nn
 
Les marchés financiers ont mauvaise presse, accusés d'être une nébuleuse sans visage emmené uniquement par l'intérêt pécunier, ils s'invitent avec pertes et fracas dans l'industrie du jeu vidéo. Jugez plutôt. La bulle financière qui a entouré Nintendo ces dernières années a gonflé sa valeur boursière allant même jusqu'à dépasser la capitalisation boursière de Sony Corp. Mais le soufflet s'est rapidement dégonflé depuis la précédente édition de l'E3. L'action Nintendo a été lourdement sanctionnée en raison des incertitudes entourant ses nouveaux relais de croissance (Wii U et 3DS), de même que le sévère avertissement sur résultats pour l'année 2012 a douché l'enthousiasme des mouvements spéculatives à l'affût de la moindre micro-tendance ou rumeur (le vrai-faux retrait de Miyamoto avait fait décroché l'action Nintendo de plus de 2%).
 
Nintendo reste sous pression, la normalisation de sa stratégie en ligne avec la mise en place de sa plate-forme ecommerce Nintendo Network est sous le feu des critiques des milieux financiers. Ils n'ont pas parole d'évangile, leur jugement est prisonnier d'intérêts privés et sont rarement habités de la même passion qui brûle le coeur des joueurs mais ils imposent à nous comme un cheveu dans la soupe. Parti pris.
 
Le Nintendo Network révolutionnera le modèle économique du leader mondial des consoles de salon. Cependant, le géant japonais se refuse à poser les pieds précisément là où les analystes financiers en attendent davantage de l'entreprise. Si Nintendo s'ouvre au contenu additionnel destiné au prolongement de la durée de vie initiale d'un jeu, il se refuse d'entrer de plein fouet dans un régime de micro-transaction qui a cour sur le PlayStation Network ainsi que sur le Xbox Live. Pour Billy Pidgeon de M2 Research, la déclaration surréaliste du président Iwata avertissant qu'il ne voulait pas s'aliéner une partie du public non connecté à Internet relève d'une conception terriblement datée de l'importance de ce marché. Pour l'analyste, Nintendo accuse cinq années de retard sur ses compétiteurs parce qu'elle a une vision erronée et dépassée d'Internet. La protection des enfants est très largement devenue la préoccupation de tout un chacun pour devenir une forteresse parentale et l'invocation d'un retour sur investissement trop aléatoire n'ont pas permis au japonais de prendre le train de la modernité online en marche. Il en veut pour preuve l'expérience en ligne de la 3DS n'est pas aussi enrichissante que celle vécue sur le PSN et la Xbox Live. Il juge le premier pas de Nintendo positif mais le NN est encore loin de répondre aux attentes.
 
Son de cloche identique de la part de Jesse Divnich du cabinet d'analyse financière EEDAR. Selon lui, le géant japonais ne rattrapera pas de sitôt la courbe d'apprentissage acquise par ses concurrents. Toutefois, l'offre du leader des consoles pourraient convenir à son public. Mais comment convertir une grande partie du marché des néophytes qui constituent une majeur partie des propriétaires de la Wii au joie du jeu en ligne et du DLC ? Kinect a montré les limites du marché grand public peu intéressé par le téléchargement additionnel. Nintendo devra déployer un millefeuilles d'idées pour convertir ces derniers, ce qui représente une difficulté supplémentaire que ses adversaires ne rencontrent pas ou si peu.
 
L'opinion de David Cole de DFC Intelligence est quelque peu nuancée. S'il conçoit que l'évolution de Nintendo est lente vis à vis d'Internet, elle repose sur une stratégie préparée. Les déboires qu'ont rencontrés les deux services en ligne dominant lors de leur démarrage respectif (sans omettre le piratage du PSN) ont poussé Nintendo à se hâter lentement mais sûrement. Le géant japonais a dans un premier temps jeté les bases imparfaites du Nintendo Network pour la Wii et la DS. Ils ont pu expérimenter leur savoir-faire et apprendre des premiers jalons déposés. L'officialisation en grande pompe du NN signifie l'aboutissement de cet apprentissage en lançant un service en ligne pleinement fonctionnel. D'après David Cole il ne faut pas se tromper de cible. S'il y a bien une société qui doit subir le feu des critiques pour sa politique en ligne ultra-verrouillée c'est bien Apple qu'il faut désigner.
 
Un personnage transformé en histrion à cause de ses opinions dithyrambiques a depuis mis de l'eau dans son vin lorsqu'il s'agit pour lui de qualifier la stratégie réseau de Nintendo. Michael Pachter de Wedbush Securities qu'on ne présente plus n'éprouve plus le besoin d'avertir Nintendo qu'Internet << existe. >> Contre toute attente, il loue le pragmatisme du fabricant signe << que Nintendo finira par faire les choses correctement >> avant de souligner << qu'ils ne vont pas être en mesure de rivaliser avec le PSN et la XBL. >> Le japonais devra passer par les mêmes écueils qui ont éprouvé et façonné l'offre en ligne de Microsoft et Sony (qu'il chiffre à deux ans). Mais d'ici là les concurrents de Nintendo auront << élevé les droits d'entrée. >> Le NN sera frappé d'une obsolescence chronique irréversible.