Les heureux possesseurs de PS Vita méritent décidément bien leur épithète !

Le 24 avril prochain, ils auront la chance de découvrir Moero Chronicle, la nouvelle pépite du studio indépendant Compile Heart, à qui l’on doit notamment la fameuse (dans tous les sens du terme) série de J-RPG Hyperdimension Neptunia. Entre parodie à la nippone et vertiges d'une mise en abyme, cette saga en trois épisodes a su se trouver de nombreux adeptes chez les hardcore gamer, en dépit du travail de sape auquel se livre éhontément la cyberpresse de notre « beau » pays.  

 

Car la sortie de ce Dungeon RPG aux graphismes léchés et aux mécanique de jeu bien huilées sera, à n’en pas douter, l’occasion pour l’amateur éclairé de tester son self-control en parcourant d’un oeil navré la traditionnelle (dans le mauvais sens du terme) succession d’articles ethnocentriques appliqués à mettre à l’index une direction artistique typiquement japonaise ; et ceci sans jamais chercher à dépasser le seuil des apparences. Parce qu’à chaque sortie du studio, impossible d’y couper : le testeur en mal d’attention y voit l’occasion de se faire mousser en étalant crassement son absence de culture et d’ouverture d’esprit, au vu et au su d’un public aussi intellectuellement limité que conquis par avance, avide de boire la moindre de ses paroles du moment qu'elle les flatte. Douche froide garantie pour les gens de bon goût ou les amoureux de la tolérance.

 

 

Toujours la même rengaine... Et que ça pipeaute, et que ça ergote, et que ça vous balance quelques références « pour faire genre », et que ça parle de phénomènes sociaux dont on ne sait trop rien - et qu’on peine à orthographier convenablement (« Hikikomori bonjour ! », n’est-ce pas, TigerSuplex ?) -, et que ça se focalise sur des détails que je qualifierai de « mineurs », et que ça vous traite de pervers entre les lignes (ce qu’il ne faut pas lire !), pour passer allègrement (voire volontairement !) à côté de ce qui fait l’intérêt de ces productions.

 

 

Incapables de comprendre les codes d’une culture différente (voire de les accepter), ces petits journaleux de bas étage, convaincus de jouer dans la cour des grands, multiplieront sans doute ce qu’ils considèreront comme des bons mots, tout juste bon à faire rire les derniers de la classe et les caïds de nos cours de récré.

 

 

 

Aussi y’a-t-il gros à parier qu’ils passeront dans leur moulinette l’intégralité des atouts de ce qui s’annonce d’ores et déjà comme un concurrent poids-lourd pour le tout récent (et pas aussi exceptionnel qu’on le raconte) Bravely Default, afin de n’en livrer qu’une bouillie de sophismes, de préjugés et de mauvaise foi manifeste, propre à convaincre les âmes les plus impressionnables et les plus malléables. Lesquelles se priveront sans le savoir, une fois encore, d’une aventure dense, riche et complexe, comme aucun créateur européen ne saura jamais nous en proposer, engoncés qu’ils sont dans leurs stéréotypes et leurs univers cloisonnés. Ou comment la bêtise ordinaire fait le lit d’un racisme sournois.

Ce qui en dit long, du reste, sur le mal qui ronge nos sites d’« information », si outrancièrement satisfaits de leur cynisme, de leur mépris et de leur complaisance - constat qui n’a rien d’étonnant, dans un pays où les plumes se vendent au plus offrant pour une poignée de Doritos ou quelques exclus mal placées.

 

 

 

Heureusement qu’à l’opposé, des pays comme le Japon (pour ne citer que lui, mais peut-être est-ce le seul ?) osent bousculer nos habitudes et se rire du poids des attentes du grand public, pour développer des oeuvres uniques, novatrices, sans concessions  - confinant, je n’ai pas peur de l’écrire, à l’oeuvre d’Art. Car ce n'est pas dans notre triste hexagone qu'on aurait pu inventer le concept (révolutionnaire s'il en est) du poster dit « de salle de bain »,  lavable en cas « d’accidents », dont cinq magnifiques exemplaires accompagneront l’édition collector. Non, aucun de nos soi-disant "génies créatifs" n'aurait été capable de conjuguer avec une telle maestria élégance et esprit pratique, esthétisme et fonctionnalité. Autant pour toi, Michel Ancel !

 

 

 

Gageons, alors, qu’il faudra encore des années (peut-être des siècles ?) de grossière surenchère avant que je ne prenne ENFIN conscience que mes éditeurs préférés, défendus avec l’énergie du passionné, me prennent pour le dernier des ânes (pour ne pas dire des porcs) et se paient ma tête à mes frais - ou que je réalise, trop tardivement, que leur politique est indéfendable et que j’aurais dû leur dire « stop ! » avant que les limites du tolérable n’aient été à ce point franchies.

Ne serait-ce que par amour-propre.

Mais avant d'en arriver là, encore faudra-t-il, sans doute, qu’on m'invente l’amour de salle de bain lavable à l’eau tiède...

 

Moero Chronicle sortira le 24 avril sur PS Vita.