Les entretiens accordés par Shigeru Miyamoto aux journalistes sont rarement dénués de chaleur humaine contrairement à ses homologues. Prenez l’exemple de son responsable hiérarchique Satoru Iwata. Le PDG a beau s’employer à se mettre au diapason de la décontraction naturelle du créatif en se mettant en scène via les spots promotionnels Nintendo Direct dans un rôle à contre-courant de ses plus hautes fonctions, la sauce ne prend pas. 
 
Miyamoto laisse souvent libre cours à sa jovialité, sa spontanéité qui l’amène parfois à s’éloigner du discours formaté rédigé par les stratèges en communication de Nintendo sur les dents. Il ne se laisse ni dompté ni écrasé par le poids de ses responsabilités exécutives. À ce sujet, le cadre dans lequel s’exprime habituellement le créatif n’est jamais détaillé ou si peu. Il est pourtant révélateur de la bonhommie, de l’imprévisibilité du directeur général de la branche Nintendo EAD.
 
 
Un journaliste du Telegraph convié à réaliser une interview du game designer chevronné dans une suite d’un grand hôtel tokyoïte est frappé par le fardeau de l’encadrement officiel : « Miyamoto est entouré par pas moins de quatre assistants. L’un est porte-parole en chef de Nintendo. Un autre griffonne dans un bloc-notes. Un troisième homme installé à un bureau sourit béatement tandis que le dernier se cache dans une pièce adjacente dont la porte est entrouverte. » Le célèbre développeur se laisse-t-il pour autant intimider par ce carcan quasi stalinien ? « Miyamoto les ignore royalement », souligne le journaliste.
 
Une raison à cela, son trait de caractère saisit au vol par l’envoyé spécial du journal Telegraph : « Il arbore un large sourire, ses yeux et ses joues sont aussi expressifs que ses lèvres. » Mais également cette manière très personnelle d’appréhender son appartenance à Nintendo qu’il a longtemps considéré comme « partenaire » avant que ses nouvelles fonctions dirigeantes n’exigent de lui une observation plus stricte des rudimentaires corporate : « Je ne dois rien dire qui puisse contrarier nos actionnaires » glisse-t-il dans les colonnes du magazine Edge d’octobre dernier. Cette discipline inédite pour lui ne déteint pas sur son état d’esprit. Dans cette chambre d’hôtel, il est le seul officiel de Nintendo à être vêtu d’un t-shirt à l’effigie de Pikmin alors que sa garde rapprochée est habillée de tristes trois-pièces.