O Dame Nature, offre-moi un monde vaste, vivant et indépendant !

Là où la nature est autant en mesure d'inspirer au mieux le jeu vidéo, c'est en termes de géographie, et d'écosystème. Parce que de ces constituants, peuvent en résulter des tentatives de reproduction virtuelle, à savoir un terrain de jeu et une arborescence d'intelligences artificielles voire de lois physiques et logiques, qui auront pour but d'immerger le joueur au cœur d'une authentique vie numérique.

 

I'M FREE !

Etre à l'air libre, se déplacer en nature, c'est bien évidemment jouir d'une liberté de mouvement totale. Donc faire un jeu qui se déroule dans la nature, c'est, sous réserve de vouloir faire preuve d'un minimum de cohérence, prendre le parti de créer un level design totalement différent de ce qu'il pourrait être dans un contexte urbain. On ne parle alors plus vraiment d'architecture, ni de niveaux, mais plutôt de modélisation d'un monde qui par définition, aurait une forme plus inattendue, plus sinueuse, plus indomptée et moins rectiligne, qui serait plus dense et truffé de recoins, mais qui serait aussi plus grand, pour se rapprocher de la sensation d'infinité que tout lieu naturel a pour coutume de nous procurer. Au diable les murs invisibles, assurément. Ceux qui ont joué à Castlevania : Lords of Shadow seront d'accord avec moi pour le dire : il n'y a rien de pire que de voir son personnage s'arrêter net devant un pauvre caillou qui ne fait pas la taille de son pied... En somme, pour créer une immersion en nature, rien ne vaut un monde ouvert. Bien entendu, cela dépend du genre de jeu, car tout jeu n'est pas forcément adapté au format du monde ouvert. D'ailleurs, des productions au level design relativement cloisonné telles que les The Witcher ou les Alan Wake ont bien réussi à asseoir une immersion crédible, en jouant sur l'astuce de la perception illusoire, grâce à de malins artifices visuels (la profondeur de champ nous fait respirer et nous laisse imaginer le reste du monde; la disposition des environnements, bien que restreinte, reste cohérente en bloquant par exemple une sortie avec une voiture, une charrette ou autre; et tout simplement, la beauté plastique de ces jeux nous scotche tellement à l'écran que l'on ne cherche même plus forcément à trouver les limites du décor).


The Witcher 2


Alan Wake

Mais pour retranscrire le vent de liberté et de vastitude que nous procure la nature, rien n'égalera un monde ouvert où chaque caverne peut être explorée, où chaque sommet de montagne peut être atteint, où chaque ruisseau peut être franchi, et où tout panorama est accessible. Un monde tel, c'est ce dont nous gratifie par exemple la série des The Elder Scrolls qui depuis ses débuts, s'est toujours vantée à juste titre de profiter de maps gigantesques, ouvertes et baignant dans un univers naturel et champêtre. D'où d'ailleurs, le surnom gentiment moqueur de « simulations de promenade », régulièrement collé aux épisodes de la saga de Bethesda. Déjà vertigineux de par sa taille dès le second opus Daggerfall, qui accomplissait l'exploit de contenir une surface de jeu à peu près égale à deux fois l'étendue du Royaume-Uni (à tempérer tout de même, car d'une part cette étendue était générée aléatoirement, et d'autre part les environnements extérieurs aux villes étaient relativement déserts et qui plus est, servis par une technique graphique digne de Virtual Hydlide); le monde des Elder Scrolls s'est véritablement déployé à partir du troisième épisode Morrowind, qui lui, pouvait se targuer de modeler avec un soin mirobolant une nature éclectique, touffue et immersive. Est ensuite arrivé Oblivion qui selon moi, poussait le concept de la franchise encore plus loin de par son réalisme et son esthétisme visuel, mais aussi son soucis du détail, qui rendait les milieux sauvages d'autant plus prenants, car comme marqués par un certain vécu (la topographie a beaucoup plus de relief et de proéminence, la végétation est plus épaisse et plus diverse, etc...). Quant à Skyrim, le petit dernier, il a su prouver à de nombreux joueurs que les mots « nature » et « liberté », lorsqu'ils se matérialisent concrètement en une expérience virtuelle, peuvent être synonymes d'un épanouissement ludique total, et d'un temps de jeu presque effrayant. Car cette fois, les développeurs ont eu le génie de faire germer un monde qui plus que jamais invite à la découverte, en arborant une étendue de jeu phénoménale où à chaque mètre, la nature cache quelque chose. Ainsi, le moindre évènement, la moindre variation d'atmosphère visuelle et sonore, et le moindre détail présent dans l'environnement contribuent à former cette densité sans limite, qui à l'image de notre vraie nature, a le potentiel pour constamment attirer notre attention et briser toute once d'ennui qui pourrait avoir le malheur de poindre.


The Elder Scrolls II : Daggerfall


The Elder Scrolls III : Morrowind


The Elder Scrolls IV : Oblivion


The Elder Scrolls V : Skyrim