Voir 17% affichés en bas de l'écran avait un je-ne-sais-quoi de déprimant...

Big Boss, le soldat de légende, assis sur l'inconfortable banquette de l'hélicoptère, semble méditatif. Réfléchit-il à ces opérations réussies mais si mal exécutées? Peste-t-il intérieurement contre l'homme derrière la manette, moi en l'occurence, qui l'a fait passer devant toutes les caméras, gardes, halogènes, jeep, lampes-torches de la base comme un aveugle se cognant à tous les réverbères en disant pardon madame?

Difficile de savoir... Toujours est-il que dans un sursaut d'orgueil, je n'allais pas laisser la médiocrité impunie, surtout la mienne, et j'étais bien décidé, ô suprème objectif, à passer la barre des 20% et, soyons fous, réussir une mission en rang S, qui serait le témoin de mon skill affolant.

J'ai du pour cela me pencher sur le système de notation de Ground Zeroes afin d'en tirer les indices nécessaires à la complétion de mon objectif.

La notation dans MGS et moi,  c'est avant tout l'histoire d'une franche détestation. MGS 4 a en effet l'habitude de fliquer le moindre de vos faits et gestes, de le jauger et de lui coller un épithète animalier. Vous pouvez ainsi être "léopard", "cochon", "abeille", voire (même) "chenille". Un vrai horoscope chinois.
Si en faisant une première partie on récolte quelques uns de ces badges, certains ont fait de ces trophées une quête indispensable à la complétion ultime de MGS 4. Et ce jusqu'aux  badges de haut niveau qui vous obligent à suivre une série de conditions ultra-restrictives. (Badge Big Boss: Moins de 5 h de jeu, 0 alertes.).

C'est ce que je déteste dans MGS 4. Pourquoi? Parce que les conditions posées ne récompenses que l'application bête et méchante de ces mêmes conditions, qui vous obligent par la même à jouer de façon unique et totalement stéréotypée.

Ainsi, respecter un délai vous obligera à suivre un chemin et un seul. Ne pas déclencher une seule alerte conditionnera le joueur à se caler sur le rythme du game design, c'est à dire dans ce cas précis sur les parcours des soldats ennemis... En d'autres termes, un véritable couloir restrictif qui ne dit pas son nom.
La chose est paradoxale car tout le sel de MGS à mon sens est justement de ne jamais se comporter de façon stéréotypée, de toujours faire face à l'imprévu et de répondre à cet imprévu par la biais d'un équipement conséquent. Le paradoxe va même plus loin quand MGS 4 met entre les mains du joueur un arsenal impressionnant qui ne sert au final à pas grand chose et, soyons honnêtes, totalement à rien quand on veut viser les objectifs les plus hauts.

Je déteste quand un jeu me commande de faire quelque chose quand je sais pertinemment que je pourrai y accéder par d'autres moyens, avec un peu d'improvisation et de casse, certes, mais de façon bien plus héroïque et par la même gratifiante que l'apprentissage par coeur envisagé à la milliseconde près par un Kojima tout-pussant.

Le syndrome de la notation foireuse est pour moi un des problèmes de jeu vidéo actuel. Si on peut voir cela comme l'évolution du scoring de jadis, la présence de la narration dans le jeu vidéo (fut-elle bonne ou mauvaise) constitue déjà un objectif en soi qui n'a pas besoin d'être épaulé par des quantifications des moindres faits et gestes. Si la statistique a un intérêt ludique (Record de headshot tranquilisant: 59.075m. \o/ ). Les récompenses conditionnées sont assez superflues. Si vous souhaitez améliorer votre résultat précédent, rien ne vous empêche de vous collez le handicap ou la limite de durée que vous souhaitez. Par contre, ce qui est retors, c'est qu'en liant une récompense à des condtions, vous empechez le joueur d'accéder a une partie du jeu, là où il n'a peut être pas le temps, la patience, l'envie, ou même le talent nécessaire pour respecter les conditions de la notation. C'est un peu hors sujet, mais je repense notamment aux Kingdom Hearts, où vous aviez une vidéo bonus uniquement en terminant le jeu en Difficile.

Si ma PS3 fut achetée avant tout pour Final Fantasy Versus XIII (tout le monde a le droit de faire des erreurs), c'est Valkyria Chronicles, avec sa DA et son principe de Tactical-TPS qui m'a fait sauter le pas. Je vous passe les explications sur le jeu pour en revenir à son système de notation: A la fin de chaque mission vous recevez un rang de S à D, le rang S vous octroyant le plus important bonus d'exp.
Jusque là rien de facheux, sauf que ce rang ne vous est attribué que si vous faites un nombre de tours de jeux le plus bas possible. Ainsi un rang S vous demandera d'exécuter les missions en 3 voire 2 tours de jeu, ce qui vous oblige à jouer toujours de la même manière, à savoir choisir un perso (ici Alicia, (Gloire et levure à notre boulangère ! o/ ) ) et à rusher comme un mort de faim en abusant des bonus et capacités de ce même personnage.

