Ce billet fait évidement suite aux mésaventures de notre célesto cosmique JulienC au cœur d'un imbroglio politico-journalistico-troubadourien. Vous me pardonnerez cette formule abracadabrantesque (c'est une expressioçn présidentielle, ça en jette). Puisqu'on ne me demande pas mon avis, je vais le donner (c'est typique du web 2.0 tout est normal ;) )

I'm a troubadour célesto cosmique

Un malentendu comme détonateur

Principal sujet de polémique : Les gens qui écrivent dans le milieu du jeu vidéo ne sont pas des journalistes. C'est en tout cas, de cette façon que son intervention dans le grand débat a été perçue. Je trouve que d'emblée, la réaction manque sacrément de réflexion et surtout de recul. Ce qu'essayait à mon avis de faire passer Julien dans ses propos (10 minutes c'est très court pour débattre) c'est que bien que l'activité fasse partie du champ professionnel du journalisme, il ne se définissait pas comme un journaliste au sens stricte du terme. Et il a parfaitement raison.

Le cœur du métier de journaliste, c'est de recueillir des informations sur un événement ou une activité quelle qu'elle soit. Cela peut concerner la vie politique, sociale, sportive aussi bien que les jeux vidéo. Mais lorsqu'on pense journaliste, on imagine plus une activité de reporter sur des sujets autrement moins légers que le divertissement. Dans le milieu du jeu vidéo, on reporte de l'info ou en va en chercher (ce qui n'est vraiment pas du tout la même chose), et majoritairement on porte un regard critique sur les jeux pour orienter les acheteurs potentiels que nous sommes. J'ai lâché le mot « critique » et c'est ce qui se rapproche le plus de ce que font les journalistes de jeu vidéo.

Plus intéressantes à mon sens sont les tentatives de réflexion sur certains sujets qui relèvent d'un travail cette fois d'éditorialiste. C'est ce que fait RaHan avec ses éditos hebdomadaires et Bounthavy par exemple très souvent au début de chaque IG Mag. Mais cela fait partie d'un travail de journaliste. Là ou ses détracteurs se trompent de débat c'est que Julien ne fait qu'utiliser un terme de son cru (le troubadour) qui peut donner un côté bouffon au journaliste jeu vidéo.

Le troubadour de l'info

Pour détourner une célèbre citation de Clémenceau ; Le jeu vidéo est une affaire trop sérieuse pour qu'on la laisse à des troubadours. Comme d'autres médias, le jeu vidéo commence à acquérir ses lettres de noblesse. Du coup, on essaie de traiter le sujet avec de plus en plus de sérieux. Les livres intéressants sur le sujet fleurissent et tout le monde se donne et donne encore plus de légitimité à ce média. A l'instar du cinéma qui a ses cadors et ses enfants terribles, le jeu vidéo est peut être aussi en train de donner naissance à des courants plus ou moins bourgeois de traitement. Pourquoi pas, chacun ses goûts ses couleurs et ses éclairages...

J'ai gagné une série de Tweets !

Je dois dire que j'ai aussi été heureux qu'on passe d'une activité de gosse (pour caricaturer) à une activité culturelle comme la littérature ou le cinéma. Je me suis d'ailleurs fendu d'un billet contre les pseudonymes utilisés par un grand nombre de journalistes du jeu vidéo.

Mais comme le souligne bien Julien, il faut se souvenir qu'on parle d'un divertissement bien dispensable. Même s'il fait vivre des gens et nous passionne. Prendre du recul par rapport à tout cela nous aide à garder les pieds sur terre et à ne pas tomber dans le journalisme pédant qui caractérise malheureusement trop souvent ce milieu. Les réactions épidermiques auxquelles il a eu droit semblent d'ailleurs plaider dans ce sens. Cela fait entre autre partie des raisons qui m'ont retenu dans mon ancienne envie de faire une école de journalisme pour travailler dans le jeu vidéo (tout le monde me regardait d'ailleurs de travers à l'époque ; faire une école pour « ça »?). Pour faire court, j'ai un jour eu droit à une très belle réplique d'un étudiant en journalisme qui ne résume que trop bien cet esprit hautain que j'ai du mal à supporter. Sachant que je travaillais dans le milieu du soin, il m'avait dit « Vous soignez les corps, nous soignons les âmes ». Quelle remarque prétentieuse.

