Hello tous,

Depuis vendredi soir, Strasbourg vit et vibre au rythme du FEFFS 2012, dont c'est déjà la cinquième édition.Comme chaque année, pendant un peu plus d'une semaine, c'est l'occasion d'y faire le plein de sensations fortes puisque l'épouvante, l'horreur, le fantastique - et la poésie parfois aussi - sont ici à l'honneur. Et je compte bien vous faire partager mes coups de coeur et coups de gueule au retour des séances, une fois la nuit bien avancée...

L'ouverture du festival s'est tenue vendredi soir, avec la projection de Robot and Frank. Les aléas de mon taf ont fait que je n'ai pas pu m'y rendre. En revanche, je me suis précipité à la véritable soirée de lancement, voici quelques heures maintenant. Pas moins de trois longs métrages y ont été présentés. Et pas des moindres: Outre Eddie the sleepwalking cannibal figuraient Maniac, le remake du film culte de William Lustig, et V/H/S, la dernière sensation du festival de Sundance. Autant vous dire que je frétillais de plaisir en entrant dans la salle...

Pour être franc, la soirée a un peu soufflé le chaud et le froid. Commençons donc par le seul film en compétition de la soirée, Eddie the sleepwalking cannibal. Boris Rodriguez a tourné la pelloche au Canada et s'offre ici son premier véritable long métrage. Et c'est un joli coup d'essai : cette histoire d'artiste en panne d'inspiration qui trouve l'électrocho qu'il lui faut en croisant la route... d'un cannibale somnambule a tout d'un très joli exercice de style maniant avec un talent rare l'humour noir et le cynisme le plus désabusé. Rodriguez  part d'un postulat certes peu surprenant -la démarche artistique puise sa source dans la douleur-, mais ceci pour déployer avec un mauvais esprit assez salutaire les fils d'une intrigue  qui se joue résolument de la morale traditionnelle et mystifie le spectateur en l'amenant à se prendre d'affection pour la figure même de  la violence, instrumentalisée, que constitue le pauvre Eddie. On rit souvent, on sourit beaucoup, on réfléchit même un peu face aux attaques en règle portées par l'oeuvre à l'univers très particulier que constitue le marché de l'art et sa logique mercantile. Le tout en baignant dans des centaines de litres d'hémoglobine et en s'offrant des démembrements assez spectaculaires à l'écran. Pas un chef-d'oeuvre -le film présente quelques problèmes de rythme et souffre d'une insuffisante exposition des motivations de son personnage principal, mais indéniablement une pelloche qui vaut le coup d'oeil. Très, très recommandable.

Le coup de coeur de la soirée, en revanche, c'est indéniablement Maniac. Réalisé par Frank Khalfoun, ce remake du cultissime Maniac de William Lustig est produit par un certain... Alexandre Aja (Haute tension, La colline a des yeux, Piranha 3D), dont on reconnaît indéniablement la patte. Sans concession, sur le fil du rasoir, parfois éprouvant et terriblement intelligent, il renvoie au succès qu'avait été, justement, le remake de La colline a des yeux.

Quasi intégralement filmé à la première personne, Maniac présente la particularité de raconter son histoire du point de vue du tueur. Il en résulte un métrage d'une heure et demie assez radical dans son approche et témoignant du même esprit déviant que son modèle. On s'y prend donc à comprendre - et plaindre - la figure même du monstre à laquelle l'on est invité à s'identifier par le point de vue choisi pour la caméra... Il y aura de quoi en déstabiliser certains.

Ce Maniac ose également représenter la violence dans toute sa crudité, sa barbarie. Certaines scènes à la limite du soutenable y tranchent, paradoxalement, avec la démarche très esthétisante de l'oeuvre, sa caméra léchée et sa photo remarquable -la traque du tueur à travers les rues de Los Angeles renvoie à la manière de filmer la ville de Michael Mann dans Collateral. Il en résulte un mariage des contraires étonnament équilibré, un grand écart d'ailleurs également caractéristique de la personnalité de ce prédateur qu'incarne à merveille Elijah Wood. Il est fragile, mais implacable, doux et sauvage, empreint de poésie et de névroses. Frank Khalfoun, parisien bon teint, parvient ici à proposer une vision mature, posée et réfléchie du slasher movie, aux antipodes des la superficialité qui fait loi pour le genre de l'autre côté de l'Atlantique.

Superficialité que l'on retrouve, justement, dans le très attendu V/H/S. Plusieurs pointures du film de genre s'y sont donné rendez-vous, David Bruckner, Ti West, Gleen Mc Quaid, Joe Swanberg, Adam Wingard et le collectif Radio Silence. Mais le résultat fait globalement peine à voir : s'y juxtaposent cinq courts filmés en found-footage et dont le point commun tient à défendre l'hégémonie du jeune mâle américain, passionné de bière, de joints et de nichons. Les histoires qui y sont contées, en prime, n'offrent à aucun moment la moindre originalité, allant puiser dans le répertoire  rebattu des séries B où se croisent ghoules, fantômes, possédées, démons, visiteurs nocturnes et autres lieux communs du genre. Sans une once de personnalité, ces courts sont certes de qualité variable, mais globalement marqués du sceau de la médiocrité, oubliant unilatéralement le fait que filmer caméra à la main ne dispense pas de quelques efforts de cadrage et de mise en scène. On attendait tellement mieux...

 

La suite ce dimanche soir, avec Storage 24, The Pact... et peut-être plus si affinités.