Atari, c'est pourri; Amiga vaincra. SEGA, c'est plus fort que toi. Vivez dans votre monde, jouez dans le nôtre.

Hello... Ladies.

Vous connaissez tous ces slogans quasi-guerriers scandés par des générations de joueurs aux intentions pures mais aux démarches vides, ces risibles concours de bits orchestrés par des publicitaires ravis d'avoir sous leur coupe un public aussi profondément crédule que passionné.
C'est l'histoire de la construction du médium vidéoludique qui se dessine escarmouche après escarmouche, génération après génération, victoire stérile après victoire stérile. Si dans l'ombre des constructeurs fourbissent de gros budgets publicitaires et des éditeurs préparent des jeux bombastiques pour soutenir de nouveaux formats mirifiques : c'est qu'une nouvelle guerre de cons(oles) s'enclenchera bientôt pour démarrer la prochaine année fiscale.

Blast Processing

Tel était le terme promotionnel scientifico-débilos concocté par SEGA pour expliquer l'extrême vitesse de Sonic sur la MegaDrive. Il était bien entendu vide de sens jusqu'au moindre tiret. (Une fois traduit il donne : calcul par explosion. Ce qui, pour ce que j'en comprends, est le nom officiel utilisé par les ingénieurs de Microsoft pour qualifier leur travail de conception sur la 360.)
Ce qui ne l'empêchera pas d'être repris par l'intégralité de la presse vidéoludique de l'époque comme une délicatesse linguistique à utiliser avant sa date de péremption. De nos jours, le terme réapparait au rythme des ressorties d'oldies de l'époque sur nos plateformes de téléchargement modernes. Ironiquement, certes ; mais cela marque cependant le fait que des milliers de cerveaux ont été violés par un terme vide de sens qui n'est devenu drôle que quand les gens se rendirent compte de sa totale vacuité. J'appelle ça... l'effet Daïkatana.
On ne peut pas en vouloir au SEGA des eighties d'avoir joué sur la naïveté de leurs acheteurs pour souligner le pourtant indéniable avantage technique de la MegaDrive sur la NES. Il est tout aussi logique de voir Sony vendre aujourd'hui une console quasi-équivalente à sa compétitrice directe comme une Rolls Royce vidéoludique dont le slogan est « it only does everything ». (Bon, la PS3 ne fait pas encore percolateur et ne fait plus PS2; mais vous pouvez être certains qu'au moment où j'écris ces lignes d'ingénieux ingénieurs japonais bossent sur une manière de vous vendre ces deux fonctions par DLC.)
La publicité n'est pas à mettre en cause, elle fait ce qu'elle est censée faire. Le boulot des agences de communication est bien de transformer du pognon en un message capable de générer plus de flouze par la vente des produits associés au susdit message. Nous pouvons par contre en vouloir à ceux qui aveuglés par la satisfaction semi-sexuelle procurée par leur nouvelle acquisition se font les évangiles prétendument impartiaux d'un message publicitaire pur.
C'est-à-dire, les fanboys, ou «garçons faons».

Découvrez votre Fanboy Interieur en quelques minutes

Répondez franchement à ces quelques questions par vrai ou faux et vous saurez aisément si vous êtes, ou étiez, un garçon faon.

1- « Pour moi, les jeux-vidéos, se sont terminés avec la DreamCast. Quoi. »
2- « Mario, et d'ailleurs les jeux Nintendo en général, ont une sorte de qualité presque artistique qui leur font dépasser le simple jeu-vidéo pour toucher à une sorte d'art majeur qui pourrait être apprécié par tous. De sept à septante-sept ans. Snirfl. »
3- « Microsoft, ouais ce que j'aime chez eux c'est qu'ils font pas des jeux pour gonzes. C'est de la pure testostérone et du design bien beefy qui fait pèter les watts. Yééé boooi. »
4- « Ben chez moi c'est la tradition. On achète tout Sony car on est secrètement nationalistes du soleil levant malgré le fait qu'on est occidentaux. Et je dis nous, même si je suis tout seul. Alors, chez moi en tout cas. On, enfin je, respecte la suprématie nippone du hardware japonais qui a sauvé les jeux-vidéos du grand crash produit par les jeux américains à la fin des années septante. »

