On vit une époque formidable.

Je suis français, je peux jouer, discuter, lier amitié avec n'importe qui dans le monde grâce au net. Je peux découvrir des cultures, apprendre mille choses, échanger des d... ah ben merde non, 'peux plus échanger des données. Mon fournisseur d'espace en ligne s'est fait buter par un service d'un pays dans un autre pays (... au secours...), convaincu du bien-fondé de son action par un lobby aigri de gens qui ont mal fait leur travail à la source.

Pour ceux qui diront "oué mé maigaheuplode cété du pirataj", je vous arrête tout de suite : MU ne fournit que de l'espace en cloud. Point. Il n'y pas sur MU de catalogue des fichiers disponibles. Pour savoir que le film que vous recherchez s'y trouve, vous devez passer par un moteur de recherche (qui prendra la forme d'un moteur usuel ou d'un site dédié) PRIVE où ceux qui auront stocké un medium aurons dévoilé l'adresse permettant d'aller chercher le dit medium.

En gros, c'est comme si un concessionnaire vous confiait une voiture, que vous la gariez chez vous avec les vitres ouvertes et le garage pas verrouillé et que vous alliez dire où la trouver sur facebook. Si on la pique, qui le concessionnaire doit-il attaquer ? Vous, facebook ou le constructeur de la maison ? En l'occurrence, c'est le constructeur de la maison qui vient de se faire dégonder. Logique. Américainement logique. Car rien n'a été fait contre les sites répertoriant les liens et (plus encore) contre les gens ayant stocké un medium et qui y donnent accès... et génèrent donc le piratage (les sites répertoriant les liens étant en l'occurrence considérés comme "facilitant" le piratage, donc tout aussi coupables).

Quant à ceux qui ajouteront "Oué mé lé patron 2 MU il zété pété de tune", je réponds que ces mecs ont fait leur pognon grâce aux pubs sur leur site et grâce aux abonnements. Si vous voulez on discute de la pertinence de supprimer toute notion de pub et d'abonnement de notre système commercial, je pense qu'on n'a pas fini de se marrer.

A titre professionnel, MU avait ces dernières années pris de plus en plus d'importance pour mes clients comme pour moi : dans une région où les connexions sont notoirement mauvaises (donc impossible de transmettre par mails de grosses pièces jointes) et dans un métier où le volume de données a été multiplié par 10 au cours des 5 dernières années, MU était devenu une vraie panacée. Le lendemain de l'intervention ricaine, ce sont des dizaines (pour ma seule profession, j'imagine à peine au global) d'appels d'offres de marchés publics qui ont du être annulés, faute de pouvoir (pour le client) donner accès aux données des dits marchés. Qui va en assumer les conséquences (retard des marchés = décalages des budgets = argent public bloqué + entreprises avec moins d'activités = vous connaissez la suite) ? Ben nous bien sûr.

C'est le premier acte arbitraire de censure numérique du 21ème siècle. Ce ne sera pas le dernier.

A nous tous de voir si nous sommes disposés à continuer dans cette voie.

Si oui (que ce soit par choix ou par passivité comme cela risque d'être le cas), soyons prêts à en assumer toutes les conséquences. Pour la description exhaustive des dites conséquences, merci de relire l'histoire de l'humanité au cours des années 1900 à 1980.