Le jeu iPhone étant constitué pour une grande partie de jeux simples concentrés autour d'une idée, ne permettant pas toujours d'épiloguer  pendant des heures, comme pour un jeu standard, nous allons inaugurer le double test. Je vais vous parler de Canabalt et de Tomena Saner. Deux jeux au concept similaire mais enrobés de deux façons très différentes comme nous allons le voir.

A un doigt de la mort.

 


 

I) One Touch Running Power

Des commentaires toujours pertinents

Certains ont parfois tendance à l'oublier en voulant adapter à la hâte des licences issues des consoles (cf: la technique secrète du développeur glandeur dite du joystick virtuel tout pourri), mais l'iPhone est une plate-forme de jeu avec de grosses contraintes. Son manque de touches analogiques tout d'abord, qui oblige à réquisitionner une partie de l'écran pour y mettre les doigts, et sa nature de téléphone portable qui encourage les séquences de jeu courtes. On peut voir ces contraintes comme de gros défauts lorsqu'on essaie de convertir des jeux destinés à d'autres plateformes, ou à l'inverse comme un avantage qui pousse à créer ou importer des concepts qui lui sont adaptés. Canabalt et Tomena Saner sont deux beaux exemples de la deuxième catégorie. Dans leurs cas, ce n'est pas un nouveau concept mais une importation. Le premier nous vient du monde merveilleux et très créatif du jeu en flash. Quand au deuxième, il a fait sa première apparition sur le WiiWare pour ensuite arriver sur l'Appstore. Étonnant, tant l'un et l'autre semblent adaptés à leur plateforme portable.

Afin de jouer avec la première contrainte, ils s'affranchissent de points d'interaction définis sur une zone de l'écran. On appuie où l'on veut. L'écran est un grand bouton. Toutes les actions doivent donc être exécutées par ce seul bouton. Solution qui cadre parfaitement avec la seconde contrainte: les séquences de jeu courtes. L'interaction étant en effet résumée à un bouton, le gameplay en découlant sera forcément assez simple. Les deux jeux présentent un personnage qui court en évitant des obstacles, de façon plus ou moins réussie selon le timing. Le reste n'est ensuite qu'une question de mise en forme et d'univers. Pour cet aspect, les deux jeux ont pris des directions radicalement différentes.

II) Canabalt, le côté obscur de la course

Celui-là vous allez le voir souvent. TRÈS souvent

Canablat prend le parti d'une ambiance sombre et pessimiste. Seul excentricité à noter: visiblement on incarne Michael Jackson. Oh bien sûr cela n'est qu'une intuition personnelle. Un personnage avec une veste trop courte et des pantalons tout aussi courts, laissant apparaitre de magnifiques chaussettes blanches, je sais pas vous, mais moi ça me fait penser au défunt roi de la pop. Ceci dit, le jeu plonge notre MJ dans un drame. Sa ville est attaquée par des robots géants qui la détruisent méthodiquement. Il commence sa fuite dans un bureau et saute par la fenêtre. S'en suit une course interminable sur les toits de la ville.

Lors de cette fuite, MJ court automatiquement, et de plus en plus vite. Il nous revient, avec l'unique bouton, de le faire sauter au bon moment, avec la bonne force afin de le faire passer d'un immeuble à l'autre le plus précisément possible. Une pression plus ou moins prolongée définit la longueur du saut. Bien sûr, divers obstacles se trouveront sur notre chemin. Certains mortels: des immeubles qui s'écroulent, des mines tombants du ciel, et du vide. BEAUCOUP de vide. D'autres non mortels mais ralentissant notre avatar du showbiz: des caisses, des chaises ou des bureaux. Et croyez-moi, ralentir s'avère nécessaire car ce jeu va clairement vous démontrer les limites de l'œil humain. Le scrolling peut se montrer d'une rapidité affolante. Du coup vous allez avoir fort à faire pour battre les scores totalement extraterrestres que l'on trouve dans le classement mondial.

Situation difficile...

Autant vous le dire toute suite, ce pauvre MJ ne s'en sortira pas. Ceci quoi que vous fassiez, extraterrestre ou pas. Aucune chance, rien, nada. Invariablement il va mourir notre ami (ce qui vous le concéderez est une preuve de réalisme bienvenue). En effet, Canabalt comme de nombreux jeux à score, ne propose pas de fin. Le but est de fuir le plus loin possible pour pouvoir briller en société. Pas de salut pour notre héros mais de courtes séquences de jeu haletantes pour le joueur.

La force principale du jeu tient réellement en un mot: ambiance. La musique est oppressante, le ton graphique est gris et même le son des pas de notre héros semble dépressif. Un peu comme si Mirror's Edge avait mangé Stalker. On sent notre avatar lancé dans une fuite perdue d'avance mais on s'accroche pour le faire tenir le plus longtemps possible. Chaque tentative amène la suivante, en espérant emmener MJ toujours plus loin. Pour en « profiter » un maximum, le port du casque est conseillé. D'ailleurs le jeu, dans sa bonté, ne manquera pas de vous le rappeler à chaque lancement.