Si vous avez sérieusement répondu « oui » à l'une de ces propositions, je ne peux que vous enjoindre à suivre un traitement psychiatrique. D'urgence.
Ce genre de phrases, parfois sous des formes à peine lisibles, représente la majorité des témoignages que l'on peut lire sur les forums de jeux-vidéos du monde entier. Quand je lis ce genre de posts, je ne peux que tenter de me représenter mentalement le type de joueur déçu que chacun de ces messages résume. C'est une forme de déception vis-à-vis du message publicitaire qui est la cause de cette désaffection aigre ou de cette suprématie infondée qui se lit dans ce genre de missives jetées dans l'infini par des gens qui beuglent avec leurs doigts devant des PCs.
Leur péché ? Avoir pris pour parole d'évangile des messages destinés à faire bouger des stocks d'invendus. Leur enfer ? Faire partie d'un camp qu'ils considèrent floués d'une victoire illusoire ou inatteignable qui leur semblait pourtant destinée. Leur rédemption ? Jouer sans prétention.

Aliénation, j'écris ton nom.De manière approximative. En Caps Lock

Jouer à un jeu-vidéo pour des raisons externes à ses qualités intrinsèques est une forme d'aliénation mentale que le fanboy évangéliste de base met en avant comme mode de vie. L'on ne fait pas de vieux os dans les tranchées de la guerre des cons(oles).
Que l'on soit con(testaire), con(scrit) ou même simplement con(cerné) : le futur est le même pour tous les participants au massacre. Avec de la chance, votre coalition gagne. Jusqu'à ce qu'elle perde. (Jusqu'ici aucun constructeur n'a gagné sur plus de deux générations successives.) Et là, votre monde s'écroule car ce que vous considériez comme des valeurs intangibles mais universelles devient des opinions aux yeux de ceux qui vous entourent. Tout d'un coup,
SEGA n'est plus fort que toi. Atari est pourri. Ami gras vaincra. Et à la fin, l'on doit jouer dans le monde des autres. Inévitable déchéance d'un vétéran de ce genre d'affrontements.
Il est tentant d'imaginer qu'une déesse de la justice vidéoludique sourit sur l'industrie à chaque fois que ses acteurs majeurs sont prêts à sortir une nouvelle génération de machines. C'est mignon de la prier métaphoriquement de sourire sur l'un ou l'autre format en se faisant l'outil imaginaire d'une évangélisation en son nom inexistant. Mais il est presque criminel que ce genre de messages presque toujours inconséquent accapare les espaces de discussions censés nous permettre de parler des jeux que l'on aime. Remarquez que les seules personnes assez passionnées que pour tenter de percer dans la presse vidéoludique sont des fanboys. Ce qui nous permet de rajouter au statut quasi-généralisé de pamphlet publicitaire de notre presse spécialisée celui de ramassis d'anciens fanboys plus ou moins repentis et vaguement incapables d'écrire. (Pour un exemple lumineux de ce dont je parle, relisez les Joypad datés des environs de la sortie de la GameCube en Europe. Un classique de l'humour involontaire.)
Pensez-vous vraiment que gueuler très fort que l'on aime le sushi à qui veut l'entendre et qu'on pense que c'est un mets incroyablement supérieur au hamburger change l'avis de quiconque ? Non, cela fait juste passer les amateurs de sushi pour des quiches.

Mangez des bons Sashimiiiis !

C'est pareil pour les consoles. Je n'ai cure de votre fétichisme manufacturé à grands coups de teasers pour la console Helghaste de la semaine ou le périphérique Spartan du mois. Ce qui compte, c'est que la machine ait des bons jeux. Et non pas le fait que l'architecture qui permet à ces titres de prendre forme est théoriquement plus puissante que sa concurrente quand elle a le vent dans le dos.
Il est pourtant ridicule de voir autant d'animosité se développer sur un médium aux aspirations si pures: utiliser la puissance de la technologie issue de la recherche militaire pour une chose aussi enfantine que jouer.