"Beaucoup de bruit pour rien", titrait jadis Shakespeare aux yeux de qui, ce n'est un secret pour personne, l'être humain n'en avait que peu. Si peu, même, que près de cinq cent ans plus tard, la locution n'a jamais été autant d'actualité. Car si Internet n'a pas horreur du vide, au contraire de la nature, force est de constater que la vacuité y a battu ses propres records après la diffusion, à l'E3, d'un trailer ingame du très attendu Final Fantasy XV.

 

En effet, difficile d'imaginer polémique plus stérile que celle qui a opposé, des jours durant, les maisons rivales des vieux c*ns et des jeunes kikoolol, que l'on sait réputées d'égale indignité. Comme quoi, du Barde aux ménestrels, il n'y a qu'un pas. Un clic, ironiseront certains.

Car plutôt que de s'émerveiller devant les (réelles) prouesses techniques accomplies par les équipes de Square Enix ou de se réjouir par anticipation du souffle épique de l'aventure promise, les blasés de tous poils et les complexés capillaires n'ont rien trouvé de mieux que de juger le titre entier sur un détail, un seul, des plus anecdotiques : un geste banal, rapidement esquissé par un protagoniste dans le feu de l'action, mais qui aura suffit à étendre le champ de bataille hors des limites de cette « fantasy based on reality ».

 

Trop tendance pour certains, trop tendancieux, voire carrément choquant pour d'autres, rarement un simple signe de main aura fait couler autant d'encre, si virtuelle soit-elle. On le dit déplacé, on le qualifie d'hors-propos, on le prétend anachronique, on lui refuse tout crédit sous prétexte qu'il ne ferait pas assez « couleur locale », comme si la saga n'était pas de celles qui s'efforcent de surprendre à chaque nouvel opus.

 

Mauvaise foi, alors ? Prétexte ? Ou conflit générationnel ?

 

Par bonheur, au plus fort de cette cacaphonie, des voix sages ont su s'élever pour rappeler que le geste ne date pas d'hier et qu'il n'est pas, quoi qu'on puisse croire, la propriété symbolique exclusive des classes sociales défavorisées. Pour souligner, dans la foulée, qu'on le trouve également dans nombre de longs métrages, de dessins animés ou de bandes dessinées qui n'en ont pas souffert, bien au contraire. Pourquoi ce futur hit devrait-il faire exception et voir l'atout devenir une infamie ? Un argument qui n'aura pas manqué de réconcilier les Capulets et les Montaigus de notre Vérone vidéoludique, mais après combien de combats inutiles ?

Shakespeare, on y revient toujours. Le jeu lui-même ne semble pas y faire exception.

 

Du côté de chez l'éditeur, on s'étonne d'un tel remue-ménage :

 

C'est un geste très courant. Un peu familier, certes, mais qui nous semblait adapté dans le contexte. Il nous est tous arrivé d'y avoir recours un jour ou l'autre. Il n'y a pas de quoi en faire une affaire d'état.

Et d'ajouter, malicieusement :

Ce geste, c'est un peu un clin d'œil à nos fans les plus assidus. Depuis Final Fantasy X, nous ne cessons de le lui adresser, sous une forme ou une autre. Pour le grand retour de Final Fantasy sur console de salon, nous avons trouvé judicieux de l'afficher cette fois de manière explicite. C'est notre façon à nous d'honorer ce lien si précieux.

 

 This is a fantasy based on reality.