Le vrai sujet

La polémique a enflé au point qu'on en avait presque oublié le sujet de fond. Qu'est ce qui différencie le journaliste du blogueur ?

Il a été cité que le premier était payé pour ce qu'il faisait. Bon. La porte ouverte est enfoncée, mais il fallait le faire. Sachant qu'une carte de presse s'obtient en justifiant qu'une majeur partie de ses revenus est issue d'une activité journalistique (et non d'un quelconque diplôme) l'aspect pécuniaire est non négligeable dans la définition de la profession. A ce propos, je suis d'ailleurs surpris Julien, que tu n'aies pas de carte de presse (comme je crois tu l'a signalé dans une réponse de Tweet).


Marcus prêt à distribuer des baffes

Journalistes et blogueurs écrivent sur le même sujet et peuvent avoir des plumes équivalentes pour autant que le talent soit associé à un minimum de technique. Ce n'est donc même pas sur la forme que je ferai une différence. Certes, le professionnel se doit de proposer un travail propre aussi bien sur le fond que sur la forme. Mais un bon journaliste et un bon blogueur peuvent produire des travaux équivalents en qualité. En revanche, le second ne pourra -la plupart du temps- le faire à la même fréquence que le premier (c'est une évidence).

Je crois que la réelle différence se fait justement sur ce qui fait la force du métier. L'activité professionnelle est à double tranchant et j'avais déjà abordé un peu le sujet avec le billet « Détester tester ? ». Le parcours des journalistes a généralement germé dans le terreau de la passion pour le jeu vidéo. Mais le fait même que cela soit un travail sous entends naturellement que l'on va devoir faire des choses qui sortent de la passion et donc de l'envie. Le journaliste peut alors facilement perdre la crédibilité que lui donnait son statut de passionné. Il sort d'un cercle. Le blogueur lui, va écrire juste parce qu'il en a envie sur un ton de liberté assumé. Car, quoi qu'on en dise la censure existe, même si elle n'est pas réelle et patente. Je m'explique.

J'ai la chance de pouvoir écrire ici de manière totalement libre. Je ne vais pas écrire de la même façon sur Rue89 ou pour mes piges rémunérées. Tout simplement parce qu'on me demande un travail qui répond à un certain cahier des charges. Je sais aussi que je ne m'adresse pas au même public. Donc, de facto et même si ma démarche n'est pas volontaire, je m'applique une forme d'auto censure. Et pourtant, c'est la même personne et rien n'est caché. Même si cela reste discret on peut très facilement trouver ma véritable identité. Pierre-Alexandre Conte (un vrai journaliste) n'écrit pas de la même manière dans IG Mag, pour Jeuxvideo.com, dans Le Monde ou dans Air le mag.

Plus on s'approche de l'activité professionnelle, plus on s'approche ce cette auto censure qu'il faut appliquer. Peut être que mes mots ne sont pas justes, peut être qu'on pourrait le définir autrement. Censure est un mot qui peut sembler trop péjoratif. Parlons alors de ligne éditoriale ? Je ne sais pas pourquoi, j'ai l'impression que je vais me faire écharper sur ce sujet:) L'avantage c'est que le journaliste a ainsi plus tendance à prendre du recul par rapport à ce qu'il va écrire. Le blogueur lui, va s'exprimer avec toute la sincérité possible, mais probablement sans prendre ce recul et donc en objectivant moins son propos.

Le débat est intéressant et ce n'était certainement pas en 10 minutes que l'on pouvait en faire le tour. Et pas non plus en quelques paragraphes. Mais je pense que les réponses vont fuser et qu'il y a beaucoup à dire, alors je vais me contenter de botter en touche. La dissertation est déjà assez longue comme cela. Rendez-vous dans les commentaires. Je suis certain qu'il vont donner lieu à d'autres débats.