La chose est cruelle car on est ici face à un Tactical qui vous empêche, si vous espérez faire de bons résultats, de jouer de façon tactique. En effet, si vous prenez le parti d'être roleplay (ou même logique) un minimum, vous allez mettre en place des tactiques prudentes, réfléchies où il sera question de couverture, de tirs croisés, de saturation, de camouflage, d'occupation, de renforts, de rapatriement... Bref, tout ce que l'on attend d'une démarche tactique. Sauf que tout cela va gaspiller de nombreux tours de jeux et par la même amputer votre score final, voire vous faire perdre d'office si la partie dure trop longtemps!

Vous pouvez donc faire une partie que vous jugerez parfaite, sans blessés, où les objectifs sont accomplis, où vous aurez capturé toutes les bases où vous aurez disposé vos troupes dans un ordre parfait et vous retrouvez avec le rang D... Aberrant.
Là encore le game design ne laisse aucune liberté à l'interprétation du niveau, à l'improvisation, à la mise en place de stratégies réfléchies et gagnantes. Il faut obligatoirement suivre une méthode calculée (en ce sens on peut dire que le game design est une réussite) pour bénéficier des bonus d'Exp indispensables pour une progression parfaite. Progression parfaite qui paradoxalement ne servira à rien vu que vous devrez concentrez vos efforts sur une méthode et un personnage.

Avec cet exemple,  on voit, je l'espère, la limitation inhérente au "tout-noté" qui au lieu de devenir un descendant du score des bornes d'arcade de jadis, devient sous le prétexte du challenge un ensemble de restrictions qui oblitèrent le plaisir de jeu en forcant le jeu lui-même a être joué d'une seule manière.

Avec tout ça, je n'étais pas très chaud pour titiller la performance sur Grounds Zeroes sentant que les conditions relatives au rang S sont sans doute aussi restrictives que précédemment.
Bien mal m' a en pris puisque le système de conditions restrictives posé par MGS est ici pondéré par  un système de scoring dont nous allons ici parler.
Grounds Zeroes, c'est comme le Contre-Sirop de Perceval, ce qui compte c'est les valeurs. Ainsi les conditions de jadis ne sont plus dénombrées en tant que telles, mais converties ou soustraites en points. On démarre ainsi avec un capital de départ qui est fixé par le temps de jeu: Plus la misssion est réalisée rapidement, plus le total de points est important. D'autres gains de points sont fait lorsqu'on désactive le mode Réflexes ou qu'on libère des prisonniers. A l'inverse, si on tue des gardes, que l'on déclenche des alertes, que l'on recommence la partie, des points sont retirés à chaque fois qu'un incident de ce type survient. 

L'objectif de rang n'est donc plus de respecter des conditions strictes mais de dépasser un certain score attaché au rang.  A partir de ce constat, libre à vous de gérer votre capital de points, de prendre des risques, de faire des détours pour arriver à un équilibre qui peut vous conduire au rang le plus élevé sans avoir à jouer de façon stéréotypée, mais en jouant une partie qui restera votre partie.
Ainsi, mon rang S sur Ground Zeroes s'est obtenu alors que je pensais l'avoir raté. J'avais fait un détour pour libérer un prisonnier caché et j'ai du abattre quelques soldats... Par contre, le fait d'avoir tuer des soldats s'est fait dans l'urgence pour préserver ma discrétion, de même le sauvetage du prisonnier surnuméraire s'est fait dans le respect du chronomètre: une fois que j'ai identifié cet objectif secondaire, j'ai pris le risque de neutraliser rapidement les gardes en faction tout en appelant l'hélicoptère entre deux headshots. (merci l'application iDroid sur la tablette).

Si ce système est maintenu avec The Phantom Pain, c'est un supplément de liberté qui sera donné au joueur. Alors que précédemment le fait de finir le jeu discrètement mais avec de la casse vous sanctionnait immédiatement, Ground Zeroes introduit une pondération à mon sens plus que bienvenue, qui ne sanctionne plus l'initiative, fut-elle (légèrement) malheureuse. Le système n'est pas pour autant ultra-permissif. Il faut toujours être rapide, discret et non-léthal. Cependant, vous aurez plus de lattitude pour gérer votre jeu, votre environnement, en vous permettant de temps à autre quelques explosions et/ou quelques couteaux entre les côtes, en ne vous forçant non plus à la partie parfaite pour débloquer un bonus mais à la partie que vous allez créer avec son lot d'approximations, de calculs renforçant d'autant l'implication du joueur.

 

(Ce coup-ci, y'a un peu tout et n'importe quoi...)

 

 

 

 

 

 

 

 

(et puis cette fois c'est vraiment fini pour cette rubrique en plus...)