La communauté financière était en attente d’un électrochoc, d'un levier économique capable de doper le chiffre d’affaires en berne permanente de Nintendo. Son président a fini par céder au chant des sirènes spéculatives. En deux temps. Les applications d’essence marketing n’auront pas suffi à satisfaire la soif de ces affairistes, le constructeur développera en collaboration avec l’éditeur DeNA des titres originaux en faveur du segment mobile. Cinq jeux habillés des atours des plus célèbres icônes seront commercialisés d’ici à l’année 2017.

Iwata aura pourtant tout essayé, à commencer par convaincre ses propres troupes afin de faire bloc contre les « courtermistes » de la finance spéculative. Diabolisé en interne pour la fugacité de ses succès, méprisé pour la publication en trompe-l’oeil des chiffres de vente/distribution faramineux (les fameux “un milliard” d’Angry Birds), décrié pour la pauvreté du gameplay, le jeu vidéo mobile, ou plutôt « application mobile » selon le vocable d’Iwata n’a rien de séduisant. Beaucoup d’appelés, mais très peu d’élus sortent la tête de cet océan rouge vif avant de se noyer eux-mêmes à brève échéance. Iwata n’y plongera pas tête baissée. S’il reconnaît qu’une batterie de statistiques pointues, de collecte d’analyses, de planification stratégique doit nécessairement agir comme aide à la décision, elles ne peuvent être les seules qui conduisent à la compréhension et à la domestication de ce segment tempétueux.

« Bien que l’extraction de ces données représente un indicateur » incontournable, le recoupement de ce millefeuille statistique ne peut constituer la seule base de la « réflexion » de Nintendo. Car un danger d’uniformisation de ses jeux guette le fabricant : « Nous finirons par copier ce qui se vend [...] Nous ne pouvons nous épanouir en imitant une formule éprouvée » alerte le dirigeant. La mobilisation d’Hideki Konno (entre autres Mario Kart), l’incarnation du savoir-faire pur et dur du fabricant évoluant dans l’ombre de Shigeru Miyamoto fait donc sens : « Nous avons eu plusieurs discussions en interne, j’ai lancé un défi aux développeurs sur cette problématique vivement délibérée entre eux ».

Preuve d’une légère crispation ? Sûrement portée sur le coeur de cible. « Par dessous tout, Nintendo est une marque familiale, nous n’envisageons aucunement de changer notre fusil d’épaule, nous devons conserver la confiance aveugle des parents », plaide le haut dirigeant. Un seul mot d’ordre pour la préserver, résister à la course effrénée à la rentabilité qui brûle les acteurs de ce marché, notamment les deux béquilles free to play et contenu additionnel : « Nous veillerons à la manière d’exploiter commercialement ce secteur. » Preuve est déjà faite avec Pokémon, Steel Diver Sub Wars et plus récemment Stretchmo tous développés sur 3DS (à l’exception de Pokémon également développé sur mobile).

On se demande encore quel rôle jouera DeNA dans ce schéma, opérateur miné par l’appât du gain…

source : Nintenboy.com