Du côté des défauts, on déplorera le manque de variété. En effet, un seul « niveau » est proposé. Certes les différents types d'immeubles se succèdent dans un ordre aléatoire mais lorsqu'on voit les 9 niveaux différents de Tomena Saner, on ne peut s'empêcher de regretter le seul environnement disponible. Depuis la dernière mise à jour, j'ai également pu constater avec agacement que parfois le jeu nous envoie des enchaînements d'immeubles paraissant impossibles. Heureusement, cela reste rare et doit être lié à l'ajout de nouveaux types d'obstacles. Cela devrait, je l'espère, être rapidement réglé dans une prochaine mise à jour.

III) Tomena Saner, le côté absurde de la course

Ohhh! Un tricératops bleu...

Tomena Saner prend le contre-pied total de notre Michael Jackson dépressif: c'est couleur, bonne humeur et absurdité à tout va. Notre avatar est un salary man attendu pour une affaire d'importance. Malheureusement pour lui, ce jour-là, par un malencontreux hasard, sa ville se trouve envahie de dinosaures, voyous, voitures folles, sumos méchants, moines ninjas et autres futurs ennuis par paquet de douze. Un lundi sûrement. Mais n'écoutant que son courage et son compte en banque (j'extrapole un peu), notre homme se lance malgré tout à l'assaut de son rendez-vous. Et le but du jeu va être de l'aider à éviter cette horde d'envahisseurs.

Cette fois, notre bouton unique nous sert à déclencher toute sorte d'actions contextuelles plus ridicules les une que les autres: faire saute-mouton sur le dos de ménagères, éviter avec classe les besoins de Médor, frapper des moines, glisser sur des rampes d'escaliers et plein d'autres choses idiotes que je vous laisse le plaisir de découvrir par vous-même. Selon le timing, l'action changera et vous fera perdre ou gagner du temps. En effet, se prendre une claque d'une racaille vous ralentira alors que lui mettre un kick furieux dans les dents vous fera gagner de la vitesse et atteindre la fin du niveau dans les temps. Ce qui vous permettra d'exécuter une danse de la victoire que le plus grand champion de Dance Dance Revolution vous enviera sa vie entière. Au début, le timing pour déclencher les actions peut s'avérer délicat, car il se trouve être différent selon l'obstacle. Du coup, un petit temps d'adaptation sera nécessaire. Mais dites-vous que cela vous laissera le temps d'apprécier les différentes animations d'échec.

On court toujours. Enfin presque...

Comme Canabalt, le jeu a son ambiance pour principal argument. L'univers coloré et absurde à la japonaise nous ramène aux meilleurs moments des univers de Suda 51 (No More Heroes) et Keita Takahashi (Katamari Damacy). Cette créativité décomplexée de toute considération logique ou de bon goût a pour seule limite celle de l'imagination de la situation la plus absurde possible. Les personnages sont tous caricaturaux et plongés dans des situations aussi idiotes que possibles. Les couleurs sont flashy et les gestes exagérés à souhait. De plus, chaque action est soulignée par un commentaire sportif du meilleur effet. Curieusement, de tout ce formidable bouillon émerge une joyeuse cohérence qui ne manquera pas de vous faire sourire. Cela ne sera pas forcément du goût de tout le monde, mais pour les clients des univers cités plus haut, il n'y a aucune hésitation à avoir, ce jeu saura toucher votre cœur.

Comme pour Canabalt un tour du côté des défauts s'impose. Contrairement à ce dernier, Tomena Saner ne souffre pas de problème de variété. Il propose de nombreux niveaux à difficulté croissante, ainsi qu'un mode turbo pour corser la difficulté une fois vos réflexes aiguisés par le mode normal. Le seul point noir qui m'a parfois poussé à lancer Canabalt à sa place sont les chargements fréquents et beaucoup trop lents. Pour une partie normale, le jeu charge une première fois pour accéder au menu et une deuxième fois pour le niveau désiré. Lorsque l'on sait que les chargement en question durent en moyenne 20 secondes (sur un 3G), on ne peut que regretter la minute nécessaire pour jouer alors que le gameplay privilégie de courtes séquences de jeu.

Mention

Commentaire : Les deux jeux proposent un gameplay parfaitement adapté à leur support, ce qui leur donne une base solide sur laquelle repose leur deux univers forts et originaux. Comme souvent sur l'iPhone, leur petit prix adapté au gameplay à picorer en fait une offre attractive pour tous les possesseurs du téléphone à la pomme en mal de distraction de qualité dans le métro. Assurément deux grands petits jeux qui méritent vos sous.

L'article d'origine : https://levelfive.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=124:chronique-canabalt-a-tomena-saner-iphone&catid=50:iphone&Itemid=28