Il me semble que c'est avec Chipster que j'en avais parlé, y'a pas longtemps. Je n'aime pas refaire mes jeux. Certains plus que d'autres, certes. La chose que je préfère dans un jeu, c'est de ne pas comprendre les fondamentaux de son game design. De préserver la magie, de ne pas tout analyser dans sa structure.

Bien évidemment, certains jeux sont pensés pour être faits plusieurs fois : je suis par exemple en train de prendre un pied monstre sur 999, un jeu DS développé par Chunsoft. C'est un visual novel, où le scénario est par conséquent très important. En un run sur le jeu, impossible de le comprendre : en fonction de ses choix, certains pans de l'histoire nous sont inaccessibles, et des choses qu'on pensait être des incohérences se révèlent parfaitement logiques quand on recommence le jeu. En ça, la narration de 999 est selon moi une des meilleurs dans un jeu-vidéo, à ce jour.

De même, pour les jeux à skills, comme les hack'n'slash, shmups ou beat'em all, il est dans l'essence du jeu d'être recommencé : après avoir terminé Ninja Gaiden 3 en Hard, il me parait évident de le recommencer en Master Ninja. Car le plaisir tiré de ce genre de jeux ne vient non pas de son histoire, mais de son système de jeu.

Passons rapidement sur les jeux de courses, jeux de combats, de stratégie, les MMO ... Ces titres se vivent différemment.

 

Non, quand je dis qu'un jeu ne se fait qu'une fois, je parle de tous les autres. Je parle des RPG, je parle des shooters solo, je parle des jeux d'aventure, des survival-horror. Me replonger dans Uncharted 2 ou dans Project Zero 3 serait la plus grosse erreur que je pourrais faire.

Je ne parle même pas de mon jeu préféré sur cette génération : Bioshock. Recommencer ce jeu aujourd'hui briserait quelque chose au plus profond de moi. Il détruirait mes souvenirs, toute l'expérience d'à-côtés que j'ai eue avec le jeu : aller l'acheter dans un magasin, me rendre compte que l'édition collector est dure à trouver à cause de la figurine qui se cassait facilement, mon expérience quand j'ai mis le disque dans la Xbox.

Oh, oui, ce début de jeu : l'avion s'écrase dans une magnifique «cinématique », le héros sort la tête de l'eau et contemple l'océan en flammes, puis attend, pendant cinq minutes, quelque chose. Il ne bouge pas. La « cinématique » freeze. Ceux qui ont fait le jeu à sa sortie comprennent parfaitement de quoi je parle. Le jeu était tellement beau que je n'avais pas compris que c'était du in-game. Cette prise de conscience et l'introduction d'anthologie qui en suit est un des plus beaux moments de ma vie vidéoludique.

Alors non, je ne veux pas le recommencer. Je ne veux pas le revivre. Je veux garder en moi ce souvenir, même amplifié par le temps et les discussions d'émerveillements entre amis.

Je ne referai pas non plus Heavy Rain. Ah, non, surtout pas lui. D'autant plus que son squelette narratif est apparemment très simple à distinguer et que nos choix ne sont pas si importants. Non, je n'irai pas découvrir la vérité et savoir que tel choix n'avait aucune incidence, que le jeu est rempli d'artifices et de faux semblants. Non. Je préfère très largement comparer ma fin et mon expérience avec celle de mes proches.

Il y a 2 ou 3 semaines, Papayou  m'a gentiment invité chez lui pour que je fasse Journey, le jeu de sa vie. J'ai adoré. Littéralement. Depuis, je l'ai acheté sur le SEN. Par soutien uniquement, parce que je sais que je ne le referai jamais. Certains diront que la force du titre vient de son expérience en multijoueur. Je leur rétorquerai que non, la force du titre est dans l'émerveillement du joueur à la découverte de nouveaux environnements. A la découverte de cette fin pleine de sens et d'espoir.

 

Non, je ne referai jamais non plus Star Ocean 2. Ni Shadow Hearts Covenant. Ni Xenosaga 3. Ni Final Fantasy 6. Ni tous ces Tales of que j'ai adorés. Je m'en contrefiche de marquer tel succès ou débloquer tel costume. Non, Non, Non, je ne les referai pas. Ils appartiennent à mon passé de joueur, ils ont servi à construire mon profil, ma personne, mes goûts, mes envies, mes références. Et c'est parfaitement suffisant. Place aux expériences futures. Et dans 50 ans je raconterai à mes petits-enfants pourquoi j'ai aimé F.E.A.R. ,plutôt que de leur montrer.