Hello tous,

Vous l'avez peut-être lu ici-même : depuis quelques semaines maintenant, je suis l'heureux propriétaire d'une borne d'arcade de modèle Sega Aero City. C'est un rêve de gosse qui devient réalité, car quoiqu'on en dise, quels que soient les progrès effectués par les consoles depuis les années 1990, rien ne remplace l'expérience d'un jeu vidéo pour lequel les plus grandes marques ont concentré tous leurs efforts en termes de programmation et de conception de hardware. Dans la borne d'arcade en effet, il n'y a guère plus qu'un écran, des câbles, une alimentation et du vide : le reste -l'essentiel en fait- c'est une carte mère, parfois associée à une cartouche ou un cd-rom, dont l'objet unique est de faire tourner le titre pour lequel elle a été conçue.

On a beau faire, rien ne surpasse ça. Les hardwares type XXX-in-one, compilations des plus grands titres arcade depuis les années 1980, ne parviennent d'ailleurs jamais à tenir la comparaison avec une PCB (printed circuit board) authentique. C'est logique : ces compilations tournent à partir d'émulateurs, fonctionnant sur une architecture PC non spécifique. Le résultat est donc invariablement décevant : glitches, baisse du framerate y sont monnaie courante. La communauté qui s'est constituée autour de ce type de retrogaming est ainsi unanime : les XXX-in-one ne constituent, au mieux, qu'un pis-aller...

Pour ma part, j'ai fait le choix d'éviter ces compilations - à l'exception de la cartouche 161-in-one rassemblant les MVS SNK (la Neo Geo, pour ceux qui auraient du mal à suivre), qui possède la spécificité de ne stocker que les ROM des jeux, le système étant abrité par le slot accueillant la cartouche. Depuis quelques semaines, je me suis donc mis en chasse de jeux pour alimenter ma passion. Bonne surprise à la clé : très souvent, les tarifs pratiqués au sein de la communauté de fans restent très corrects, et en tout cas franchement abordables. Depuis l'acquisition de la borne, j'ai ainsi pu trouver quelques perles:

- Street Fighter III Second Impact (CPS-3) pour 130 euros

- Jojo's Bizarre Adventure (CPS-3) pour 130 euros

- Toki (bootleg jamma) pour 70 euros, hélas grillé par mes soins en branchant la carte à l'envers sur le connecteur

- King of Dragons (CPS-1) pour 30 euros !

- Super Volleyball (jamma) pour 15 euros

- Final Fight (CPS-1) pour 129 euros. Oui, Final Fight, le vrai, l'unique. Mouillez-le de vos larmes ^^.

De cette collection balbutiante, j'ai aussi déjà pu apprendre que le monde du jamma est particulièrement vaste. Chaque éditeur a en effet ses spécificités, et nombre d'entre eux ont développé des architectures spécifiques pour simplifier la vie, à l'époque, des exploitants de salles de jeu. Un exemple : il est indéniablement plus aisé - et moins risqué - de changer un cartouche CPS-2 qu'une carte-mère jamma. Je m'explique : en 1993, Capcom met au point ce CPS-2 qui se divise en deux éléments distincts : le premier, la carte mère ou A-board, sert de support au deuxième, à savoir le jeu lui-même (ou B-board). D'autres feront de même. Sega avec son ST-V ou son Atomiswave, SNK avec l'Hyper Neo-Geo 64... Tout ceci pour dire qu'avant d'acheter un jeu, il convient d'abord de savoir sur quel support il fonctionne. Dans l'idéal, il s'agit d'une carte jamma simple. Dans le cas le plus frustrant, on a les CPS-3, dont le hardware de chaque jeu est à ce point spécifique qu'il nécessite quasiment systématiquement d'acheter l'ensemble complet pour pouvoir jouer.

Une fois que l'on sait cela, un dernier élément nécessite un peu de prudence : les écrans de bornes d'arcade ont tous une fréquence spécifique. La fréquence standard jamma, c'est le 15Khz. L'Aero City propose une double fréquence, le 15 et le 24khz. Je suis donc en mesure de faire tourner les jeux compatibles avec ces normes. Ce qui, heureusement, constitue la quasi intégralité de la production de jeux d'arcade dans les années 1980 et 1990. Mais cela ne m'empêche pas d'être prudent et de vérifier la compatibilité à chaque acquisition.

Un dernier truc auquel je suis attentif lors de mes emplettes : la présence ou non d'une pile suicide dans la carte de jeu. Les constructeurs, en effet, ont été vilains sur ce coup : pour empêcher leurs jeux d'avoir une durée de vie trop longue, certains d'entre eux ont ajouté une batterie à leurs PCB, ladite batterie ayant pour unique vocation de rendre la ROM inutilisable une fois épuisée (en général au bout de cinq ou six ans). C'est le cas de Capcom, surtout, avec ses standards CPS-2 et CPS-3. Heureusement, les CPS-2 peuvent aujourd'hui être "phoenixés" (rendus insensibles à l'extinction de la batterie) et les CPS-3, depuis peu, sont pour certains récupérables même après le "suicide". C'est le cas de ma PCB de SFIII Second Impact. Je respire...

Si vous été attentifs, vous avez également sans doute lu que j'ai réussi à cramer une de mes PCB. Je mets ça sur le compte de la fatigue autant que de l'inexpérience : il faut savoir que brancher une PCB à l'envers, sur un connecteur jamma, c'est avoir de fortes chances de griller le jeu, purement et simplement. Une règle donc pour tous ceux qui voudraient se lancer dans l'aventure : la partie imprimée du connecteur jamma se branche TOUJOURS côté composants de la PCB. A défaut de respecter cette règle, la sanction est en général immédiate : elle peut aller de la perte de l'un ou l'autre bouton au non fonctionnement pur et simple de la carte. Ceci pour une raison toute bête : en branchant le connecteur à l'envers, l'on envoie du courant 12V dans un circuit destiné à n'en admettre que 5. Evidemment, tout saute. Et suppose de changer les diodes ou les résistances qui servent de tampons avant les processeurs de la carte. J'en suis actuellement à ce stade de mes investigations, l'utilisation du multimètre m'attend. Toki sera mien, je n'ai pas dit mon dernier mot.

Je m'adresse, pour finir, à tous ceux que l'aventure du jamma pourrait tenter: à force de fréquenter les sites et forums spécialisés, j'ai pu constater que le ticket d'entrée dans cet univers pouvait être tout à fait modéré. Les premières bornes complètes et fonctionnelles, en général avec écran 21 pouces, se trouvent à partir de 150 euros. De vieux modèles dont il s'agira simplement de vérifier de visu le bon fonctionnement et, surtout, l'état de l'écran : à force de rester allumés des journées entières, ceux-ci présentent parfois des défauts plus ou moins prononcés, comme une faible luminosité (toujours vérifier le potard de luminosité et s'assurer qu'il n'est pas poussé à fond) ou la présence d'ombres persistantes, souvent les mots "insert coin" -on dit alors que ces écrans sont 'marqués". Soyons clairs : la qualité de l'écran est primordiale, d'autant qu'il devient de plus en plus difficile de le remplacer.

Sur ce, je retourne faire une petite partie de Street III 2nd Impact, en résidence en ce moment sur ma borne. Rien à voir avec les conversions proposées sur consoles...