa nouvelle mission : pour peu que l'on se cantonne à cette partie triviale du logiciel, peu de chances d'y rester scotché des heures durant. Et c'est un mystère qui s'impose alors, dans toute son évidence : qu'est-ce donc qui fait à ce point courir les foules, qui permet à Farming Simulator de jouer des coudes dans les charts avec les plus grandes licences, Call of Duty en tête ?

En fait, il faut se plonger quelques heures durant dans le concept pour en saisir toute l'astuce. Si son coeur bat pour les récoltes et les recettes qu'elles induisent, Farming Simulator fait reposer son intérêt sur son monde étonnamment vaste dans lequel une surprenante variété de petites tâches sont à accomplir, qui occupent bientôt le joueur au point de ne plus savoir où donner de la tête. Outre le travail des champs (heureusement automatisable en  embauchant un ouvrier), par exemple, surgissent très vite des petites missions annexes, invitant l'exploitant à rendre tel ou tel service à un habitant - en général, en effectuant une livraison ici ou là. La montée en puissance de la ferme se traduit également par la diversification des productions : betterave et pommes de terre viennent d'ailleurs cette année enrichir la riche liste des plantes cultivables, parmi lesquelles les très rentables maïs et colza, tandis que côté élevage ce sont les volailles et les moutons qui font leur apparition aux côtés des bovidés.

Et bien évidemment, la vie à la ferme n'est pas un long fleuve tranquille. Il faut savoir affronter les aléas de la nature, les champs qui fânent subitement pour une raison indéterminée - en général, un process de production qu'il faudra revoir, quitte à demander à un véritable exploitant agricole ce qui peut clocher. Il faut savoir s'y muer chef d'entreprise pour revendre sa production, acquérir de nouvelles machines au bon moment, investir dans de nouveaux champs au gré des mises en vente et des enchères. C'est ici que Farming Simulator construit sa profondeur, au point de faire référence pour de nombreux joueurs qui sont aussi agriculteurs.

Enfin, la chasse aux machines-outils, tracteurs et autres moissonneuses est un plus non négligeable. Plus d'une centaine de ces véhicules et équipements peuvent être acquis et constituent autant de petits trésors qu'un joueur accroc au concept se fera un devoir de collectionner. Que ces machines-outils soient si bien modélisées dans un environnement qui laisse par ailleurs un peu à désirer n'est pas un hasard : d'aucuns chassent les grandes marques de sportives quand d'autres n'ont d'yeux que pour des mécaniques qui s'épanouissent dans les grands espaces.

Psychanalyse d'un rêve d'enfant

Il est regrettable, certes, que la version consoles soit inférieure à la version PC, sortie voici presque une année. Réalisation famélique, abandon d'un mode coopératif à dix, impossibilité de profiter des "mods" mis au point par les passionnés... Cela fait tout de même beaucoup de défauts pour cette simulation qui, de surcroît, s'adresse à un public très ciblé. Reste que l'on fera bien, à l'occasion, de s'essayer malgré tout à la chose, qui peut séduire par son sujet autant que pour son jusqu'au-boutisme et son honnêteté. En dépit de des multiples carences du titre, il y a là un rêve d'enfant qui peut se concrétiser, celui de conduire un tracteur plutôt que de le pousser en simulant le bruit de son moteur d'un "broum broum" que tous les petits garçons ont un jour scandé...