Hello tous,

La nouvelle est tombée hier vers 20h30, et s'est répandue sur le web en quelques minutes : le nouvel album de Daft Punk, Random Access Memories, a finalement été leaké à quelques jours de sa sortie officielle, prévue le 20 mai. Des pirates ont donc réussi à mettre la main sur les pistes de l'abum et les ont rendues disponibles au téléchargement en fin de journée. Un vilain coup pour les Daft Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo, qui travaillaient depuis des années sur ce projet, mais la riposte s'organise : l'album devrait être mis en vente sur les plate-formes numériques d'ici qelques heures, les copies CD et platines ne devraient pas tarder. Pour contrer l'écoute illégale, l'album est également en accès libre sur iTunes depuis hier soir, et permet donc à ceux qui l'ont précommandé de profiter de la merveille comme les autres. Je vous rappelle ici qu'on parle de 9,90 euros en version numérique, il serait donc opportun de penser à verser son obole tant cet album est un monstre de musique comme on n'en avait plus entendu depuis une vingtaine d'années.

Le lien vers la page iTunes, pour ceux qui ne connaissent pas le chemin : https://itunes.apple.com/fr/album/random-access-memories/id617154241

Pour le reste, faisons bref, et simple. Random Access Memories avait déjà titillé les fans avec son premier titre révélé sur la place publique, Get Lucky. Le reste est du même acabit, si ce n'est plus ambitieux encore. Depuis Homework (1997) et Discovery (2001), les  Daft avaient quelque peu perdu de leur superbe, proposant notamment un Human After All incapable de transcender la musique électronique, qualité pourtant indissociable de la patte du duo frenchie. Cette fois, ce n'est plus la même musique - pardonnez le jeu de mots - : Random Access Memories est une orgie auditive, un moment de grâce nourri d'une culture musicale eighties pleine de bon goût et d'à propos, pétri de funk et de disco. Quel pied de réapprendre, en treize titres, que la musique n'est pas une orpheline, mais bien l'héritière d'une grande famille, les pieds dans la terre et les yeux tournés vers le ciel.

Car c'est de cela que parle Random Access Memories. L'album parle de nos racines, de notre creuset culturel commun, et nous enseigne à nouveau - nous en avions besoin - que construire sur les apports des glorieux anciens est la meilleure  manière de s'élever vers l'innovation, la créativité. Cette philosophie sous-tend tout le travail des Daft Punk sur cet album, et nourrit les choix instrumentaux aussi bien que les apports de quelques guests bien choisis. Pharell Williams et Niles Rodgers, guitariste de Michael Jackson et producteur de Madonna et Bowie, dans Get Lucky (et le non moins monumental Lose yourself to dance), mais aussi le légendaire Giorgio Moroder, alter-ego de Diana Ross et derrière la soundtrack de Midnight Express (Giorgio by Moroder, quel titre!). On apprécie la présence du producteur de house Todd Edwards et du cofondateur du très rock et très expérimental groupe Animal Collective, Noah Benjamin Lennox (connu aussi sous le nom de Panda Bear), pour Fragments of time et Doing it right, mais aussi celles du pianiste canadien Jason Beck (Within) et de Julian Casablancas, le chanteur de The Strokes (Instant Crush, qui devrait rapidement s'installer dans les charts tant l'écoute est addictive). Quant à Touch et Beyond, deux des morceaux les plus puissants de Random Access Memories, ils sont nourris de la voix du magicien Paul Williams, qui travailla dans les années 70 pour les Carpenters, Streisand, Bowie, les Monkeys... Influences country et folk au menu.

L'album est, enfin, nourri des riffs du guitariste Paul Jackson Jr, dont la carrière a suivi celle de Witney Houston, The Temptations ou Michael Jackson (tiens donc, encore...) Ceci explique cela : certains des titres renvoient directement vers les albums les plus discos du roi de la pop, nourris par l'électro toujours très léchée et jamais artificielle (sic!) de Bangalter et Homem-Christo.

Random Access Memories sait jouer des genres et des influences pour tracer son propre sillon. Guitare nerveuse, basse puissante, piano léger et mélancolique posés sur une électro ponctuée par une batterie jamais pesante. Le mélange incongru prend sans fausse note, et délivre un album d'une délicatesse extrême, dont on n'a pas fini d'apprécier toutes les subtilités. Certains titres s'y dégustent dès la première écoute, d'autres se révèlent avec un peu plus de patience, quelques-uns déçoivent (Contact, sans attaches) mais impossible d'en abandonner l'écoute sans fredonner quelques heures durant les vestiges de ce moment envoûtant. C'est un signe, assurément...