La nature est un thème trop peu, sinon trop mal traité dans le jeu vidéo. Botanicula, fils spirituel de Machinarium, est donc plus qu'exceptionnel, déjà par le simple fait qu'il rende hommage à la nature avec une affection et une pertinence brillantes. Témoignant d"une absurdité et d'un désordre déconcertants mais finalement si peu éloignés de la réalité, le microcosme naturel (insectes, végétaux, autres bizarreries en tous genres...) qui prend vie dans Botanicula est un pur meurtre par le rire pour le joueur, ce qui là encore est une prouesse, l'humour n'étant pas monnaie courante dans le jeu vidéo moderne. Du début à la fin de l'aventure passionnante qui m'a fait suivre les cinq protagonistes débilos de Botanicula, j'avais un grand sourire émerveillé sur les lèvres. Ce jeu est magique, car il rend heureux, et stimule notre soif de découvertes insolites. Regardez-moi ces espèces de "cailloux-glands" à droite de l'image ci-dessus. Non mais regardez-moi leur tronche (en particulier celle du plus petit), c'est absolument énoooorme !! (là je suis en train de rigoler comme un con devant mon écran d'ordinateur, tellement ils ont une gueule pas possible)
Les artistes d'Amanita Design ont donc bel et bien de l'or dans les mains. D'ailleurs, la vénusté des tableaux qu'on parcourt m'a encore plus renversé que dans Machinarium. Le jeu de couleurs, le tracé "dessin fait main" des décors qui se trouvent au premier plan, et encore une fois les détails animés qui sont disséminés un peu partout... J'ai accroché à 200%, et suis même parfois resté bloqué pendant des plombes devant certains plans, tellement je les trouvais splendides (bon maintenant baissez la tête, et regardez-moi cette merveilleuse image en dessous, c'est-y pas beau ça ?). Une poésie assez troublante se dégage de l'aspect visuel du jeu, ce qui tranche drôlement avec le character design, qui lui est déjanté au possible. La musique et les bruitages, tous deux cosmico-génialo-gogogadgeto-perfecto-sublimo-célesto-strato-superbo-drôlissimo-bueno-super cools, nous véhiculent très bien ce contraste, en alternant entre des registres tantôt loufoques, tantôt planants et plus propices à la contemplation. A ce propos, tout comme dans Machinarium, le jeu se prive sans mal de toute parole, et rien que les thèmes musicaux, riches en moult couleurs (instruments WTF en veux-tu en voilà, sons d'animaux, voix humaines déformées...), parviennent à nous conter une histoire qui nous met sur le cul.
Au delà de ça, Botanicula fait selon moi avancer le genre du Point'n'click encore plus loin que Machinarium, car il est encore davantage dépouillé de toute indication à l'écran, ou de toute mécanique de gameplay tout à fait dispensable, qui ne ferait que nous sortir du trip et de l'histoire. Les énigmes par exemple, sont parfaitement intégrées à l'univers, et ne donnent pas le moins du monde l'impression de tomber comme un cheveu sur la soupe. Certes elles demeurent très simples, mais après tout, le jeu se destine à des personnes de tous âges et de toute expérience vidéoludique. Ensuite, le level design est lui aussi pleinement intégré au contexte, car on circule un peu au petit bonheur la chance sur les branches du grand arbre sur lequel on a atterri. Du coup on se déplace follement de manière verticale comme horizontale, on atteint des coins invraisemblables de l'écran, et les développeurs se sont même parfois amusés à nous pondre des écrans de taille ou d'agencement plus que déroutants (le dernier chapitre du jeu, qui joue sur l'obscurité et sur les coins de notre écran, est particulièrement malin et surprenant, je vous assure).
Je pourrais m'éterniser des heures durant sur cette perle qu'est Botanicula, mais ça ne nous avançerait pas plus que ça. En tous cas, après y avoir joué, mes idées sont claires : Botanicula est le meilleur Point'n'click de tous les temps, car le plus surprenant et le plus malin de tous !